40 cas de leptospirose déclarés depuis le début de l'année à La Réunion, les agriculteurs sensibilisés

Les agriculteurs en première ligne face au risque de leptospirose
Cette saison des pluies, les cas de leptospirose sont en nette augmentation par rapport à l'an dernier. D'où l'importance de lutter contre la prolifération des rats, vecteurs de la maladie. La Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles (FDGDON) sensibilise notamment les agriculteurs, en première ligne face au risque.

La plus grande vigilance est de mise face à la leptospirose ces dernières semaines. Certes, la saison des pluies est favorable à l'épidémie, mais le nombre de cas enregistrés reste plus élevé que les années précédentes, selon les chiffres de Santé Publique France : 40 cas depuis le début de 2024, contre 16 à la même période en 2023. 

Aussi, entre le 1er janvier et le 13 février 2024, 21 hospitalisations de plus de 24 heures et 13 passages en réanimation ont été relevés, pour leptospirose. 

Le reportage de Réunion La 1ère : 

Les dangers de la leptospirose, Aniel connaît : l'agriculteur a contracté la maladie il y a quelques années.

Les agriculteurs et éleveurs exposés au risque

Certains publics sont davantage exposés que d'autres au risque de leptospirose. A savoir les agriculteurs et éleveurs, en contact avec la terre ou l'eau potentiellement souillées lors de leurs activités quotidiennes. Car la leptospirose se transmet par contact avec des bactéries de type Leptospira, qui peuvent se trouver dans l'eau, la terre, ou des aliments contaminés par l'urine d'un rat lui-même infecté.

Aniel, agriculteur contaminé il y a 8 ans, témoigne

Aniel Orus, lui, a été contaminé par la leptospirose en avril 2016. Alors que cet agriculteur se trouvait sur son champ, il est subitement contraint de se rendre aux urgences. "Ma la vu un ta de moun en blanc devant moin. Mi té fini commence ni jaune. Bana la di a moin ma la attrape la leptospirose. Ce jour-là, i prétan bana la met' au moins 15 piqûres dessus moin. Kan ma la réveillé au bout d'un semaine après, ma la vu un ta zaffer branché su moin", témoigne-t-il.

Le témoignage d'Aniel Orus sur Réunion La 1ère : 

ITV agriculteur leptospirose

La FDGDON sur le terrain 

"C'est inquiétant, mais on savait qu'avec les ravines qui ont été nettoyées lors du mauvais temps, les rats allaient systématiquement remonter à l'intérieur des terres", témoigne Thierry Hoarau de la Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles (FDGDON) de La Réunion. 

Cet organisme, depuis la fin des fortes pluies du mois de janvier, s'est rendu sur le terrain pour accompagner les agriculteurs.

"On a mené une action dès la fin du mauvais temps. La FDGDON est présente sur le territoire pour aider dans cette lutte collective et donner aux agriculteurs des armes pour lutter contre les rats"

Thierry Hoarau, président de la Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles (FDGDON)

Se protéger en portant des équipements étanches 

Au-delà de la distribution de raticide aux agriculteurs, la FDGDON leur prodiguait aussi plusieurs conseils pour éviter les contaminations à la leptospirose. "Il faut se protéger en portant des bottes, des gants, tout ce qui est étanche. Ce n'est pas facile de travailler avec, mais c'est pour notre santé et les agriculteurs en sont conscients", achève Thierry Hoarau.  

Campagne de lutte collective

Invité sur le plateau de Réunion La 1ère ce lundi, le président de la FDGDON rappelle que des campagnes de lutte collective sont sur le point d'être lancées sur le département en mars (dès le 28 février à Saint-Pierre) et que les agriculteurs comme les particuliers peuvent s'adresser au groupement de défense contre les organismes nuisibles le plus près de chez eux. 

Ecoutez les précisions de Thierry Hoarau, président du FDGDON : 

Invité plateau Thierry Hoarau de la FDGDON

Les particuliers aussi concernés 

"C'est un combat permanent, de tous temps, il faut être toujours à l'affût et toujours se protéger, agriculteurs comme particuliers", insiste Bruno Lauret, lui-même agriculteur et vice-président du GDON de Saint-Paul. 

Il attire notamment l'attention sur les précautions à prendre par les particuliers, même si l'action du jour est ciblée vers les agriculteurs. "Tout le monde est concerné", avertit-il. 

