"En 2024, on a produit 450 tonnes environ pour un besoin autour de 1 500 tonnes" déplore Jérome Chapelier, directeur d'exploitation de l'usine de jus de fruit de Moorea. Depuis une dizaine d'années, les livraisons d'ananas s'effondrent. L'île de Tahiti capte une grosse partie de la production. Autrefois, l'exploitation de la Presqu'île servait à satisfaire ce marché, mais elle est aujourd'hui fermée. C'est donc Moorea qui fournit la capitale. Pour compenser ce manque, "on est obligés d'importer du concentré d'ananas qui vient de Thaïlande ou du Costa Rica, au lieu de faire vivre les familles polynésiennes" regrette Jérome Chapelier.
Coco Teraiharoa est agriculteur. Il cultive la Queen Tahiti depuis 40 ans. Sur ses trois hectares de terrain, il produit environ 25 tonnes par an. Lui aussi observe une baisse constante de la production d'ananas ces dernières années, qui va de pair avec une baisse du nombre de producteurs. "Ils vont peut-être vous dire que les jeunes sont fainéants. Non, ils ne sont pas fainéants, ils ont tous quitté. Si on prend des travailleurs, on ne s'en sort pas, c'est pour ça que je n'en prends pas" confie-t-il.
Baisse de production et d'intérêt pour la filière
Dix agriculteurs cultivent actuellement la Queen Tahiti. Ils étaient cinq fois plus il y a quelques années. À la tête de la coopérative des producteurs d'ananas de Moorea depuis onze ans, Jean Tama réclame davantage de moyens pour inciter les jeunes de Moorea à s'orienter vers cette production. "Beaucoup de gens sont partis et ils n'ont pas été remplacés (...). Il faut savoir qu'à l'usine, le prix est 509 xpf alors qu'il est à 250 sur le marché" souligne-t-il.
La baisse de production et du nombre de cultivateurs soulève des inquiétudes quant à l'avenir de cette filière emblématique. L'ananas est non seulement le symbole de l'île de Moorea, mais ce fruit contribue également à l'économie locale et à la préservation des traditions agricoles. Pour éviter que la Queen Tahiti ne disparaisse, les professionnels réclament un soutien accru des pouvoirs publics. À l'instar de la filière canne à sucre, qui a bénéficié d'une enveloppe de plus de cent millions de francs Pacifique.