Denise est une habituée. Samedi matin, elle vient acheter son cookie favori, aux éclats de caramel. Elle apprend ce matin-là que la boutique rue Cook va fermer le 20 avril. La gérante veut se consacrer au développement de la filière cacao en Polynésie. Il lui reste encore quelques pièces de Pâques en majorité faites de cacao du Vanuatu et d'autres friandises et pâtisseries vendues quotidiennement. Seuls 10% de ses produits viennent des cabosses polynésiennes, cueillies ça et là dans les jardins des particuliers à Tahiti, Moorea, Raiatea, Tahaa et même aux Marquises. Depuis son ouverture en 2020, Morgane Richard n’arrive à produire qu’une seule variété de tablette et quelques confiseries à base de cacao local.
Il n’y en a pas assez. C’est pour cela qu’il faut que l’on se concentre sur le développement de la filière, la mise en place de formations, d’accompagnement pour les personnes qui souhaitent planter le cacao et que l’on puisse, d’ici deux à trois ans, fournir toutes les demandes actuelles qu’on ne peut pas honorer. On est en discussion avec le ministre de l’Agriculture à Tahiti à ce sujet...
Morgane Richard– gérante de la Chocolaterie by M
De leur côté, Laurent et Sarah Bourgeon, à l'origine de Couleur Cacao, parviennent aujourd’hui à proposer quinze variétés de tablettes de chocolat à base de cacao local (aromatisées à la papaye, mangue etc.). Sur le marché depuis 2009 à Taravao puis Arue, les gérants ont compris, il y a quelques années, qu’ils avaient tout intérêt à lancer leur propre plantation de cacaoyers s’ils voulaient pérenniser leur gamme au chocolat local.
On a démarré une plantation il y a trois ans sur la presqu’île avec 3 à 4 000 arbres. Quelques-uns ont commencé à produire mais il faudra attendre au moins jusqu’en 2025 pour que ça soit vraiment productif.
Artisan-chocolatier et gérant de Couleur Cacao
En effet, ces arbres ne fleurissent qu’au bout de trois ans dans un environnement plutôt chaud et ombragé. Le plein rendement n’est donc pas pour tout de suite. D'autant que cent kilos de cabosses ne contiennent que dix kilos de fèves. Actuellement, les gérants de Couleur Cacao récoltent 8 000 kg de cabosses chaque année, mais ne peuvent en exploiter que 10 à 15%. Ils fabriquent ainsi 800 kg de chocolat local. Pas assez néanmoins, pour proposer des pièces de Pâques ; ce sera donc encore du chocolat importé cette année pour la collection 2024 sur le thème…des jeux olympiques.
À quand une filière cacao structurée au fenua ? Car la qualité est souvent vantée par les fins connaisseurs, qui le décrivent comme un cacao “de caractère”. En tous cas, son absence n’a pas fait fléchir les ventes. Comme chaque année, Pâques est la fête la plus rentable avec Noël et représente 15 à 20% du chiffre d’affaires annuel des chocolatiers.
Sinon, joyeuses Pâques !