Entre 1980 et 2011, La Réunion a enregistré 36 attaques de requins, dont 18 impliquant des surfeurs. De 2011 à 2019, 25 attaques supplémentaires se sont produites, dont la dernière en mai 2019 sur le spot de Saint-Leu. Depuis plus aucune attaque recensée.
Réduire le risque pour "rendre la mer aux Réunionnais"
L’Etat affiche sa volonté de "rendre la mer aux Réunionnais". Un symposium réunissant des experts du monde entier se tient cette semaine à La Réunion pour échanger sur les différents dispositifs appliqués ici et là, et pour trouver des pistes pour aboutir à cet objectif. La gestion du risque requin est au cœur des débats.
Quoiqu’on fasse, on reste confronté à un milieu naturel et sauvage, où il y a des prédateurs qui circulent librement. Et donc, il faut trouver un équilibre entre le risque zéro, qui n’existera jamais mais qu’on doit réduire au maximum, et puis le besoin qu’ont les populations de préserver la biodiversité.
Philippe Malizard, sous-préfet de Saint-Paul et président du Centre Sécurité Requin
Invité de la matinale de Réunion la 1ère, Philippe Malizard note que dans tous les pays la plage est ouverte, mais il y a un risque. A La Réunion, l’interdiction ne vaut que pour les activités nautiques et la baignade, mais les autres activités ne sont pas interdites, souligne le sous-préfet de Saint-Paul.
Lors de ce symposium, les meilleurs spécialistes du monde sont unanimes : " l’augmentation des hommes et de l’activité humaine sur les côtes attire les requins ". Les éléments organiques, la matière, qui arrivent nourrissent les poissons, requins compris. " Oui, l’activité humaine est un facteur aggravant ", atteste le sous-préfet de Saint-Paul.
L’accès à la mer restreint par arrêté préfectoral, et une récente modification
Depuis 2013, un arrêté préfectoral limite la pratique des activités nautiques à La Réunion. Il interdit la baignade dans la zone des 300 mètres, sauf sur un "platier" ou derrière un filet de protection.
Des zones sécurisées sont mises en place pour permettre une pratique encadrée du surf notamment. Les surfeurs sont aussi encouragés à se munir de dispositifs de répulsion électriques individuels, qui ont démontré leur efficacité, selon Willy Cail, le directeur du Centre Sécurité Requin.
Une modification de l’arrêté préfectoral vient d’autoriser la reprise de la nage avec palmes, masque et tuba, dans les 300 mètres. Il est en revanche recommander de ne pas la pratiquer seul, précise Philippe Malizard.
On se rend compte que finalement, lorsqu’on a un masque on voit sous l’eau et donc on peut voir venir le danger, d’ailleurs la plongée n’est pas interdite.
Philippe Malizard, sous-préfet de Saint-Paul et président du Centre Sécurité Requin
La pêche préventive pour réduire le risque, des évolutions prévues
Depuis 2014, quatre programmes de pêche ont été déployés à La Réunion pour réduire le risque. Après CAPREQUINS, le Programme Réunionnais de Pêche de Prévention est porté par le Centre Sécurité Requin. L’Etat, qui pilote l’ensemble, réaffirme son souci de respecter la biodiversité.
On nous reproche de les massacrer, on en tue le moins possible. On essaie vraiment de sauvegarder la ressource.
Philippe Malizard, sous-préfet de Saint-Paul et président du Centre Sécurité Requin
Le dispositif est maintenu et monitoré, explique le directeur du Centre Sécurité Requin. Willy Cail annonce que l’objectif en 2025 est à l’avenir, du fait des connaissances acquises, de " commencer à relâcher des requins tigres de moins de 2,5 mètres et de les marquer ".
Grâce à des balises, il sera possible de voir s’ils reviennent dans les eaux réunionnaises. L’Etat veut ainsi de prélever des spécimens qui ne serait pas ceux qui attaquent l’humain. Le président du CSR précise que 99% des attaques sont du fait de requins bouledogues à La Réunion.
Des palangres sont aussi déployées à La Réunion. Elles disposent d’une balise d’alerte à la capture, permettant aux pêcheurs d’aller contrôler la prise. Les requins marteaux sont relâchés, les bouledogues ou tigres sont prélevés, explique Willy Cail, le directeur de CSR. Ces palangres réunionnaises sont également utilisées en Australie ou en Afrique-du-Sud.
Analyser et adapter les dispositifs
Des dispositifs mise en place et pilotés par le Centre Sécurité Requin depuis plusieurs années maintenant. Le programme Shark, d’études du comportement des requins, via un balisage de spécimens, en fait partie. L’analyse des effets de ces dispositifs doit permettre d’avancer dans la gestion du risque requin.
Le travail que l’on fait, c’est de permettre un retour de la baignade et des activités sur notre territoire. Cela fait 10 ans que le Centre Sécurité Requin existe. On évolue, la connaissance nous le permet. Chaque territoire a sa spécificité.
Willy Cail, directeur du Centre Sécurité Requin
Les drones utilisés ailleurs ne sont par exemple pas une solution viable à La Réunion, du fait de la couverture nuageuse ou encore de la profondeur de l’océan, explique-t-il. En revanche, la possibilité d’utiliser des drones sous-marins est à l’étude. Des caméras à intelligence artificielle pour identifier et différencier les requins est aussi sont aussi à l’étude.
Les filets de protection d’Afrique-du-Sud n’ont pas montré une si grande protection, car les requins bouledogue ont tendance à s’y tenir à distance et ne s’y font donc jamais prendre, explique le président du CSR.
On a affaire à des animaux intelligents, qui finissent par comprendre où est le danger pour eux et qui s’en éloignent. Les requins bouledogues, ils restent sur le littoral, ils ne disparaissent pas, ils ses sont simplement éloignés des endroits où on les pêche.
Philippe Malizard, sous-préfet de Saint-Paul et président du CSR
Connaître les requins pour réduire le risque
Apprendre à connaître les requins, leurs comportements, leurs habitudes, leur danger et savoir les différencier est aussi un champ développé à La Réunion. L’éducation permet aussi de gérer le risque, estiment de nombreux acteurs. Une mallette pédagogique a été élaborée pour sensibiliser les enfants dans les écoles.
C’est la génération de demain, il faut les éduquer. On est dans un milieu, il n’y a pas de bons ou de mauvais requins. Il faut que les jeunes réunionnais comprennent qu’on est dans un milieu dangereux, et chacun prendra sa part.
Willy Cail, directeur du CSR