Rāhui : le rori et l'aquaculture, des alternatives pour les pêcheurs en période d'interdiction

Clément Vergnhes, président de la Fédération des comités des Rahui.
Clément Vergnhes était l'invité café de la rédaction ce jeudi. Alors qu'il est question de préservation des océans avec l'événement Tiaki Moana depuis le début de la semaine, la conférence Te Reo o te Moana doit se tenir à la présidence ce vendredi. Dans ce cadre, le président de la Fédération des comités des rāhui est venu parler de cette pratique ancestrale, et des projets alternatifs envisagés pour les pêcheurs.

Comment préserver les ressources marines ? En Polynésie, elles font vivre de nombreuses familles. Le rāhui est une pratique ancestrale, qui consiste à interdire la pêche dans une zone définie pendant un temps pour permettre à la faune de se régénérer. Mais cette règle n'arrange pas certains pêcheurs...

Des alternatives à la pêche, de jour comme de nuit 

La fédération des comités des rāhui, créée en octobre 2023, "Te marae mo'a" travaille donc sur des solutions depuis plusieurs années pour proposer des alternatives aux pêcheurs pendant les périodes d'interdiction de pêche, grâce à l'élevage de rori par exemple, le développement touristique dans le domaine de la pêche ou encore l'aquaculture. "Ça fait deux que le comité de Teva I Uta planche dessus. On a suivi une procédure de formation des pêcheurs. On va passer l'agrément aquaculteur. On a bien avancé sur le sujet. C'est quelque chose qui est pilote sur la commune. On imagine demain, si ça marche, le dupliquer sur d'autres comités, pour trouver des alternatives aux pêcheurs" explique Clément Vergnhes. Des alternatives qui permettraient même "de dire qu'on ne va plus pêcher la nuit sur toutes les zones -pas seulement les rāhui parce qu'on aura trouvé des revenus pour ces pêcheurs-là" avance le président de la fédération. 

Quid du respect des rāhui ?

Ces alternatives permettraient aussi de limiter les infractions. Clément Vergnhes estime "à 15% de gens qui ne respectent pas le rāhui. On alerte le gouvernement de nous donner des moyens de surveillance. Si on n'est pas aidés à appliquer cette surveillance, au bout d'un moment, les 85% vont hésiter à mettre en place ce rāhui. Après, il ne suffit pas d'avoir les moyens... Une fois que tu as surveillé, tu as pris en flagrant délit un pêcheur qui a fraudé, derrière ça ne suit pas... Les gens restent impunis. C'est tout ça qu'on veut mettre en place, pour que demain ces procédures soient facilitées. Au bout d'un moment il faut que le Pays et l'Etat fassent appliquer des sanctions".

Manque de moyens 

Selon le président de la fédération, les comités sont prêts à participer à la surveillance mais ils manquent de moyens, non seulement financiers mais aussi humains. La fondation Pew Bertarelli, coorganisateur de Tiaki Moana 2025, lui a versé cinq millions xpf. C'est toujours ça de pris, mais "ce n'est jamais suffisant (...). On est éclatés sur Tahiti. Tous les comités ont besoin de fonds. On envisage d'acheter un drone pour faire de la surveillance. Donc un drone équipé, plus la formation d'un membre du comité dans tous les comités, on parle de 4,5 millions xpf. En termes de budget ce n'est jamais assez. En termes de moyens humains aussi. On a discuté avec le Pays de la possibilité de mettre des gardes nature, il y a des contrats aidés qu'il faudrait peut-être modifier pour qu'on puisse avoir des moyens humains et faire de la sensibilisation d'abord grâce à des dispositifs que le Pays active actuellement" détaille Clément Vergnhes. 

Tous ces sujets sont au cœur des discussions depuis le début de la semaine. Ce vendredi à la présidence, la fédération aura de nouveau l'occasion de faire entendre sa voix lors de la conférence Te Reo o te Moana. Des représentants de plusieurs pays du Pacifique et du triangle polynésien seront présents.

Clément Vergnhes était interrogé par Melissa Chongue :