Un professeur condamné pour avoir pété et craché dans la bouche de ses élèves

Au tribunal correctionnel comparaissait ce matin, Massimo Raveino, un ancien enseignant de l’école Vaiaha, à Faa’a. Il a été jugé pour sévices physiques et psychologiques sur ses élèves de CM1 et condamné à 4 ans de prison dont 2 avec sursis. 
La justice a condamné ce 8 septembre, Massimo Raveino, ancien instituteur, pour avoir été l'auteur de sévices physiques et psychologiques sur ses élèves de CM1, en l’occurrence, leur cracher dans la bouche, les mettre à genoux dans la classe, les inciter à se battre entre eux ou encore les affubler de surnoms humiliants. « Après il nous donnait des 100F pour ne pas qu’on raconte ce qui se passait en classe » raconte une ancienne élève. 
L'homme est également responsable du département technique d'arbitrage à la Fédération Tahitienne de Football.

Il a aussi été condamné pour escroquerie, pour avoir revendu le matériel scolaire et des affaires de football aux parents d’élèves pour son propre compte, fournitures normalement gratuites dans les écoles publiques, prises en charge par la mairie et la coopérative (dont il était le trésorier).
A ses côtés, Félix Yau, le directeur de l’école Vaiaha, comparaît pour non-dénonciation des maltraitances aux autorités judiciaires et administratives.
Pour le professeur, il s’agit d’une « vengeance » des parents d’élèves et « d’un coup monté » du directeur qui, selon lui, mettait les élèves les plus difficiles dans sa classe.
 

 

"Une omerta pédagogique"


Dans son rapport, l’expert psychologue écrit que le mis en cause est dans « le déni des faits, la banalisation de la violence et un manque d’empathie. »
Plusieurs signalements du personnel d’entretien sont faits au directeur pour dénoncer les agissements du professeur. Mais ce dernier les avait menacés « tu dis à tes mamas d’arrêter de se mêler du travail des enseignants. J’ai fait la guerre. Je vais venir avec un couteau et les découper. » Pourtant, des parents d’élèves avaient également signalé les faits au directeur de l’école, sans succès.

Le premier signalement remonte en fait à 1993, après qu'un enfant bénéficie de 6 jours d'ITT pour des ecchymoses, puis un autre en 2003. Massimo Raveino reçoit alors deux avertissements de l'administration pour "faute grave et deni." Il est muté. Lorsqu'il arrive à l'école Vaiaha en 2013, le directeur a droit à "un drôle de casting" selon son avocat, Me Loris Peytavit : Massimo Raveino ou un autre enseignant condamné pour des faits de violences. Il appuiera la candidature de Massimo Raveino. Sa consoeure de To'ata lui dira juste "c'est pas un cadeau".
"C'était des enfants difficiles avec des parents d'élèves difficiles," tentent d'expliquer les deux hommes, l'instituteur et le directeur. "Une omerta pédagogique," dira le procureur dans ses réquisitions.
Le post Facebook d'une ancienne élève aujourd'hui âgée de 30 ans et toujours traumatisée, déclenchera des centaines de témoignages sur la toile.

C'est finalement le signalement d'un nouveau parent d'élève, après 2 jours d'ITT pour son enfant en décembre 2019 qui déclenchera "enfin un tsunami". "C'est l'administration qui a été défaillante pendant 30 ans," a plaidé Me Loris Peytavit, l'avocat du directeur de l'école Vaiaha. "Monsieur Raveino n'aura rien jusqu'en 2019 où il partira à la retraite, sans jamais avoir été révoqué de la fonction publique."

Un signalement avait également été fait à la Fédération Tahitienne de Football en 2020 après qu'il ait étranglé un jeune en formation.
 

Pour échapper à son procès, il prétexte la covid-19


Ce matin, l'ex-instituteur était absent à l’ouverture du procès, assurant être positif à la COVID-19 et donc en confinement strict. Après vérification du tribunal auprès de l’Institut Louis Malardé, il s’avère que l’homme est négatif. Un mandat d'amener est délivré, mais les gendarmes ne le trouvent pas à son domicile. Finalement retrouvé en ville, il se présente à l’audience avec 2h de retard. Son avocat demande un renvoi. Après en avoir délibéré, la cour refuse le renvoi estimant que la défense a eu suffisamment de temps pour prendre connaissance du dossier, depuis son défèrement le 9 juillet dernier. Son avocat quitte alors le procès qui se poursuit sans avocat pour la défense.

Le professeur écope de 4 ans de prison dont 2 avec sursis et mandat de dépôt, interdiction définitive d’exercer une activité impliquant un contact avec des mineurs.
Le directeur Félix Yau est condamné à 4 mois de prison avec sursis.
En outre, l’Etat a été condamné à verser 300.000 Fcp de dommages et intérêts à chacun des 21 enfants parties civiles.

Avant que la cour ne se retire pour délibérer, l'ex-enseignant a exprimé ses regrets à la barre : « à mes élèves, leurs parents, à l’administration et à l’équipe de l’école. »
De son côté, le directeur, aux états de service irréprochables et visiblement très ému, a tenu à s'adresser en tahitien aux parents d'élèves présents dans la salle : "ça fait un an que je ne dors plus. Je continuerais toujours de protéger les enfants."