Les premiers habitants de Polynésie sont arrivés à la voile sur des pirogues, mais comment ont-ils fait ? Comment ont-ils réussi à naviguer juste en observant la nature ? Nos kidreporters ont rencontré Teiva, qui transmet dans son école sa passion pour la pirogue à voile traditionnelle.
Le replay
Des pirogues à voile qui allient tradition et modernité
Nos Kid reporters se sont rendus à Arue dans l’école de pirogue à voile traditionnelle de Teiva Véronique O’sea va’a ta’ie. Construites selon les plans de nos ancêtres, mais avec des matériaux modernes, ces pirogues allient tradition et modernité.
Le mât est en carbone, avant c’était en bambou ou en bois de uru ou de manguier. Les voiles étaient en pandanus. Aujourd’hui c’est du dacron. Les cordages étaient en fibre de coco, la coque creusée dans du uru ou du to’u. Aujourd’hui c’est conçu dans des moules avec de la fibre de verre et de la résine polyester.
Quelques termes en tahitien sur une pirogue à voile, un va’a ta’ie :
La coque : tino va’a
Les bras de liaison : ‘iato
Le trampoline : pa’e pa’e
La barre / la rame : hoefa’atere.
La voile : i’e.
La dérive : taere.
Des ancêtres venus de Micronésie
Avant ces petites pirogues servaient principalement à la pêche. Pour les grands voyages, les pirogues étaient beaucoup plus grandes comme la célèbre pirogue Hokulea, ou encore Fa’afaite. Toutes deux sont retournées sur les traces de nos ancêtres polynésiens.
C’est ainsi que les premiers Polynésiens venus de Micronésie, comme les Samoa, les Tonga auraient débarqué il y a plus de 1000 ans à Raiatea, centre de la pieuvre, te fe’e en tahitien, symbole des navigations qui suivirent pour découvrir le Pacifique, ce qu’on appelle aussi le triangle polynésien, et symbole du lien maori qui unit les îles entre elles.
Naviguer en observant la nature
Les générations se sont succédé, mais les règles pour bien naviguer n’ont pas changé ! Pour se repérer et se diriger les anciens observaient la nature, comme la direction de la houle, du vent, mais aussi la position du soleil. Comme il se lève toujours à l’Est et se couche à l’Ouest, ils pouvaient connaître leur direction et estimer l’heure.
L'orientation du vol des oiseaux était aussi un indicateur pour aider les navigateurs à retrouver une île. Certaines espèces d'oiseaux dorment à terre et les anciens suivaient la direction de leur vol au coucher du soleil ou la direction inverse au lever. Par exemple, le noddi, ‘oio, ne s'écarte pas à plus de 20 miles de son île. Par contre, la frégate ('ötaha) peut voyager jusqu'à 35 milles. Et le paille en queue (tava'e) jusqu'à 110 milles de la terre car ces espèces peuvent dormir sur l'eau.
La nuit, les marins savaient lire le chemin des étoiles, en calculant leur distance par rapport à l’horizon. quand ils partaient d’une île, ils prenaient beaucoup de repères en arrière. Dans le sillage, ils regardaient où était positionnée l’île, comment elle était positionnée par rapport aux étoiles et aux constellations. Comme ça, même s’ils naviguaient pendant des jours et des jours, et qu’ils ne trouvaient pas d’île, en faisant demi-tour, ils savaient revenir au point de départ. C’était magique. Comme ça, ils ne se perdaient pas en mer.
Les pou et les rua
La nuit, les étoiles semblent fixes, mais si on passe toute la nuit à les observer on s’aperçoit qu’elles bougent, elles se lèvent à l’Est et viennent se coucher à l’Ouest. Si on les filme toute la nuit depuis le même endroit en accélérant le temps, on a même l’impression qu’elles tournent autour de nous. C’est ce que les Polynésiens appelaient les rua, le chemin d’étoiles, « avei’a » en tahitien.
Dans l’hémisphère sud, elles tournent autour du Pôle sud céleste mais c’est une zone vide d’étoiles, alors que dans l’hémisphère nord le pôle nord céleste se repère facilement avec l’étoile polaire. Cette impression de mouvement des étoiles, c’est parce que la Terre tourne sur elle-même. Elle fait le tour complet, 360° en une journée, 24 heures, soit un degré toutes les 4 minutes. Si on veut être précis, en 23h56.
Ainsi les marins choisissaient une étoile brillante à l’horizon, un pou, et au fur et à mesure qu’elle se déplaçait dans le ciel, ils choisissaient une autre étoile placée au même endroit que la précédente et ainsi de suite.
