La Chambre de commerce et d’industrie a réalisé une enquête sur l'impact du couvre-feu dans l’île. 32% des entrepreneurs interrogés déplorent une baisse de chiffre d'affaires de plus de 50 %. Sans surprise, la restauration est le secteur le plus impacté. La CCIR réclame le soutien de Bercy.
Les entreprises réunionnaises n’en finissent pas de subir les conséquences de cette crise sanitaire. Et les mesures prises par le préfet de La Réunion Jacques Billant face à la progression inquiétante de l’épidémie de Coronavirus ont, elles aussi, un impact direct sur la santé financière de ces sociétés.
Après l’instauration des motifs impérieux pour venir à La Réunion, puis la fermeture des galeries commerciales des plus grands centres commerciaux de l’île depuis le 11 février dernier, la mise en place d’un couvre-feu à 18 heures depuis le 5 mars dernier a sonné comme un coup de massue pour le microcosme économique pays.
516 chefs d'entreprise interrogés en 6 jours
C’est pour mesurer l’impact de cette dernière mesure que la Chambre de commerce et d’industrie de La Réunion (CCIR) a réalisé une enquête en interrogeant quelques 516 chefs d’entreprise sur la période du 5 au 10 mars. Des entrepreneurs issus de tous les secteurs d’activités : commerce, services, industrie, BTP, hôtellerie et bien sûr restauration.
Et le résultat de cette prise de pouls inquiète au plus haut point la CCIR : 47% des sondés déclarent une baisse de moins de 30% de leur chiffre d’affaires, 21% annoncent une baisse de l’ordre de 30 à 49% et enfin 32% déplorent une baisse de plus de 50% !
Une baisse de 50% du chiffre d'affaires en restauration
Le secteur de la restauration est celui qui fait le plus les frais de la mise en place de ce couvre-feu à 18 heures. 73% des professionnels de cette branche déplorent une baisse de plus de 50% de leur chiffre d’affaires, toujours selon les chiffres de l’enquête réalisée par la CCIR.
Selon les prévisions sur un mois, cela représenterait une perte de chiffres d’affaires estimée à 7 millions d’euros pour le secteur de la restauration rapide et traditionnelle. Pas moins de 3 000 salariés pourraient ainsi être placés en chômage partiel.
Les livraisons, une fausse bonne idée ?
60 % des restaurateurs interrogés indiquent par ailleurs qu’ils n’ont pas mis en place de service de livraison. Une solution qui n’en serait pas une, car selon les résultats de ce sondage de la CCIR, la mise en place d’un tel service représenterait une perte de marge de 47%.
Du côté des commerçants, ils sont 52% à annoncer une baisse de chiffre d’affaires de moins de 30%, ce qui représenterait 15 millions d’euros sur un mois. Dans les services, ils sont 60% à s’attendre à une baisse de 30% de leur chiffre d’affaires. Selon les estimations, il faut craindre une perte de chiffre d’affaires de l’ordre de 7 millions d’euros dans les services marchands.
Forte augmentation du coût du fret
Autre constat relevé dans le cadre de cette enquête : 48% des entrepreneurs interrogés, et parmi eux une majorité de commerçants, indiquent rencontrer des difficultés au niveau du fret. Ils pointent du doigt une augmentation du délai d’approvisionnement mais aussi une augmentation des tarifs.
42% des interrogés parlent d’une hausse de 26 à plus de 50% du coût du fret, principalement au niveau des échanges avec l’Europe. Mais c’est sur la ligne Asie que les tarifs du fret exploseraient : +200% ! "Tous les produits vont augmenter", prévient Ibrahim Patel, le président de la CCIR.
Regarder l'interview d'Ibrahim Patel sur Réunion La 1ère :
Vers une évolution du PGE ?
Quid des dispositifs d’accompagnement proposés par le gouvernement aux entreprises réunionnaises ? 37% des entrepreneurs interrogés ont sollicité un Prêt garanti par l’Etat (PGE). Ils sont 56% à penser qu’ils auront des difficultés pour tout rembourser. Et 55% à avoir demandé le report de leur PGE.
C’est sur la base de cette enquête et de ces chiffres que la Chambre de commerce interpelle le ministre de l’Economie Bruno Le Maire dans l’espoir d’obtenir une adaptation des mesures de soutien de l’Etat en faveur des entreprises réunionnaises.
"Risque de faillite imminente"
"Avec les nouvelles mesures très restrictives, toute les entreprises réunionnaises sont désormais exposées à un risque de faillite imminente", écrit Ibrahim Patel dans une lettre adressée à Bercy. Celui-ci demande ainsi l’ouverture du Fonds de solidarité nationale (FSN) à tous les secteurs d’activité et que son seuil de déclenchement passe à 30% de perte de chiffres d’affaires. A l’heure actuelle, une entreprise doit enregistrer une perte minimale de 50% pour pouvoir bénéficier de ce FSN.
De même, Ibrahim Patel réclame une évolution du dispositif de PGE : report de la date limite de souscription au 31 décembre 2021, levée de l’exigence d’être à jour des dettes fiscales et sociales, allongement de la durée totale du PGE, etc.
Des banques pas assez "souples" ni "bienveillante"
Jusqu’à présent, très peu d’entreprises réunionnaises en ont profité (7 099), déplore le président de la CCIR qui demande à Bercy "d’inviter les banques à traiter les demandes avec plus de souplesse et de bienveillance"…
Concernant le dispositif de chômage partiel, la Chambre de commerce demande enfin à ce que tous les secteurs d’activité puissent désormais bénéficier d’une couverture à hauteur de 70% de la rémunération brute de leurs salariés. Jusqu’à présent, la majeure partie des entreprises bénéficient d’une couverture fixée à 60%.