A La Réunion, chaque début d'année est marquée par les marches sur le feu organisées dans les divers temples de l'île. Un rituel d'importance pour la communauté tamoule de l'île, qui célèbre ainsi pendant 18 jours l'épopée indienne du Mahabharata. L'oeuvre, sacrée dans l'hindouisme, est d'ailleurs lue et chantée tous les soirs du carême.
Parmi les temples qui organisent leur marche sur le feu le 1er janvier, celui du Colosse à Saint-André.
Plusieurs dizaines de marcheurs
Dans la plus grande ferveur et au son des tambours sacrés, environ 70 pénitents ont bravé les braises en fin d'après-midi pour honorer la déesse Pandialee, autrement connue sous le nom de Draupadee.
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Ce mercredi soir, tout s'est bien déroulé pour les nombreux marcheurs, sourit l'officiant Patrick Kichenama dit Soubaye, qui a guidé les pénitents dans leur foi ces dernières semaines.
"Communion entre les gens"
La ferveur semble ainsi avoir transcendé les pénitents tout au long de la journée. Jean-Marie, un fidèle du temple qui a participé à ces dernières semaines de préparation, dit avoir particulièrement ressenti la foi lors des cérémonies plus tôt le matin. "On sentait vraiment la communion entre les gens", observe-t-il.
Foi et craintes
Mais la foi vient-elle à bout de toutes les peurs, au moment de pénétrer le "carré d'feu" (ou "tikouli") ?
Jean-Marie a son avis sur la question. "La crainte et le stress sont toujours présents. On ne peut pas dire qu'on ne craint pas le feu. Une petite cigarette nous touche la peau, ça brûle. Là, on parle d'un brasier, donc c'est normal", admet-il.
Devant le tapis de braises, "il n'y a pas de craintes", affirme quant à lui Patrick Soubaye, l'officiant au temple du Colosse qui a accompagné les marcheurs tout le long de leur parcours. "Parce que nou lé là depuis 18 jours, c'est une préparation, et puis nou na la foi", justifie-t-il.
"Pas une obligation"
Rudy, un des fidèles, peut lui témoigner de sa propre expérience, après avoir pris part à ce rituel pour la première fois ce 1er janvier.
"Dans le feu, on n'a pas le temps de ressentir la chaleur parce qu'on est en pleine foi", exprime-t-il.
Avant lui, ses grands-parents avaient déjà marché sur le feu dans le même temple, raconte ce fidèle. Toutefois, si de nombreux malbars de La Réunion participent à des marches sur le feu chaque début d'année, "ce n'est pas une obligation", considère-t-il. "Parce que ça, on le fait avec ferveur et émotion. Mais ça reste très important".
18 jours de carême
Les cérémonies n'ont pas eu lieu que ce 1er janvier, et la préparation a débuté plusieurs semaines auparavant. Soit 18 jours de carême - repas exclusivement végétarien, chasteté et sobriété - et de prières ont précédé la marche sur le feu. Avec des temps forts dont le mariage entre les divinités Arjunin et Pandialee - le traditionnel "mariage bon dieu" - la semaine précédente, ou encore l'"Amar cap", au début du carême, pendant lequel les pénitents signifient leur engagement envers les divinités et les cérémonies à venir.
Plusieurs marches sur le feu en janvier
Dans chaque temple, la date de la marche sur le feu peut différer. Certains choisissent d'organiser cette grande période de carême à d'autres périodes de l'année. Mais le début du mois de janvier est traditionnellement prisé.
"Nou la perpétué la tradition, mais le 1er janvier nou la pas inventé. Par rapport à leurs disponibilités, à leurs travaux, ils ont marché le 1er", souligne Jean-Marie, fidèle du temple du Colosse, faisant référence aux toutes premières marches sur le feu pratiquées par les engagés indiens. Celles-ci avaient lieu lors des jours de congé accordés par leur employeur pour la nouvelle année, après la coupe cannes. Depuis, la tradition est restée dans de nombreuses familles.
Ainsi, les jours à venir, d'autres marches sur le feu se tiendront partout sur l'île, notamment à quelques pas du Colosse au temple de Ravine Creuse ce jeudi 2 janvier.