Nucléaire : le gouvernement ré affirme sa volonté d'améliorer le dispositif d'indemnisation des victimes

Le palais Bourbon
En réponse à une question écrite au gouvernement sur l'optimisation des demandes de traitement des dossiers d'indemnistation des victimes des essais nucléaires, la ministre de la santé rappelle l'engagement pris à Tahiti par François Hollande de préciser la notion de risque négligeable.
Les services des ministères concernés travaillent activement à l'amélioration du système d'indemnisation des victimes du nucléaire répond en résumé le gouvernement à la question écrite que lui a posé le député Jean Luc Bleunven en décembre 2015. 
Le parlementaire du Finistère estime que la loi Morin permettant de reconnaître et d'indemniser les victimes "ne fonctionne pas". Il illustre son propos en rappelant que le taux d'indemnisation des victimes "ne dépasse pas les 2%" et que la notion de "risque négligeable" constitue un frein important qu'il convient de supprimer de la loi Morin.

La question écrite du député :


Jean Luc Bleunven, député du Finistère
M. Jean-Luc Bleunven attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur le dispositif d'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Lors de la commission dumardi 13 octobre 2015, présidée par la ministre de la santé, l'État a reconnu désormais que la « loi Morin » du 5 janvier 2010 relative au dispositif de reconnaissance et d'indemnisation des victimes potentielles des essais nucléaires français ne fonctionne pas.

En effet, depuis trois ans, aucune amélioration n'est intervenue dans le traitement des demandes. Le très faible taux d'indemnisation ne dépasse pas les 2 %. Les dossiers sont rejetés sur le fondement de l'article 4 de cette loi qui fait référence à la notion de « risque négligeable ». Face à cette situation, les victimes ont contesté les décisions du ministre de la défense devant les juridictions administratives. Dans une courte majorité d'affaires, les cours administratives d'appel ont jugé que le CIVEN dans ses recommandations et le ministre dans sa décision n'avaient démontré l'existence du risque négligeable.

La ministre de la santé a manifesté la volonté de faire réellement évoluer les choses. Elle a mis l'accent sur des nouvelles mesures pour améliorer le dispositif actuel prenant conscience qu'il s'agit bien d'un problème de santé publique. La ministre propose de revoir la méthode d'évaluation des dossiers par le CIVEN afin qu'il puisse répondre aux exigences de transparence et de débat.

Par contre, il n'est pas prévu de supprimer la fameuse notion de risque négligeable à laquelle se heurtent la plupart des demandes. Or les arrêts rendus permettent de ramener les victimes à la réalité des choses. Le juge s'appuyant sur un ensemble d'éléments ne leur donnera jamais systématiquement gain de cause.

Concrètement, il semble que tant que la notion de risque négligeable ne sera pas supprimée, il n'y aura pas de changement. En conséquence, Il lui demande quelles sont les intentions qu'elle entend prendre afin de permettre une indemnisation légitime des victimes.


La réponse de Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, publiée au journal officiel du 3 mai dernier rappelle la volonté du gouvernement "d'améliorer le dispositif d'indemnisation" et de réviser l'appréciation de la notion de risque négligeable. 
La ministre souligne que lors de sa venue à Tahiti le 22 février dernier, François Hollande a annoncé que : "le décret d'application de la loi Morin sera modifié pour préciser la notion de risque négligeable pour permettre à plus de victimes d'être indemnisées notamment lorsque les mesures de surveillance qui auraient été nécessaires n'ont pas été mises en place".

La réponse de la ministre :


Marisol Touraine, ministre de la santé
Le comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) a été institué par la loi no 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires. Auparavant consultatif et placé sous tutelle du ministère de la Défense, le CIVEN est devenu, depuis la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013, une autorité administrative indépendante, et fonctionne sous ce nouveau statut depuis février 2015.

Le système d'indemnisation repose sur une présomption de causalité entre les expositions aux rayonnements ionisants des essais nucléaires français et une maladie radio-induite. La présomption de causalité bénéficie toujours au demandeur lorsqu'il souffre ou a souffert de l'une des maladies radio-induites mentionnées en annexe du décret et qu'il a résidé ou séjourné dans l'une des zones entrant dans le périmètre du décret. Cette présomption ne peut être écartée que si le risque attribuable aux essais nucléaires peut être considéré comme négligeable au regard de la nature de la maladie et des conditions de l'exposition aux rayonnements ionisants.

La commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires a été réunie le 13 octobre 2015, pour la première fois sous la présidence de la ministre des affaires sociales et de la santé. La ministre a fait part de sa volonté d'améliorer le dispositif d'indemnisation, en commençant par une plus grande transparence de la méthode d'indemnisation et d'appréciation du risque négligeable par le CIVEN pour identifier les leviers d'amélioration à recommander.

Sur la base des travaux engagés en ce sens, le Président de la République a annoncé, lors de son déplacement en Polynésie française que le décret d'application de la loi no 2010-2 serait modifié pour préciser la notion de risque négligeable pour permettre à plus de victimes d'être indemnisées notamment lorsque les mesures de surveillance qui auraient été nécessaires n'ont pas été mises en place. Les services des ministères concernés travaillent activement en ce sens.


Question / réponse sur le site de l'Assemblée nationale