Mardi dernier à Saint-Gilles, 80 personnes ont répondu présent à l'invitation de la Caravane de lutte contre les violences sexuelles faites aux enfants. Des victimes, mais aussi des professionnels de tous horizons, qui chacun dans leurs fonctions sont confrontés à ce fléau : avocats, gendarmes, éducateurs, salariés d'associations, professeurs, professionnels de santé ou de la petite enfance...
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Les occasions où tous se retrouvent pour échanger leurs points de vue et expériences sont rares, mais fondamentales pour avancer dans la lutte, en améliorant la prise en charge des victimes notamment.
"Trouver ensemble des solutions"
"Depuis deux ans, on a recueilli les témoignages de près de 30 000 personnes : 60% nous ont dit que les professionnels ne les avaient pas protégées. Soit les professionnels sont tous nuls, soit au contraire, il y a une réalité systémique qui demande qu'on se pose", estime Arnaud Gallais, co-fondateur de Mouv'enfants.
Celui qui a démissionné de la Ciivise (Commission Indépendante sur l'Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants) il y a quelques jours "parce que la forme et le fond n'y sont pas", constate que "les ressources, on les a", et qu'il reste maintenant à "trouver ensemble les solutions".
Arnaud Gallais était l'invité du JT de Réunion La 1ère ce jeudi :
A Saint-Gilles et à Saint-Denis
Trouver des solutions, des recommandations d'actions à mettre en oeuvre, c'est justement le but de la Caravane qui a prévu de passer, au total, dans 45 villes de France hexagonale et d'outre-mer. Après ce passage à Saint-Gilles mardi, elle est ce jeudi 21 décembre à Saint-Denis, où professionnels et victimes sont conviés à échanger et débattre au salon de l'ancienne mairie.
Une mobilisation encore plus forte en outre-mer
Arnaud Gallais constate d'ailleurs, après un passage en Guyane et à Mayotte précédemment, une mobilisation encore plus forte des différents acteurs en outre-mer. "J'ai rencontré des gens exceptionnels. (...) On manque de volonté politique, mais ce qui est très rassurant, c'est qu'on a des personnes de qualité présentes pour participer", constate-t-il.
"Les gens sont mobilisés sur le terrain"
Comme il le rappelle, 160 000 enfants chaque année seraient victimes de violences sexuelles. Ce qui n'empêche pas les acteurs d'être mobilisés dans la lutte, observe-t-il, interrogé sur le plateau de Réunion La 1ère ce jeudi.
"On a l'impression qu'il ne se passe rien, mais sur le terrain la réalité est un peu plus complexe. Les gens sont mobilisés. (...) On peut déplorer à La Réunion le nombre de professionnels de santé, l'absence de coordination, (...) néanmoins, on peut admirer de belles initiatives".
Arnaud Gallais, militant des droits de l'enfant
"On crie haut et fort ce qui ne va pas et comment on va pouvoir prévenir les violences, trouver des moyens, améliorer le fonctionnement. Tout ce qui ressort, de ce que je vois, c'est le manque de moyens", constatait quant à elle une professionnelle qui évolue au sein d'une brigade des mineurs, mardi lors du débat de la Caravane à Saint-Gilles.
L'importance de croire les enfants
Marie-Claude Barbin, psychologue retraitée et auteure du livre "Briser les silences", a tenu quant à elle à être là non seulement en tant que victime elle-même de violences durant son enfance, mais aussi en tant que professionnelle ayant été à l'écoute d'enfants lors de sa carrière. Elle insiste sur un point en particulier.
"Il est important de croire en la parole des enfants. Bien souvent, on leur dit, "tu mens". (...) Or les enfants ne mentent jamais sur ces choses-là. (...) Ils ont une facilité de parole s'ils sont en confiance. Il faut les croire, c'est très important"
Marie-Claude Barbin, psychologue retraitée et auteure du livre "Briser les silences"
Après la libération de la parole, la protection des victimes
Pour Frédéric Rousset, le président du CEVIF Réunion (Collectif pour l'élimination des violences intra-familiales) rappelle que ce genre de lieu de paroles et d'échanges, comme la venue de la Ciivise en juin, est de "soulever le couvercle et de mettre fin à cette silenciation massive qui sévit sur notre île, (...) de verbaliser les choses et de recouvrer sa dignité par la parole".
Cette étape importante passée, il faut désormais pouvoir mieux protéger les victimes, et pour cela il faut aller les chercher, insiste Frédéric Rousset. Car, dit-il, "statistiquement, trois enfants par classe sont concernés, il faut aller les chercher et les protéger".
Un Livre Blanc à l'issue de la tournée de la Caravane
A l'issue des débats démocratiques menés par la Caravane, un état des lieux et des recommandations, parfois propres à chaque territoire, seront émises et consignées dans un Livre Blanc à destination de la secrétaire d'Etat en charge de l'Enfance Charlotte Caubel.