Ce lundi 2 septembre, la Chambre régionale des comptes de La Réunion rend ses observations sur la gestion de la commune de Saint-Louis. La juridiction financière formule 12 recommandations relatives à l’organisation communale et les moyens humains, ainsi qu’à la politique de la ville.
Saint-Louis est " en proie à des difficultés économiques et sociales importantes ", note la CRC, et se révèle " vulnérable et particulièrement fragmentée ". La massification et pérennisation des emplois d’exécution peu formés et encadrés a fragilisé financièrement la commune, limitant sa capacité à mener des projets d’ampleur.
La gouvernance de la commune concentrée autour de la maire
La CRC relève que la maire de Saint-Louis porte la charge exclusive de la politique de la ville et le nouveau programme national de renouvellement urbain, et concentre ainsi la gouvernance de la commune autour de sa personne. Elle note également que le suivi de la gestion quotidienne des services n’est pas facilité par la " transversalité des délégations de fonction accordées aux élus ".
La CRC souligne donc que la réorganisation des services progresse lentement et que les différentes directions ne disposent toujours pas d’une déclinaison claire en services. La chaine de prise de décision en est ralentit, estiment les magistrats de la Chambre.
" L’héritage lourd d’une politique de titularisation massive "
Si la commune a amélioré le contrôle du respect des obligations en matière de temps de travail et a fait baisser de façon significative le nombre d’heures supplémentaires, la réglementation n’est " toujours " pas respectée dans certains domaines. La CRC note en effet l’absence de plan de formation et de tableau d’effectifs, et des lignes directrices de gestion insuffisamment précises. Elle relève également " d’importantes irrégularités " dans le recours aux agents contractuels.
Sur 6 recommandations relatives à des questions de régularité, 5 concernent la gestion des ressources humaines. Aussi, la CRC regrette que la commune ne se soit pas dotée d’outils efficace de pilotage, notamment pour la maîtrise des effectifs, sachant que " l’héritage lourd d’une politique de titularisation massive menée en 2019 et 2020 " " pèse fortement sur les charges de personnel ".
Des marges de manœuvre possibles
Du fait de l’accélération depuis 2020 du redressement de la situation financière de la commune, la CRC estime qu’elle dispose de marges de manœuvre pour espérer porter des projets d’investissements et d’amélioration des services rendus à la population, sous réserve de conserver la maitrise de la masse salariale.
Encore faut-il que la commune soit capable de mener des projets d’ampleur. Difficile d’avoir recours aux instruments de la politique de la ville, quand l’organisation communale est toujours en voie de construction, et limite la coordination et la structuration de l’action administrative, note la Chambre.
La priorisation de certaines actions de politique de la ville interroge
Elle constate que les dispositifs de la politique de la ville ont bénéficié aux 5 quartiers prioritaires de la ville, soit 18 000 habitants, à des proportions inégales. La commune mobilise ainsi des ressources financières pour la cohésion sociale à travers le contrat de ville, la cité éducative, la cité de l’emploi, les quartiers productifs ou le nouveau programme de renouvellement urbain du quartier du Gol.
Ce dernier, d’un montant de 58 millions d’euros, a débuté en 2016 pour une première phase d’études de conception jusqu’à 2018. La seconde phase de réalisation s’est arrêtée durant 3 ans, ce qui a été préjudiciable à sa finalisation, explique la Chambre. Elle souligne un montage financier risqué et la lenteur des différents acteurs en matière de relogement notamment, ce qui interroge sur la priorité accordée à cette politique publique.
Reformer l’organisation et instaurer le contrôle interne
La commune peine à suivre le rythme du programme, dont elle est le maître d’ouvrage, notamment du fait d’une gouvernance discontinue, de la rotation des agents et d’un manque de technicité en matière de commande publique. Afin de compenser les retards cumulés pour respecter l’échéance du 30 juin 2026, la commune optimise les procédures de marchés publics sans réellement mesurer les risques juridiques, techniques et financiers encourus, ni l’impact sur les petites et moyennes entreprises, estime la CRC.
Afin de mener à bien ses ambitieux projets de renouvellement urbain dans des délais raisonnables, la commune devra donc achever le processus, récemment engagé, de reforme de son organisation et de mise en place de mécanisme de coordination et de contrôle interne, concluent les magistrats de la Chambre régionale des comptes.