Des scientifiques basés au Royaume-Uni ont cherché à évaluer les conséquences de l'extraction minière dans la zone de Clarion-Clipperton (CCZ), une immense plaine à plus de 4.000 mètres de profondeur, dans les eaux internationales entre Hawaï et le Mexique.
Un test y a été mené en 1979, avec une machine qui a raclé le fond marin, en retirant les nodules, ces galets de métaux comme le cobalt et le manganèse, aujourd'hui très recherchés pour les batteries, les panneaux solaires ou les écrans tactiles.
Les scientifiques ont étudié le site en 2023 et observé que les traces de cette activité étaient toujours bien visibles 44 ans plus tard.
Le nombre d'animaux a été réduit pour beaucoup d'espèces à l'intérieur des traces, mais nous avons aussi observé les premiers signes de rétablissement biologique.
Daniel Jones - auteur principal de l'étude du Centre national d'océanographie (NOC) britannique
Les scientifiques ont observé des créatures plutôt petites et mobiles à l'intérieur de la zone d'extraction, mais les animaux plus gros, qui se fixent sur le plancher océanique, y étaient toujours "très rares".
Les effets de l'extraction durent probablement "de nombreuses décennies au moins" et un plein retour de la vie est peut-être "impossible" avec l'extraction des nodules, qui servent d'habitat pour la vie marine.
L'exploitation minière comme couverture de la CIA à l'époque ?
Cette mise en garde intervient au moment où les pays débattent de la création d'un premier code minier, que l'Autorité internationale des fonds marins est censée finaliser cette année. Les défenseurs de l'environnement s'opposent à toute exploitation minière et veulent protéger la biodiversité, largement méconnue, de ces abysses.
Daniel Jones a localisé le site du test de 1979 en parcourant les archives. Selon lui, cette expérimentation cache une histoire rocambolesque : la CIA essayait à l'époque de retrouver un sous-marin nucléaire russe, utilisant l'exploitation minière comme couverture. Mais l'agence de renseignement américaine a fini par louer son bateau pour une véritable opération d'extraction.
"Nos résultats ne disent pas si l'exploitation minière en eau profonde est socialement acceptable. Mais ils fournissent les données nécessaires pour prendre des décisions politiques mieux informées", a précisé Adrian Glover, du Musée d'histoire naturelle de Londres, co-auteur de l'étude.