C'est une première à La Réunion. 72 boulangeries de l’île se mobilisent pendant 15 jours pour lutter contre les violences intrafamiliales, notamment avec l’opération “sacs à pain”, lancée par la préfecture en partenariat avec la fédération départementale des boulangers de La Réunion.
"Mon ti famille lé précieux, mi prend soin de li, mi tap pa li", est le slogan apposé sur les emballages de sacs à pain. Des numéros d’urgence y sont également inscrits.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
Aider les victimes de violences à porter plainte
En 2023, les faits de violences intrafamiliales ont connu une hausse de 17% par rapport à l’année 2022. La proportion des violences intrafamiliales représente 49 % de l’ensemble des faits de violences à La Réunion.
Le but de l’opération “sacs à pain” est à la fois de sensibiliser la population aux violences intrafamiliales et d’aider les victimes à porter plainte.
L’État veut mobiliser le plus d’acteurs possible dans cette lutte, “la boulangerie peut être une solution”, estime Norbert Tacoun, président de la fédération réunionnaise des artisans boulangers-pâtissiers.
C’est un sujet sensible chez nous, puisqu’on a autant d’hommes que de femmes qui passent dans nos magasins chaque jour. C’est vrai que le phénomène est très répandu à La Réunion. Le problème à la base, ce sont les violences intrafamiliales. En tant qu’acteurs économiques, on pense qu’on a un rôle à jouer.
Norbert Tacoun, président de la fédération réunionnaise des artisans boulangers-pâtissiers
Des victimes encore trop timides
Cette opération vise également à “aller vers les victimes”, en les sensibilisant dans les lieux que tout le monde fréquente au quotidien. “Tout le monde va à la boulangerie, tout le monde achète une baguette. On essaie d’entrer dans les foyers. On fait beaucoup de communication”, souligne Christine Torres, sous-préfète à la cohésion sociale et à la jeunesse.
Malheureusement, encore beaucoup de victimes n’osent pas parler, n’osent pas se confier et n’osent pas téléphoner.
Christine Torres, sous-préfète à la cohésion sociale et à la jeunesse
“On peut toucher près de 150 000 personnes”
Les commerçants et notamment les boulangers, affirment qu’ils sont témoins de situations sensibles au quotidien. “On voit des situations tendues, mais on ne peut pas s'immiscer dans la vie des gens, donc on reste quand même à l’écart, même si ce n’est pas toujours facile”, confie Norbert Tacoun.
Grâce à cette opération, les boulangers peuvent œuvrer en faveur de la lutte contre les violences intrafamiliales de façon subtile.
De leur côté, les clients saluent cette initiative. "Je pense que certaines personnes peuvent avoir un déclic, ça peut les freiner quand ils s'apprêtent à commettre des actes de violences", lance une cliente. "Ça peut inciter les victimes à se manifester plus facilement. Là, elles ont les numéros directement sur les emballages, c'est une solution pratique", explique un autre client.
On a la chance d’avoir en moyenne 500 personnes en moyenne qui passent quotidiennement dans nos boutiques. On a 300 boutiques environ, donc on peut toucher près de 150 000 personnes par jour.
Norbert Tacoun, président de la fédération réunionnaise des artisans boulangers-pâtissiers
En cas d’urgence, le numéro 17 est prioritaire
Christine Torres insiste sur le fait que “la plupart des victimes ne connaissent pas les numéros”.
En cas d’urgence, je rappelle que c’est le 17 le numéro qui prime. Ce ne sont pas les 3919 ou d’autres numéros. Je trouve que c’est une belle mobilisation pour une politique qui est prioritaire. La Réunion est malheureusement un des départements les plus touchés par ces violences intrafamiliales.
Christine Torres, sous-préfète à la cohésion sociale et à la jeunesse
“Si on pouvait renouveler l’opération chaque année ce serait bien, conclut Norbert Tacoun. On espère que ça va durer des semaines, mais le nombre de sacs est limité, donc ça risque de partir assez vite”.
Au terme de l’opération, 100 000 sacs à pain seront distribués aux quatre coins de l’île ces prochains jours.