Motu Uta et Fare Ute : plusieurs dizaines de sociétés bientôt forcées de quitter les lieux ?

Port de Papeete. (Image d'illustration)
Les sociétés installées à Motu Uta et Fare Ute louent leur emplacement au Port Autonome de Papeete. Plusieurs de ces contrats de location (appelés "conventions d'amodiation") devaient prendre fin en 2024. Quarante-cinq entreprises sont concernées, soit plus de 1 500 emplois. Interrogé, le directeur du port affirme avoir accordé une année supplémentaire à ces exploitants.

Quel avenir pour les sociétés qui occupent les terrains du Port Autonome de Papeete ? Le PAP a décidé « de ne plus proroger ces conventions » qui arrivent à expiration en 2024 et de « recourir à un appel à candidatures sans donner d’explications ni de délais aux occupants », s’inquiète le MEDEF Polynésie dans un courrier du 25 juin adressé au Pays.

Selon nos informations, 45 sociétés employant plus de 1 500 personnes sont concernées et n’ont aucune « visibilité sur leur avenir ». Des entreprises comme Pugibet, Tesa et d'autres « devaient partir en 2024 » a confirmé Jean-Paul Le Caill, le directeur du Port.

"Des amodiataires vont devoir déménager" confirme Jean-Paul Le Caill.

Le port se justifie

Le directeur du port évoque deux raisons à ces fins de contrats. La première : « une demande récurrente de la chambre territoriale des comptes (CTC). Depuis que je suis là, il y a eu deux contrôles (2018 et 2023) et à chaque fois ils ont dit qu'ils voulaient que le port révise sa politique d’attribution de ses terrains de façon à ce qu’il y ait une plus grande égalité fiscale.' Donc on va rentrer dans cette démarche » explique M. Le Caill.

Dans un rapport publié en mai 2023, la CTC recommandait en effet au PAP « d’augmenter, dès 2023, les ressources liées à la gestion domaniale par la refonte de la politique tarifaire de l’établissement », sans qu'il soit toutefois question d'exclusion à proprement parler.

La deuxième raison concerne le schéma directeur 2022-2032 « puisqu’on doit agrandir le terminal de commerce international. Des amodiataires (entreprises qui occupent temporairement les infrastructures et terrains du port autonomes, NDLR) vont devoir déménager » réaffirme le directeur. 

Des entreprises de Nouvelle-Calédonie potentiellement candidates

Certaines entreprises se plaignent de « fortes pressions ». Les acteurs économiques ont rencontré à deux reprises le ministre des Transports Jordy Chan et le président du Pays Moetai Brotherson « comme on n’arrivait pas à avoir de rendez-vous avec le directeur du port » nous précise-t-on. « Ils nous ont reçus le 7 août pour dire qu’il nous laissait un délai d’un an. Mais même un an ce n’est pas suffisant ».

Le cahier des charges de l’appel à candidatures n’est pas encore connu. Les sociétés de Fare Ute et Motu Uta pourraient le remporter mais « c’est quitte ou double parce qu’il y a plusieurs entreprises de Nouvelle-Calédonie qui veulent venir » souffle le MEDEF.

C’est quitte ou double parce qu’il y a plusieurs entreprises de Nouvelle-Calédonie qui veulent venir.

MEDEF Polynésie

Polynésie La 1ère

« Le problème c'est qu'aujourd'hui les décisions qui sont prises mettent en danger notre économie. On l'a vu sur la défiscalisation. On le voit aussi au port où des emplois sont menacés par des bailleurs du port autonome. Nous souhaiterions savoir où va le port, quels sont ses projets, (...) quelles sont les sociétés qui devront partir et qui voient leurs baux avec des échéances à court terme. On est dans l'incertitude, on a l'impression d'être complètement ignorés alors que ce sont les entreprises qui font vivre la Polynésie et que le port est là pour nous aider à réussir » regrette Steeve Hamblin président du MEDEF.

"On a l'impression d'être complètement ignorés" regrette Steeve Hamblin.

Et Jean-Paul Le Caill de répondre : « il faut que l'on voie avec eux. Ce qui a été décidé c’est que l'on allait voir les contraintes du schéma directeur et discuter avec ces amodiataires de façon à les rentrer dans ces contraintes. Au lieu de partir en 2024, leur dire de partir en 2027 par exemple. Ce qu’il faut savoir c’est que l’on renouvelle ces contrats depuis des années. Normalement, on aurait dû faire ça il y a bien longtemps. Après il y a ceux qui sont moins concernés par le schéma directeur mais il va falloir à terme, que l'on rentre dans les conseils de la CTC. Ces gens-là, je pense qu’ils peuvent avoir un délai un peu plus long ».

Déménager oui, mais où ?

Contactées, plusieurs entreprises réfléchissent déjà à des solutions de repli, conscientes de la précarité de leurs baux de location. Mais le foncier manque à Tahiti. Celles qui le peuvent pensent à construire de nouveaux hangars sur des terrains familiaux, comme la famille Pugibet. Elle craint néanmoins les lenteurs administratives s'agissant des demandes de permis de construire. En attendant, il faut être en mesure de pouvoir stocker ses marchandises...

La mairie d’Arue confirme également avoir été sollicitée par l’une de ces sociétés pour l’exploitation potentielle de terres disponibles. À noter que les terrains militaires de la commune sont toujours en cours de dépollution et donc inexploitables pour l'heure.