Violence des jeunes : les raisons du phénomène

Les bagarres en groupes sont de plus en plus violentes. Sans code d’honneur, sans règle, selon les entraîneurs de sports de combat. Pour expliquer cette montée de la violence : le désœuvrement et l’absence d’activité sportive. Sur le terrain, les acteurs en appellent d’urgence aux pouvoirs publics.

Ne lui parlez pas de manque de repère, lui qui a connu les familles d’accueil, la maltraitance et les bagarres de rue, avant de remonter la pente et de se lancer dans le sport, prouvant qu’avec de la volonté et un petit coup de pouce, tout devient possible. Aujourd’hui combattant de MMA reconnu, Henri Burns en appelle aux pouvoirs publics face à la montée des bagarres violentes, afin d’encadrer ces jeunes désœuvrés.

Henri Burns.

 

« C’est une responsabilité collective. De ces jeunes d’abord, ils sont maîtres de leur destin. Mais aussi des parents, de ceux qui les entourent, du quartier…Quand il n'y a pas de cadre, personne qui s’occupe de ces jeunes, ils sont livrés à eux-mêmes et ils se battent dans la rue, ils font du mal…Ils essaient de chercher une reconnaissance. »

Appel aux pouvoirs publics

 

Henri Burns prend déjà sous son aile des jeunes de quartier, en proie à la violence ou aux problèmes de drogue, mais aujourd’hui, il tire la sonnette d’alarme et lance un appel aux pouvoirs publics : « Si on continue à ne rien faire, dans quelques années, ça va être pire. Il y aura des morts presque toutes les semaines, tous les mois", avertit-il. "Ce n’est pas ce que l’on veut. Message au gouvernement, au président, aux ministres…J’espère que vous allez entendre ce message. Je viens de là et je sais que c’est dur. Mais si on a de l’aide autour, on peut s’en sortir. » Henri Burns dit avoir beaucoup de projets à proposer, « mais l’argent, c’est le nerf de la guerre. »

La semaine dernière, un jeune homme de Taiarapu est mort sous les coups. Des bagarres gratuites à Moorea ont fait plusieurs blessés, le week-end dernier. Nesly Grand-Pittman, entraîneur de boxe au Moorea Boxing Club, dénonce une montée de la violence gratuite, sans réponse répressive.

Nesly Grand-Pittman.

 

« Ces jeunes ne font rien de leurs journées, on les voit au bord de la route…Les muto’i ne peuvent rien faire ! S’ils les arrêtent, après les tavana les engueulent", assure-t-il. "Donc, on relâche celui qui fout le bordel, pour les élections ! » Il rappelle qu’un adolescent de 13 ans est décédé sous les coups en 2016 à Moorea et en appelle au maire de Moorea, Evans Haumani, premier magistrat de la commune. « Ce sont les jeunes de sa commune qui font ça [Papetoai ndlr] ! On va les laisser faire comme ça ?! C’est pas possible. Il attend quoi ? »

Lutter contre le manque d’avenir

 

A Moorea, l’éco-musée Fare Natura de Papetoai, lui, fait le choix de la formation. A partir de mi-juillet, il accueillera une petite trentaine de jeunes des quartiers alentours, devenant ainsi également centre d’insertion pour former les futurs guides de la vallée. « Ces jeunes ont besoin d’aide", explique Olivier Poté, directeur de l’éco-musée. "Ils ont besoin de nous, qu’on leur redonne une chance, une visibilité sur leur avenir. Quand on n’a pas d’avenir ou qu’on a du mal à percevoir son avenir, on a du mal à construire. Et quand on ne construit pas, on détruit. »

Olivier Poté.

 

L’idée était de ne plus faire appel à des guides formés venus de Tahiti, mais de former les jeunes sur place, leur redonnant de la valeur. « Pour aller au lycée quand on habite à Papetoai, il faut se lever à 3 heures du matin et on rentre à 20 heures le soir chez soi", rappelle Olivier Poté." Il n’y a pas grand monde qui arriverait à suivre ce rythme-là dans de bonnes conditions. Donc, ne jetons pas la pierre et réfléchissons aux bonnes réponses à apporter. C’est avant tout cette perte de sens, cette perte de repères, ce besoin de se projeter dans l’avenir. »

Regardez le reportage de Lucile Guichet et Marcel Bonno :