"Il faut laver tous les légumes, tout ce qu'on trouve dans les champs, avant de les consommer. Les gens qui vont en randonnée ou sur le sites de pique-nique doivent faire très attention aussi, parce que dans les sentiers il pourrait y avoir des rats qui trainent" 

Bruno Lauret, agriculteur et vice-président du GDON de Saint-Paul

Davantage d'hommes contaminés, le Sud plus touché 

Selon les informations de Santé Publique France, c'est une majorité d'hommes qui a contracté la leptospirose depuis le début de l'année, avec un âge moyen de 58 ans. Les cas se déclarent sur toute l'île, mais plus de 7 sur 10 résident dans le Sud de l'île, en faisant la région la plus touchée. 

Jardinage, maraîchage, élevage... : activités à risque

S'il n'y a aucun moyen de savoir pour sûr où ces personnes ont été contaminées, des activités à risque sont évoquées comme principales hypothèses : jardinage, maraîchage, taille des arbres, coupe de brèdes ou d'ananas, élevage familial... Dans six des cas, ce sont des agriculteurs, maraîchers, ou agents d'entretien des routes qui ont attrapé la leptospirose dans l'exercice de leur activité professionnelle. 

Transmis par contact avec un milieu humide contaminé 

Pour rappel, la leptospirose se contracte par contact avec un milieu humide contaminé par les urines des rats. Il peut s'agir d'eaux stagnantes, de boue... Les fortes pluies favorisent le lessivage des sols et la survie des bactéries leptospires dans le sol. Ainsi, après de fortes pluies comme celles observées ces dernières semaines, les activités de jardinage à domicile ou de loisirs en eau douce sont particulièrement à risque.

Prise en charge et diagnostic précoces

Le diagnostic et la prise en charge précoces sont essentiels pour éviter une évolution vers une forme sévère et donc une mortalité plus importante. Il est donc important de consulter son médecin dès l’apparition de symptômes (fièvre, grande fatigue, douleurs musculaires/articulaires…) et indiquer si une activité à risque a été pratiquée. 

A noter que depuis août 2023, il est obligatoire de se déclarer en cas d'infection à la leptospirose. 

Comment se protéger de la leptospirose ?


• Appliquer des mesures de protection individuelle :

  •  Porter des équipements de protections adaptés (gants, bottes ou chaussures fermées,lunettes…) pour jardiner, ramasser des déchets, déplacer des encombrants ou réaliser l’élevage « la
    kour »
  • Ne pas marcher pieds nus, ou en savates, pour les activités en environnement humide ou boueux au domicile ou en extérieur (sol boueux, dans les flaques, eaux stagnantes, ravines)
  • Protéger ses plaies du contact avec l’eau (pansements étanches), les laver à l’eau potable et les
    désinfecter le plus tôt possible après l’exposition
  • Pour les agriculteurs et les éleveurs, une vigilance sur le port des équipements de protection
    individuelle est requise. Un lavage régulier des mains est recommandé.


• Lutter contre les rats :

  • Bien fermer ses poubelles
  • Entretenir régulièrement sa cour (absence d’encombrants ou de déchets propices à la prolifération
    des rats…)
  • Ramasser et éliminer ses déchets régulièrement dans les filières adaptées pour éviter d’attirer les rats
  • Éliminer toutes les sources d’alimentation pour les rongeurs, y compris les restes d’alimentation des animaux de compagnie
  • En cas d’élevage de volaille à domicile, s’assurer que les aliments destinés à ces animaux ne sont pas accessibles aux rongeurs (aliments conditionnés dans des bidons étanches, restes d’alimentsenlevés, clôture à maille fine pour prévenir toute intrusion dans le poulailler).


• Respecter les interdictions de baignade dans les lieux signalés à risque.

En cas d’eau trouble, il est recommandé de reporter les activités de loisirs en eau douce. Ces mesures de prévention doivent être appliquées tout particulièrement après des périodes de fortes pluies car le risque de contact avec des milieux humides contaminés est alors plus important.


• Se faire vacciner

Un vaccin contre la leptospirose existe. Il est réservé à certaines catégories professionnelles à risque ou les personnes pratiquant régulièrement des activités récréatives à risque, après une évaluation par un médecin. Cette vaccination vient en complément des mesures de prévention.