Loi fiscale annulée : "c'est affligeant" déclare le sénateur Teva Rohfritsch

Teva Rohfritsch : "C'est scandaleux. Notre Polynésie doit se réveiller, s'insurger"
Teva Rohfrtisch s'est dit "affligé" par l'annulation de la loi fiscale par le Conseil d'Etat. Le sénateur autonomiste était l'invité hier soir du journal de Polynésie la 1ère. "La Polynésie doit se réveiller et s'insurger", a-t-il déclaré


Polynésie la 1ère :  Quelle est votre analyse sur l'annulation de cette loi fiscale par le Conseil d'Etat ? On vient d'entendre l'opposition, particulièrement remontée. Pour Nuihau Laurey "la majorité navigue à vue". Pour Tepuaraurii Teriitahi : "le ministre de l'Economie est dénigrant et les représentants du Tavini sont mutiques". L'ambiance était tendue ce matin à l'Assemblée.


Teva Rohfritsch : C'est affligeant. Je suis pour ma part très inquiet pour notre fenua. La bonhomie du président au début a séduit un peu tout le monde. D'ailleurs, où est-il aujourd'hui ? On a vu une vidéo où il s'inquiète à peine de ce qui se passe dans son pays. Dans notre pays, il est chargé de diriger ce pays.


Le ministre ne donne pas de chiffres. On nage dans un dans un flou total. Ce qui a été dit dans votre reportage est vrai. Non seulement la loi, donc, a été annulée. Donc, il va falloir rembourser à la fin du mois de mars 3 mois de recettes fiscales indûment perçues par ceux qui ont été impactés par cette loi fiscale.

Ça veut donc dire qu'une fois qu'on aura remboursé, on aura un trou de trois mois dans le budget du pays. Donc évidemment, il est insincère et ça veut dire qu'il va falloir rechercher un effort supplémentaire de trois mois de recettes fiscales. Donc taxer davantage les Polynésiens au travers de nouvelles lois fiscales ou d'un collectif budgétaire, parce qu'ils ont renouvelé la même loi alors qu'il y a un trou aujourd'hui béant.


Donc on a l'impression qu'il y a une petite chansonnette qui se joue encore à l'Assemblée, au sein d'une majorité qui n'a toujours pas trouvé ses marques. Ça fait presque un an qu'ils dirigent le pays.

On voit que des touristes se font rosser dans la rue, à Papeete et personne ne s'inquiète

Teva Rohfritsch

Journal du 26 mars 2024

J'avais pour ma part dit Il faut attendre ce premier budget pour voir ce que ça va donner, mais c'est affligeant, c'est inquiétant et on voit aujourd'hui la recrudescence du Pakalolo. On voit que des touristes se font rosser dans la rue, à Papeete et personne ne s'inquiète. Je n'ai entendu personne d'ailleurs du gouvernement s'insurger contre ce qui s'est passé. Et cette petite chansonnette continue. Tout est cool, ça va, tout va bien et on est à Singapour. Je suis très inquiet.


Polynésie la 1ère : Le président de l'Assemblée parle de 400 millions de francs de manque à gagner. Une goutte d'eau dans le budget selon lui. Donc, au final, il n'y a peut être pas lieu de s'inquiéter ?

Teva Rohfritsch : C'est au ministre des Finances de confirmer ce montant, et non au président de l'Assemblée de Polynésie française. Si le l'avocat du Pays a annoncé 1,7 milliards, pourquoi mentirait-il ?


Et quand bien même ce serait 400 millions, encore une fois, ça veut dire qu'il faudrait doubler. On parlerait donc de 800 millions. 400 à rembourser et 400 nouveaux à trouver. Mais si on est sur 1,7 milliard, on parle donc de 3,4 milliards de francs à trouver. C'est énorme. Et le fait même que nous n'ayons aucun chiffre confirmé à l'issue d'une commission des finances, c'est scandaleux !

Je trouve que la Polynésie doit se réveiller et s'insurger

Teva Rohfritsch

Journal du 26 mars 2024


Jamais on ne nous aurait laissé passer ça lorsque nous étions aux affaires. Je trouve que la Polynésie doit, à mon avis, se réveiller et s'insurger. Parce que c'est bien le Taui, c'est bien cette alternance, mais c'est sérieux de diriger notre Pays. Mais aujourd'hui on a l'impression que tout est minimisé. Ce n'est pas grave, c'est parce qu'ils commencent. Il faut leur laisser le temps.


Les Polynésiens doivent toujours faire face à la vie chère. On a toujours ce problème d'emplois pour nos jeunes. On a le pakalolo et la montée de la délinquance. Mais ça n'inquiète pas notre majorité. J'en appelle vraiment à la responsabilité de nos élus à l'Assemblée. Anthony Géros lui même attend la grande réforme de la sécurité sociale et la baisse de la cherté de la vie.


Polynésie la 1ère : Vous le rejoignez là dessus ?

