Après des années 2020 et 2021 exceptionnellement calmes sur le front des alertes pollution, l'année 2022 est malheureusement celle de la reprise. Il faut dire que les événements de nature à affoler les compteurs de Scal'Air, l'association en charge de la surveillance de l'air, n'ont pas manqué. Entre le retour à la normale du côté des croisières et l'installation, en septembre, de la nouvelle centrale électrique de l'usine de Doniambo.
Une recrudescence des alertes
En un an, ce sont 43 dépassements du seuil d’information et de recommandation au dioxyde de soufre qui ont été recensés par Scal’Air. Il n’y en avait que quatre en 2021 ou en 2020, cinq en 2019. Finalement, on retrouve un niveau semblable à celui des années 2010. Entre 2011 et 2019, le seuil de recommandation, fixé à 300 microgrammes par mètre cube ( µg/m3) sur une heure, avait été dépassé plus de quarante fois en 2011, 2013, 2014 et 2016.
Concernant le seuil d'alerte cette fois, soit plus de 500 µg/m3 pendant 3 heures, il a été dépassé trois fois en 2022. C'est la première fois depuis 2012, et ses 5 alertes, que ce niveau est atteint.
Autre type de pollution, celle observée dans le Sud autour de l'usine Prony Resources. Trois dépassements de la valeur de limite horaire sur la végétation ont été comptabilisés, et un dépassement de la limite annuelle pour toute l'année 2022.
Le 8 avril 2022, pire jour de l'année
Sur les trois dépassements de 2022, deux ont eu lieu le même jour. C'était le 8 avril, au niveau de la station de l'école Griscelli à la Vallée-du-Tir, à Nouméa. Dès 3h45 le matin, le seuil de recommandation est dépassé, avant un dépassement du seuil d'alerte vers 6 heures. Le seuil d'alerte est dépassé une seconde fois dans la nuit avec des mesures à plus de 1.000 µg/m3 par heure en moyenne pendant quelques minutes.
Parmi les raisons de ces mesures, le passage de la dépression tropicale Fili. Avec un vent d'ouest à plus de 24 nœuds (environ 45 km/h), "ces conditions ont favorisé la dispersion du panache industriel de Doniambo vers la Vallée-du-Tir", explique Scal'Air.
La centrale accostée de Doniambo en question
Dans son rapport d'activité, Scal'Air se pose la question de la météo comme explication des dépassements de seuil dans certains quartiers de Nouméa. Les nombreux coups d'ouest de l'année 2022 auront porté le panache de l'usine de Doniambo plus loin et plus largement, surtout au-dessus de Montravel et la Vallée-du-Tir.
Néanmoins, "il serait nécessaire de mener une étude plus complète, y mêlant les données d'émissions de dioxyde de soufre sur le site industriel de Doniambo (...) pour mieux cerner l'ensemble des causes à l'origine de ces nombreux dépassements", peut-on lire dans le rapport de Scal'Air.
L'association revient également sur la question de la centrale accostée temporaire. Son rôle dans les émissions totales de la SLN a été limité, parce qu'elle n'a été mise en route qu'en fin d'année. Malgré tout, Scal'Air réaffirme regretter "l'absence de procédés technologique de réduction des polluants". Elle recommande donc de renforcer la surveillance de la qualité de l'air dans le secteur, ce qui a commencé à être fait avec des points en plus à Nouville et à la Vallée-du-Tir.
Quel impact réel des paquebots ?
Autre nouveauté, ou plutôt retour, de l'année 2022, c'est celui des bateaux de croisière avec un rythme aussi soutenu qu'avant la crise Covid. Pour autant, difficile de connaître la proportion exacte des émissions des paquebots dans la pollution de l'air à Nouméa. "Le Port autonome a fait appel à Scal’Air dans le cadre de leur schéma de transition énergétique et écologique, expose l'association. Une étude de l’impact de l’activité portuaire in-situ va être menée sur 18 mois."
Vers une surveillance autour de Vavouto
L'usine SLN de Doniambo est très surveillée par Scal'Air. Celle de Prony Resources dans le Grand Sud, de plus en plus. L'association demande donc à présent d'étendre son champ d'action à l'usine du Nord avec un système de surveillance à Vavouto. "Depuis juillet, nos agents assurent la gestion des trois stations de surveillance présentes autour de l’industriel (Voh, Gatope, Oundjo), détaille Scal'Air. Une mise en conformité des stations et appareils sera nécessaire afin d’obtenir des données de qualité comparables aux autres réseaux de mesure."
L'autre ajout, qui concerne Nouméa cette fois, c'est le retour de la station de l'Anse-Vata. Et ce, pour avoir un meilleur maillage de la commune et une idée plus précise de la qualité de l'air dans toute la ville, pas seulement aux alentours de Doniambo.