Au terme de sa première visite à La Réunion, le ministre délégué aux outre-mer Philippe Vigier se penche sur le problème de la vie chère

Philippe Vigier, ministre délégué aux Outre-mer
S'il y a un sujet sur lequel les Réunionnais l'attendaient au tournant, c'était celui de la vie chère. Philippe Vigier, le ministre délégué aux outre-mer, a assisté ce vendredi 1er septembre 2023, à la mise en place d'un groupe de travail sur la transparence des prix à La Réunion.

Comprendre comment les prix sont construits pour pouvoir les faire baisser : voilà l'objectif affiché par le ministre délégué aux outre-mer qui, ce vendredi après-midi, a procédé à l'installation d'un groupe de travail autour de la transparence des prix à La Réunion. Il sera piloté par le préfet de La Réunion, Jérôme Filippini.

Regarder le reportage de Réunion La 1ère : 

Un groupe de travail sur la transparence des prix installé par le ministre ce vendredi. L'objectif ? Mieux comprendre la formation des prix pour agir sur la vie chère. ©Réunion la 1ère

Autour de lui à la préfecture de Saint-Denis, Philippe Vigier avait réuni les acteurs de l'industrie alimentaire et de la distribution, dans un " état d'esprit constructif", dit-il. Il les a appelés à la responsabilité dans cet objectif de faire baisser les prix pour les consommateurs réunionnais. 

Une initiative inédite 

" Une telle initiative est la première sur le territoire hexagonal et ultramarin", soutient Philippe Vigier, assurant qu'il viendra " personnellement vérifier que tout cela est suivi d'effet". Selon le ministre délégué aux outre-mer, " tous autour de la table" ont " reconnu qu'il y avait un sujet" autour de la vie chère sur le département. 

"Chacun doit s'approprier la façon dont les choses sont faites, ensuite chacun prendra sa part de responsabilité, que ce soit les industriels, les distributeurs, l'Etat, et ensemble on bâtira la meilleure trajectoire pour redonner du pouvoir d'achat."

Philippe Vigier, ministre délégué aux outre-mer

Une année pour réfléchir à la réforme de l'octroi de mer 

La question inévitable qui a été abordée par ce groupe de travail sur la transparence des prix, dès son installation : celle de l'octroi de mer.

Il n'en fallait pas plus pour que le ministre brandisse la mesure numéro 1 du Conseil interministériel des outre-mer (Ciom), qui vise à réformer cette fameuse taxe dans les prochaines années. " On a une année pour faire atterrir cette réforme, après ça passera par la loi de finances, et enfin elle sera appliquée en 2027", martèle-t-il pour répondre à l'impatience palpable. 

Une mission gouvernementale sur les monopoles

" Il faut aller vite, il faut aller fort. Mais il faut séparer la réforme de l'octroi de mer des mesures plus immédiates", fait-il comprendre.

Autrement dit, l'Etat n'attendra pas que l'octroi de mer soit réformé pour se pencher sur la lutte contre les monopoles. C'est dans cette optique qu'une mission gouvernementale sera lancée par le ministre de l'Economie Bruno Lemaire. Ce dernier devrait bientôt recevoir industriels et distributeurs, selon Philippe Vigier. 

L'OPMR attend des actes

Entre les acteurs de l'industrie et de la grande distribution se trouve aussi l'OMPR (Observatoire des prix, des marges et des revenus), au sein de ce groupe de travail sur la transparence. Son vice-président, Jocelyn Cavillot, retient de cette installation en présence du ministre que " beaucoup d'engagements ont été pris de la part des uns et des autres, du ministre et des acteurs économiques pour tenter de réduire l'écart de prix entre l'Hexagone et La Réunion".

Mais ce qui compte, ce sont encore les actes, poursuit Jocelyn Cavillot.

Les acteurs de la grande distribution ont répondu présent à ce groupe de travail sur la transparence des prix

"On est prêts à un exercice de transparence"

Dans les prochaines semaines, le groupe de travail s'appuiera notamment sur les éléments apportés par la grande distribution pour disséquer la formation des prix. Pascal Thiaw-Kine, le dirigeant de l'enseigne E.Leclerc à La Réunion, se dit en tout cas prêt à fournir les informations qu'il faudra. 

"On est prêts à entrer dans un exercice de transparence à tous les niveaux : dépôt des comptes, partage des éléments qui concourent à la formation des prix, pour faire à la fois de la transparence, de la pédagogie et de la communication".