Pour calculer tout ça, leurs mains étaient de précieux instruments de mesure… Elles permettaient de mesurer la hauteur de l’étoile. Par exemple avec la main ouverte, tendue vers l'horizon, la distance entre le pouce aligné sur la mer et le majeur pointé vers le ciel, représente environ 16° de latitude. L'épaisseur du doigt est à peu près égale à 2°. Avec cette méthode, alliée à une connaissance parfaite des astres, de leur chemin dans le ciel et de leur distance par rapport à l'horizon, ils pouvaient sillonner l'immensité du pacifique sans se perdre et sans boussole, ni GPS.
Il faut savoir aussi que tous les jours, une étoile se décale d’un degré, tous les jours, tous les soirs… En fait ce ne sont pas les étoiles qui se décalent, mais nous ! Puisque la Terre tourne autour du soleil en 365 jours. Donc chaque jour, la Terre décale un peu sa position d’observation des étoiles. Ainsi une étoile sera visible seulement six mois de l’année, parce que pendant les six autres mois de l’année, elle sera de l’autre côté de la Terre pendant la nuit. Donc on verra d’autres étoiles. Six mois après, on va commencer à la revoir à l’horizon pendant la nuit et ainsi de suite.
A chaque île, son étoile zénithale
Chaque île polynésienne avait une étoile de référence particulièrement brillante, qui passe au zénith, cad juste au-dessus de nous, quand on se retrouve à la bonne latitude de l'île. Par exemple Sirius, l'étoile zénithale de Raiatea Ta'urua nui i te amo ’aha ou Ta’urua faupapa en tahitien, c’est-à-dire qu’elle va passer juste au-dessus d’Uturoa à un moment de la journée ou de la nuit. L’étoile de Raivavae est Ana Mua, Antares dans la constellation du scorpion, que les Polynésiens appellent Te Matau o Maui, l'hameçon du Dieu Maui. Ou encore Hokulea est l’étoile zénithale de Hawaï qui correspond à Arcturus, dans la constellation du Bouvier.
Quelques conseils pour reconnaître certaines étoiles
Regardez vers le ciel, si vous voyez une petite constellation avec une forme de petit cerf-volant. c’est ce qu’on appelle en français les Pléiades, et en tahitien Matarii.
Et si vous regardez Matarii, regardez légèrement vers la droite et vers le bas, vous verrez une étoile un peu orange. Elle s’appelle Anamuri, c’est Aldebaran dans le taureau. La constellation du taureau fait comme un V.
Juste à côté, une autre facile à reconnaître est Rua nu amere la ceinture d’Orion
Une autre constellation importante est le scorpion. Les marins polynésiens y voyaient l’hameçon magique de Maui, avec lequel il a pêché les îles du fond des océans.
Une autre légende dit qu’il s’agit de la queue du cerf-volant de Hiro qui s’est cassée, et le cerf-volant c’est la Croix du Sud…
La Croix du Sud, Tou Ha en tahitien, le groupe des 4, servait aussi à repérer le pôle Sud céleste. Il suffit de prolonger de 4 fois ½ le grand axe de la Croix pour localiser le pôle Sud céleste. De là on tire une verticale perpendiculaire à l’horizon pour connaître le sud géographique.
Maintenant qu’on en sait plus sur la navigation aux étoiles et qu’on a appris à naviguer, on vous donne rendez-vous dans notre prochaine émission Kid reporters pour la suite de notre reportage sur la pirogue à voile Nous sommes allés visiter pour vous une pirogue à voile qui a déjà navigué dans tout le Pacifique : Fa’afaite…
La question du jour
Aux temps anciens, les navigateurs polynésiens sillonnaient le grand Pacifique en suivant :
le GPS, réponse 1
le soleil et les étoiles, réponse 2
la chance et le hasard, réponse 3
Si vous n’avez pas la réponse, revisionnez le reportage en replay sur le site internet www.polynesie.la1ere.fr
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Kidreporters : Abigael CHARPENTIER, Haumatai GOULET, Heremoana GOULET, Ilikea DHALLUIN, Lunescence NABET, Tahiatiki DORDILLON, Touià DORDILLON, Teka DAUPHIN
Présentateur/trice kidreporter : Outurau IORSS
Personne interviewée : Teiva Véronique, fondateur et moniteur de l’école de pirogue à voile traditionnelle Osea vaa ta’ie
Equipe technique :
Réalisation, tournage, montage, infographie, post-prod : Hélène LEROYER-GOULET + participation des kidreporters
Générique, infographie, post-prod : LUCID DREAM
Enregistrement plateaux : Studio DGEE
Musique du générique créée par LES COMPTINEURS DE TAHITI Production : API ORA Production