De petit timbre à émoji à succès, l'épopée insolite du drapeau de Saint-Pierre et Miquelon

Il réchauffe les cœurs des Saint-pierrais et Miquelonnais exilés et rappelle l'histoire du peuplement de l'archipel. Le drapeau de Saint-Pierre et Miquelon flotte aussi sur Internet depuis quelques années et il est parfois visible sur certains bâtiments publics. Quand est-il apparu et comment est-il mis en avant aujourd'hui ?

Quelle est son histoire ?

Si la symbolique du drapeau de Saint-Pierre et Miquelon est bien documentée, l'histoire de sa création est moins connue du grand public. L'étendard représente la Grande Hermine, le bateau sur lequel Jacques Cartier a atteint Saint-Pierre le 15 juin 1536. Y figurent aussi les drapeaux des trois régions d'origine des habitants de l'archipel : le Pays basque, la Bretagne et la Normandie.

L'histoire racontée par ce drapeau est ancienne mais l'étendard en lui-même l'est beaucoup moins. Dans son ouvrage Portraits, Patrick Dérible nous apprend que les armoiries de l'archipel sont créées dans les années 60 par le Saint-Pierrais Léon Joner. Il s'inspire pour cela d'un timbre-taxe publié en 1947.

Images mises à disposition par Patrick Dérible

Francis Leroux fait ensuite l'acquisition du dessin original pour le diffuser plus largement. Sur une idée de Jean-Paul Dunan, André Paturel simplifie les armoiries dans les années 80 et en fait le drapeau que nous connaissons aujourd'hui à quelques détails près. 

Un des plus beaux drapeaux de France

D'abord destiné à la promotion de la voile, le drapeau est petit à petit approprié par les habitants de l'archipel qui en font un symbole de leur identité. En 2019, l'étendard de Saint-Pierre et Miquelon est même proclamé troisième plus beau drapeau de France par la Société française de vexillologie.

On peut l'apercevoir devant l'entrée de la Maison Basque, dans certains jardins l'été, ou encore dans de nombreux appartements d'étudiants exilés en métropole ou au Canada. Il se fait en revanche plus discret sur les frontons des bâtiments publics. S'il flotte sous le drapeau tricolore devant l'hôtel de la Collectivité territoriale, le drapeau de l'archipel est absent du fronton des mairies de Miquelon-Langlade et de Saint-Pierre. 

Toléré sur les bâtiments publics

Un choix qui appartient à chaque collectivité. Afficher le drapeau de l'archipel sur les bâtiments publics n'est ni interdit, ni officiellement autorisé. En effet, "aucun texte législatif ou réglementaire ne fixe les règles de pavoisement des édifices publics", précisent les services de l'Etat.

Le drapeau bleu-blanc-rouge doit cependant obligatoirement flotter au fronton des mairies certains jours dans l'année et toujours avoir la préséance sur les autres. Le drapeau de l'Union européenne doit lui être déployé le 9 mai, jour de la fête de l'Europe, à droite du drapeau français. En dehors de ces obligations, l'usage d'autres drapeaux est toléré par l'Etat.

Ainsi, les drapeaux basque et breton présents sur l'étendard de l'archipel s'affichent massivement dans l'espace public dans leurs régions respectives. Le "Gwenn ha Du" breton flotte constamment au fronton de plus de 770 mairies des cinq départements de la Bretagne historique, ainsi que devant certaines écoles publiques et collectivités territoriales. L'"Ikurriña" est reconnu comme drapeau officiel au Pays basque sud, au même titre que le drapeau espagnol.

Le drapeau présent sur Internet

Il est toutefois un espace où le drapeau de l'archipel flotte largement : Internet. Depuis 2015, Saint-Pierre et Miquelon a rejoint le club des 268 pays et territoires disposant d'une version émoji de leur étendard. Un privilège que n'ont toujours pas obtenu les Bretons ni les Basques, malgré leurs demandes répétées depuis plusieurs années.

Le drapeau de Saint-Pierre et Miquelon est donc utilisé par défaut par de très nombreux internautes basques sur les réseaux sociaux, X (ex-Twitter) en tête, pour affirmer leur appartenance et leur attachement au Pays basque.

Malgré cela, en 2021, date des dernières données disponibles, l'émoji "drapeau SPM" était un des émojis "drapeaux" les moins utilisés au monde. Il devançait néanmoins les étendards des îles Mariannes, de Nauru et de la Martinique, et son utilisation a même augmenté entre 2019 et 2021. À vos claviers !