La vague Delta déferle sur la Nouvelle-Calédonie depuis une semaine. Dès l’apparition de 3 cas locaux positifs au Covid-19 le 6 septembre, le gouvernement a pris un arrêté pour lutter contre la propagation du virus.
Malgré ces mesures de confinement strict, les expatriés Calédoniens à Tahiti ne peuvent s’empêcher de s’inquiéter pour leur famille restée sur le Caillou. C’est le cas d’Anthony Pheu. Il a quitté la Nouvelle-Calédonie à 18 ans pour aller étudier en France, où il a rencontré une polynésienne. Leurs diplômes en poche, le couple trouve du travail à Tahiti et c’est ainsi qu’Anthony débarque en 1999. Notamment directeur du ministère de la jeunesse et des sports de 2016 à 2020, il prend le poste de directeur général des services de la commune de Mahina en mars 2021. A travers son métier, il a constaté les ravages du variant Delta, alors forcément il a une pensée particulière pour ses compatriotes.
Le problème c’est qu’eux ne l’ont pas vécus. Nous on l’a vécus. Nous on voit des gens qu’on connait mourir. On les voit arriver à l’hôpital. Et on a l’impression qu’ils [sa famille calédonienne NDLR] ne se rendent pas compte en fait. Donc ça nous fait peur.
Depuis la mise en place des restrictions d’accès au territoire calédonien en mars 2020, Anthony ne peut plus rendre visite à sa famille, notamment à sa mère et à son frère, comme il avait l’habitude de le faire tous les ans. L’angoisse le gagne depuis une semaine étant donné la situation sanitaire alarmante.
Dans mon métier je vois tous les jours des gens perdre des proches et ne pas pouvoir se recueillir avant de les enterrer. Parce que les mesures font que c’est extrêmement rapide. Alors moi je me dis que s’il arrive quelque chose à un des miens et de pas pouvoir prendre l’avion pour aller voir un peu sur place… c’est terrible en fait. C’est terrible. On a vraiment peur de ça. C’est des choses auxquelles on essaye de ne pas penser.
C’est le frère d’Anthony qui s’occupe de leur mère âgée de 85 ans. Il l’a contacte régulièrement par téléphone pour prendre de ses nouvelles en ces temps de crise. Il lui rappelle que c’est une personne à risque face au Covid-19, étant donné son âge. C’est une adepte de la naturopathie. Alors Anthony est pédagogue lorsqu’il lui parle du vaccin, en lui donnant des chiffres et en lui partageant le fruit de ses recherches sur le rapport bénéfice/risque. Il lui répète que la solution existe pour se protéger du virus et il l’encourage à l’utiliser.
Le problème c’est qu’en Calédonie ils ne le vivent pas encore une fois. Et le fait que les soignants vivent les choses. J’ai des copains médecins et des copains urgentistes qui sont débordés là en ce moment au CHPF. Et qui me disent, mais c’est la catastrophe il faut vraiment que les gens comprennent que … qu’ils vont droit dans le mur.
Didier WAMYTAN est kanak. Il s’est expatrié en 1982 pour être footballeur dans l’AS Phénix. Sa mère, ses 13 frères et sœurs sont restés sur le Caillou. Sauf un de ses grand-frère qui l’a suivi à Tahiti. Aujourd’hui il est en proie à la triste réalité du Covid et à la dangereuse contagiosité du variant Delta.
Il y a une semaine, j’ai perdu mon grand frère. Comme il n’a pas fait le vaccin, et comme il a le diabète. Le moment où il a attrapé le virus, ça a aggravé les choses. Voilà il est parti.
Les dernières retrouvailles entre sa mère et son défunt grand frère remontent à 30 ans. A cause de cela, l’annonce du décès à sa mère a été difficile. Car malgré la distance, Didier garde contact avec ses proches. Ils s’appellent au moins une fois par semaine. Quand il les as au téléphone, il leur dit :
«Faut aller faire le vaccin pour se protéger. Faut pas attendre après. On fait pas le vaccin, tout va s’aggraver après. »
A la date du 7 septembre 2021, seule 27% de la population calédonienne possédait un schéma vaccinal complet. Didier et Anthony, Calédoniens expatriés à Tahiti, espèrent que leurs familles se protègeront rapidement.
Concernant les Polynésiens expatriés en Calédonie, ils sont plus de 6000. Paita Metua est une des leurs et elle est membre de l’association des Polynésiens. Comment vivent-ils la situation sanitaire ? Elle répond aux questions de Shiquita Teiva-Darrouzes dans le journal du dimanche 12 septembre 2021.