Pascal Thiaw-Kine, dirigeant de l'enseigne E.Leclerc à La Réunion

"Se mettre d'accord sur un objectif"

Le dirigeant d'E.Leclerc à La Réunion explique ainsi le processus qui attend le groupe dans sa quête de transparence. Premièrement : " mesurer la chaîne de valeurs entre le fournisseur et le consommateur".

Deuxièmement, car il faut que tout cela soit suivi d'effets : " se donner des objectifs qui permettent de voir dans quelle mesure tous les acteurs peuvent s'engager à apporter une contribution pour qu'in fine les prix baissent à La Réunion".

Et troisièmement, " se mettre d'accord sur un objectif". " On sera globalement et collectivement jugés sur les résultats", achève-t-il. Attention toutefois, à ne pas causer en contrepartie des destructions d'emploi, achève Pascal Thiaw-Kine.

14 acteurs dans la chaîne de valeurs

S'ils acceptent de jouer le jeu, les acteurs de la grande distribution ne veulent pas endosser seuls la responsabilité de faire baisser les prix, et font comprendre quu d'autres doivent aussi y mettre du leur. Car il y a " 14 acteurs dans la chaîne de valeurs, et il faut que tous soient là", pointe du doigt Pascal Thiaw-Kine. Aussi renvoie-t-il l'Etat à ses responsabilités quant à la réforme de l'octroi de mer et au coût du transport. " Nous avons à faire à des géants mondiaux", justifie-t-il. 

Même son de cloche chez Olivier Mercier pour Leader Price. 

"Ces 14 acteurs ont sûrement quelque chose à faire, à améliorer. Ce n'est pas que la distribution. On parle beaucoup de la grande distribution, de la distribution alimentaire, parce que nous faisons le lien avec le client final. Mais il faut qu'on les fasse venir, qu'on les affrete soit par la maritime soit l'aérien qu'on les stocke, il y a les taxes, l'octroi de mer, l'entreposage... Tout ça est à prendre en compte" 

Olivier Mercier, groupe Caillé (Leader Price)

Des pistes évoquées 

L'OPMR résume ainsi quelques pistes évoquées ce vendredi pendant l'installation du groupe : la transmission des comptes au tribunal de commerce, obligation légale qui ne semblait pas appliquée à La Réunion, la transmission des tickets de caisse à l'Insee pour le suivi des prix, et la suppression des "marges arrières" qui renforcent l'opacité et contribuent à la cherté de la vie. 

"Avec plus de 85 % de part de marché sur la consommation alimentaire de détail, la responsabilité sociale des enseignes locales leur impose des engagements forts vis-à-vis de la population qui doivent enfin se traduire par des actes et des résultats tangibles. Cet effort de transparence doit bien sûr être élargi à tous les maillons de la chaîne de la distribution alimentaire."

Observatoire des prix, marges et revenus

Une nouvelle réunion attendue

Alors à quand la baisse des prix dans les chariots de course ? Pas avant d'avoir trouvé des solutions avec chaque acteur sur le fret, le stockage, ou encore l'octroi de mer, fait-il comprendre. Les consommateurs devront donc prendre encore leur mal en patience. Une nouvelle réunion de travail pour poser la feuille de route doit avoir lieu dans les prochains jours. 

Dernière étape pour Philippe Vigier : la base aérienne 181

Quant à Philippe Vigier, il a achevé cette première visite réunionnaise à la base aérienne 181 de Gillot. Il y a notamment rencontré les 63 nouveaux policiers mutés à La Réunion, mais a aussi évoqué la continuité territoriale. Comme il l'avait déjà souligné sur le plateau de Réunion La 1ère mercredi soir, ce sont davantage de Réunionnais qui sont désormais concernés par le dispositif de l'Etat, suite à la révision des conditions d'attribution de cette aide lors du Ciom de juillet 2023. 

Les précisions de Philippe Vigier lors de son passage à la base aérienne 181 : 

ITV Philippe Vigier sur la continuité territoriale ©Réunion la 1ère

Philippe Vigier attendu à Mayotte

Avant de repartir, le ministre a également pris le temps de visiter l'espace de quelques minutes l'aéroport Roland Garros, et notamment le chantier d'extension du site.

Le ministre délégué aux outre-mer doit brièvement se rendre à Mayotte en quittant La Réunion ce vendredi soir. Dans cet autre département ultra-marin, un autre problème épineux l'attend samedi : la crise de l'eau potable, qui cause des coupures d'eau à répétition pour la population. 

Philippe Vigier à l'aéroport Roland Garros