Teva Rohfritsch : On va toujours attendre le bateau suivant. Je veux dire ils ont été élus depuis un an. Ils avaient d'ailleurs dit à un moment si ça ne vient pas du gouvernement, nous ferons nous mêmes la réforme. Je lui ai dit "chiche", faites le ! Il en est de la responsabilité du Tavini Huiraatiraa aujourd'hui que je respecte.


Je ne suis pas d'accord avec leur projet d'indépendance. Mais enfin, au delà de l'indépendance, il faut diriger notre Pays. Il faut gérer ce Pays. Où sont les projets qui ont été promis pendant la campagne électorale ? 

Polynésie la 1ère : L 'annulation de la loi a été obtenue grâce au rassemblement de l'opposition. A Here ia Porinetia et le Tapura Huiraatira ont fait bloc. Est ce que cela vous renforce dans l'idée d'une plateforme autonomiste que vous envisagiez il y a encore quelques semaines ?


Teva Rohfritsch : Bien entendu, il faut qu'on continue de se rassembler. Malheureusement, je suis attristé encore une fois par l'incapacité patente de nos gouvernants aujourd'hui à faire face aux responsabilités qu'ils ont souhaitées.

C'est ça l'indépendance ? Ça veut dire qu'il n'y a plus de règles, ça veut dire qu'on ne respecte pas ses propres règles ? Ça fait peur

Teva Rohfritsch

Journal 26 mars 2024

Si le Conseil d'État a annulé cette loi, c'est parce que la majorité ne respecte pas elle même le règlement intérieur de l'Assemblée qu'elle a voté du fait de sa majorité. C'est ça l'indépendance ? Ça veut dire qu'il n'y a plus de règles, ça veut dire qu'on ne respecte pas ses propres règles ? Ça fait peur. Donc oui, il faut continuer de nous rassembler. Effectivement. Mais aujourd'hui, pendant quatre ans, le Tavini Huiraatira dirige notre pays.

Polynésie la 1ère : Les maires redoutent les conséquences sur le fonds intercommunal de péréquation. Le ministre de l'Economie a annoncé une baisse du FIP si la loi venait à être annulée. Ils ont raison de s'inquiéter ?

Teva Rohfritsch : Absolument parce que, comme je vous le disais, non seulement il faudra intégrer la baisse des trois mois, mais doubler ce montant parce qu'il faudra la compenser. Alors il y a deux manières de le faire ou d'augmenter les taxes et donc de taxer davantage une population qui n'en peut plus de la cherté de la vie. Ou alors réduire les dépenses.

Le FIP est assis sur les dépenses réelles perçues par la Polynésie française. Ça veut dire qu'il y a moins de dépenses, il y aura moins de FIP. C'est mathématique et c'est mécanique. Donc les maires ont raison de s'inquiéter. Il y a un effet de décalage de deux ans par contre. Mais ça veut dire que le trou, il est déjà en train d'être creusé.

Polynésie la 1ère : Un mot pour terminer sur la délégation sénatoriale qui doit arriver bientôt pour parler réforme institutionnelle. Vous, vouliez-vous une reconnaissance de l'identité polynésienne ? Vous aimeriez obtenir, comme le Tavini, une citoyenneté maohi ?

Teva Rohfritsch : Alors ce sera l'occasion de parler de tout ça avec cette délégation. Je suis ravi que le président Buffet et le président de la commission des lois se déplacent lui même avec des représentants de l'ensemble des partis présents au Sénat. Avec Lana Tetuanui, nous allons les accompagner partout en Polynésie parce qu'ils vont aller jusqu'aux Marquises, à Maupiti et nous serons avec eux. C'est un moment important pour exprimer nos attentes et je crois qu'il est important que la Constitution, puisqu'on parle d'une évolution de la Constitution, puisse davantage reconnaître effectivement ce peuple polynésien qui, pour ma part, doit rester indéfectiblement lié à la République française.


Il y a eu des difficultés dans l'histoire, ça ne veut pas dire qu'on doit les ignorer, mais par contre, c'est avec la République française que nous pourrons continuer d'avancer. D'ailleurs, sur vos antennes hier soir, Tematai Legayic disait que finalement, lorsqu'il compare avec les autres outremers, je parle de la délégation de l'Assemblée nationale, ils ont trouvé que ce pays a été bien géré que l'autonomie est un beau statut.

La délégation de l'Assemblée nationale trouve que l'autonomie est un beau statut.

Teva Rohfritsch

Journal 26 mars 2024


Oui, continuons de l'utiliser, continuons de développer notre économie, de développer notre autonomie économique plutôt que d'aller scander des discours sur l'indépendance qui seront synonymes de misère pour nos populations.

Et lorsqu'on voit qu'on dit qu'on va atteindre 600 000 touristes, que c'est le moteur de notre économie et c'est ce qui sauve en ce moment notre économie et qu'on vient rosser deux touristes australiens dans les rues de Papeete sans que le gouvernement ne s'indigne ou ne montre ses émotions, particulièrement faute de communication pour éviter que ça ne se reproduise. Je pense qu'on est là dans un déni total et qu'il est important que nous puissions réagir.

En tout cas, les Polynésiens peuvent compter sur moi pour continuer de me battre pour notre Fenua.