En l’absence des deux réalisateurs, c’est Fabien Laubry, le chef monteur du documentaire Maxha : relever la tête, qui est venu raconter l’histoire du film pendant un Inside the doc organisé ce mercredi après-midi.
La grande case du sud située dans la partie coutumière du centre culturel Tjibaou doit être « repaillée » : tout son toit doit être refait avec de la paille neuve et il faut vérifier si son intérieur est toujours d’aplomb.
L’occasion pour Emmanuel Tjibaou d’inviter toutes les communautés présentes en Nouvelle-Calédonie à participer à l’événement.
On le voit d’abord se présenter face aux vieux, faire la coutume, et leur demander une permission : « A-t-on le droit de faire entrer les communautés ? » On lui répond oui : « La parole échangée dans la case, il faut la transmettre et la partager. » Il se présente alors à toutes les communautés : tahitienne, caldoche, wallisienne, indonésienne, arabe… Et les invite à participer à la reconstruction de la case.
Plus précisément, elles doivent chacune amener un objet qui les représente et celui-ci sera déposé en haut de la case, dans le « panier », là où toutes les paroles montent, un endroit sacré.
L’idée d’intégrer toutes les communautés à un événement kanak vient d’Emmanuel : « Il disait que ça suffit de faire des blocs identitaires en Calédonie, il faut arrêter de faire des choses qui nous divisent mais plutôt faire des choses qui nous rassemblent. C’est le moment de rénover la case : c’est notre symbole culturel mais il est possible de rassembler tout le monde », raconte Fabien Laubry.
On assiste donc à tous ces échanges. « Le tournage s’est passé dans un esprit de collecte de paroles. Les réalisateurs, Emmanuel Tjibaou et Nunë Luepack, voulaient essayer de récupérer le plus de paroles possibles. Aller jusqu’au bout dans les interviews pour emmagasiner des mots importants. Pendant la coutume, on se présente avec beaucoup d’humilité, chacun laisse la parole à l’autre, s’écoute. On prépare rarement ce qu’on va dire, il faut que ça vienne du cœur. »
Ce moment d’invitation des communautés devait rester gravé : « Quand on a commencé à discuter du projet, je leur ai demandé pour qui ils faisaient le film ?
Nunë Luepack m’a dit qu’il le faisait pour ses vieux et Emmanuel Tjibaou pour ses enfants. Nos vieux sont importants mais qu’est-ce qu’on donne à notre jeunesse ? »
Chaque communauté a accueilli cette proposition de rentrer dans la case comme une bénédiction : « Nous voulons saisir cette opportunité pour ne faire qu’un. Qu’est-ce qu’on peut demander de plus ? On est heureux de participer. »
Pour d’autres, c’est le signe de l’acceptation : « Nous devenons des enfants du pays, nous ne sommes plus à l’extérieur. »
La paille neuve qui sera installée, bien serrée, sur la couverture de la case, vient de tout le pays. « Il a fallu faire le chemin de la paille et elle vient d’énormément d’endroits de Nouvelle-Calédonie pour que toutes les tribus puissent participer à la reconstruction de la case. Le travail de la couverture est quelque chose qui se perd car la jeunesse s’est un peu exilé de la tribu. Mais des jeunes sont venus faire les gestes et participer. La paille a permis de rassembler tout le monde. »
Puis une fois cette partie terminée, les communautés se sont présentées à la case pour faire la coutume et déposer leurs objets.
A travers la reconstruction d’une case, c’est toute une société qui se rebâtit, ensemble.