Amélia y a vécu les premières années de sa vie, Johnny Frisbie, fille de l’écrivain Robert Dean Frisbie, y a grandi et la réalisatrice tente elle-même de comprendre ce que représente cet endroit perdu au milieu du Pacifique.
« Amelia m’a quittée pour une île. Je ne savais pas que Pukapuka existait. Je n’imaginais pas que cet atoll au milieu du pacifique allait changer ma vie. »
Ce sont les premiers mots de ce documentaire, The Island in me, réalisé et coproduit par Gemma Cubero Del Barrio, qui y raconte un moment très personnel et intime de sa vie.
Pukapuka, un atoll des îles Cook, situé au nord-ouest de Rarotonga, est resté profondément ancré dans les souvenirs d’Amélia, la femme qui partage la vie de Gemma.
Mais elle ne sait plus très bien si ces premières années, avant ses 5 ans, étaient un rêve ou si cette île existe vraiment… Jusqu’à ce qu’elle retrouve un vieux livre : Mlle Ulysse from Pukapuka, de Johnny Frisbie.
Cette fois, c’est Amélia qu’on entend : « Après avoir lu ce livre, je devais y retourner. C’est le lieu de mon enfance. Ce n’était pas une décision, ni un choix, c’était un appel. »
En apprenant que Johnny Frisbie était toujours en vie, la réalisatrice la contacte et lui propose de retourner à Pukapuka.
Une sorte de pèlerinage va alors s’organiser : Amélia qui veut revoir les lieux de son enfance et avoir la certitude que tout cela a bien existé ; Johnny Frisbie qui veut retrouver les traces de son adolescence et revoir l’ancien temps ; et Gemma qui veut comprendre et faire connaissance avec ce lieux si mystérieux qui a laissé une empreinte si forte sur ces deux femmes.
« Tous les films que j’ai faits sont personnels mais celui-ci est le plus intime.Ma motivation était de raconter l’histoire d’Amélia et de Johnny. Je suis originaire d’Espagne et je n’ai jamais pensé qu’un jour, je ferai un film sur Pukapuka », a confié la réalisatrice lors de l’Inside the doc de ce mercredi après-midi.
« Quand je me suis rendue à Pukapuka, je me suis rendue compte que cette île était aussi un personnage du film. J’ai vraiment été transformée par cette île. »
Dans le documentaire, on voit les images anciennes : les photos d’Amélia bébé avec ses parents sur l’île, des sons où la mère d’Amélia assure qu’ils n’ont besoin de rien, qu’Amélia n’a besoin de rien. Les souvenirs d’Amélia reviennent : « Pukapuka est très viscéral », elle écoute le son des vagues cassant sur le récif. « La vie quotidienne était très intense. Je me souviens de cette liberté, j’allais où je voulais. »
Des extraits de films montrent Johnny Frisbie, grande danseuse, qui était souvent sur la scène à Hawaii, avec ses sœurs.
Puis les femmes arrivent sur Pukapuka : les retrouvailles sont fortes, intenses, on se souvient d’elles, on leur fait la fête. Johnny retrouve son frère. « C’est bon d’être revenue, j’ai l’impression que je vais exploser », explique Johnny Frisbie. Les images affluent : les parents qui s’absentent, le frère de Johnny qui est adopté par une tante et ne grandira jamais avec le reste de la fratrie, la perte d’un bébé qui précipite le départ des parents d’Amélia, une éducation moins stricte plus libre et puis le choc culturel de l’arrivée à Hawaii…Pukapuka laisse une empreinte indélébile d’un temps lointain, comme une parenthèse dans le monde actuel.
Une habitante de l’île fait visiter sa maison à Amélia : des toilettes, une douche, « loué soit le seigneur ! », rigole l’hôtesse.
La vie n’est décidément pas la même à Pukapuka où les plus simples commodités apportent un grand bonheur. Où tous se réunissent pour fêter l’arrivée des trois femmes.
Ils chantent, ils rient, ils tapent des mains. La journée, le temps s’écoule lentement.
Quand il faut de nouveau partir, c’est le cœur gros que les protagonistes et la réalisatrice montent dans le bateau : « Je suis contente d’être venue. Je me demande pourquoi je suis partie », dira Johnny Frisbie. « Je peux aller ailleurs, j’aurai toujours Pukapuka profondément en moi », assure Amélia. Quant à la réalisatrice, elle-même a désormais une empreinte profonde laissée par Pukapuka dans le cœur.