Onze ans de vie commune avec des coups : « à chaque fois, c'est à cause de l'alcool »

Un rameur de Rangiroa a été jugé en comparution immédiate le 9 septembre 2021 pour violences conjugales, entraînant dix jours d'incapacité temporaire de travail pour sa compagne.

16h30 : le prévenu, 27 ans, est à la barre. On l’appellera Maui. Sur un banc de la grande salle du tribunal correctionnel, la victime reste de marbre. Cette dernière est âgée de 26 ans.

Les deux intéressés sont en concubinage depuis onze ans. Onze ans de vie commune, avec des coups. Ensemble, ils ont quatre enfants.

Le prévenu découvre que sa femme entretient une relation extra-conjugale avec son cousin. Il a des doutes depuis quelques temps déjà et est devenu suspicieux, jaloux et la surveille en permanence. 
 

Des coups « pas si forts » ?


Tout bascule le 19 août 2021, lorsque, un matin vers six heures, sous l’emprise de l’alcool, Maui rentre d’une soirée et assène deux coups de poing à sa compagne, encore à moitié endormie. « C'était un coup de poing et une gifle » tente de minimiser Maui devant le tribunal.

La journée du 19 août sera rythmée de violentes disputes dans la maison familiale. Maui est hors de lui. Il veut des réponses. Est-ce que sa concubine le trompe vraiment avec son cousin, et pourquoi ? Maui sort de la chambre, fait des va-et-vient. Il réapparaît avec un bâton cette fois et l’utilise contre sa compagne, « juste pour l'effrayer », se défend Maui. Un calvaire pour la victime, appeurée, presque séquestrée. Des coups « juste pour effrayer » qui laisseront des traces sur le corps frêle de la jeune femme – deux cocards et des ecchymoses sur tout le corps.

Lorsque le président du tribunal lui demande les raisons qui l’ont poussé à une telle violence, Maui répond tout simplement : « je ne savais pas que c’était aussi fort ».

Rebelotte le 28 août. Il est deux heures du matin. Maui est alcoolisé lorsqu'il revient à la maison. Il gifle sa compagne et maintient un appui sur ses lèvres avec son poing. « A chaque fois que je sentais qu'elle me mentait, je la giflais », raconte Maui. Lorsque la victime se rend chez le médecin, ses deux lèvres sont tuméfiées et son corps, parsemé d'hématomes. 

Une fois son certificat médical en main, la jeune femme décide de déposer plainte. Dans sa déposition, elle déclare une dévalorisation constante de la part de son partenaire, mais ne peut s'empêcher de l'aimer : « je l'aime encore, mais j'ai peur de lui quand il s'énerve. » 
 

Une énième chance


Suite au dépôt de plainte, la victime retourne au domicile familial, où se trouve son conjoint. Le calme s'est réinstallé dans l'esprit des deux jeunes. Après une longue discussion, ils décident de rester ensemble. Ils veulent recommencer à zéro en banissant l'alcool de leur quotidien. « On voulait aller signer à la croix bleue. A chaque fois, c'est à cause de l'alcool », déclarent-ils. 

A l’audience, sa concubine, comme toutes les victimes de violences conjugales, était prête à lui donner une seconde chance.

Mais, au regard du caractère grave et habituel de cette violence, la procureure a requis un an de prison dont six mois avec sursis, et une mesure d'éloignement, considérant qu'il fallait « protéger madame, malgré elle. » La procureure a également souligné le traumatisme moral invisible que le couple infligeait à leurs enfants. Une peine requise auquelle l'avocate du jeune homme ne s'est pas opposée lors de sa plaidoirie. 

Le délibéré est tombé, après plusieurs minutes d'attente : le prévenu a été condamné à deux ans de prison dont 18 mois avec sursis.