"J'ai été condamné pour meurtre ou assassinat, je ne sais plus trop," raconte l'un des détenus aux auteurs, au cours des 55 entretiens (détenus, familles, personnels...) qu'ils ont menés. Une illustration qui en dit long sur les malentendus linguistiques et leur poids, car l'assassinat est considéré comme plus grave au regard de la loi car commis avec préméditation. "Si on ne comprend pas bien le sens de sa peine, comment bien se réinsérer dans la société ou comment travailler sur soi en suivi psychologique ?" s'interroge le linguiste Jacques Vernaudon.
Avec l'anthropologue Marie Salaün, ils répondent d'abord à une commande publique en 2019 de la mission des services pénitentiaires de l'Outre-mer, sur la prise en charge spécifique des populations autochtones en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie. Une fois le rapport remis, avec la collaboration de Mirose Paia, ils décident de le rendre accessible au grand public, publié aujourd'hui Au Vent des Îles.
La prison reste une vision fantasmée, avec beaucoup de stéréotypes, "Nuutania, la pire prison de la République", "Tatutu, l'hôtel 5 étoiles", une sorte de "boîte noire", "mais la prison, même si elle est physiquement loin, en fond de vallée, fait partie de la société," rappelle Jacques Vernaudon.
L'ouvrage est un miroir de notre société contemporaine et de sa violence structurelle.
Les auteurs relèvent entre autre particularités polynésiennes, l'empathie des surveillants envers les détenus, la solidarité polynésienne, malgré une violence latente et des risques. Selon eux, le respect vient avec l'usage des langues polynésiennes.
Autre spécificité : les rations de nourriture, plus importantes en Polynésie, lors des repas mais aussi celles autorisées à entrer lors des visites.
L'intégralité des droits d'auteur de ce livre sera reversé à des oeuvres au bénéfice d'anciens détenus.
Les auteurs seront en dédicace ce samedi 2 décembre, de 9h à 12h à la librairie Odyssey.