"La coke c'est vicieux parce que j'en veux toujours plus" : l'addiction à la cocaïne, un fléau qui n'épargne aucune génération

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Plus d'un million de personnes déclarent avoir consommé de la cocaïne au moins une fois en 2023 en France. Presque 40 % des 14-19 ans ont déjà testé le cannabis en 2021 à Saint-Pierre et Miquelon. Cocaïne ou cannabis, nous avons recueilli des témoignages de consommateurs et de proches pour l'émission À la une consacrée aux drogues.

"Je prends de la cocaïne parce que je suis accro. Quand je la consomme j'ai l'impression d'être complet(e)... mais ça dure 10 minutes et j'en veux d'autre, j'en veux plus." C'est toute la difficulté exprimée par une personne consommatrice de cocaïne. 

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Obtenir ces témoignages à Saint-Pierre et Miquelon n'est pas toujours simple. Encore moins en tant que journaliste, encore moins quand on ne sait pas forcément à qui s'adresser, encore moins sur un sujet comme les drogues. Après avoir garanti l'anonymat et gagné leur confiance, quelques personnes ont accepté de se livrer. 

On boit un verre et là quelqu'un va en sortir [de la cocaïne]. Tout le monde attend ce petit moment et ça finit toujours par "bon okay juste 2 traces". En réalité, on en prend 4, voire plus.

Personne consommatrice de cocaïne

Contrairement à certains consommateurs avec qui nous avons parlé, cette personne n'est pas dans le déni face à son addiction. Un déni évoqué dans cet autre échange, avec quelqu'un qui n'a jamais consommé de drogues : "Moi on m’a déjà dit : ça va j’ai juste pris de la coke hier soir c’était tranquille… et là si tu dis quelque chose t’es une personne chiante, surtout si t’en as jamais pris."

Bon courage pour trouver des amis qui ne consomment pas de drogue, en tout cas dans les gens qui font souvent la fête.

Personne non-consommatrice de drogues illicites

La cocaïne, une drogue à 150 euros le gramme devenue banale

Si cette banalisation de la cocaïne existe à Saint-Pierre et Miquelon, sa consommation a explosé partout. En France, plus d'un million de personnes déclarent en avoir consommée au moins une fois en 2023. Un chiffre qui a presque doublé en seulement deux ans. 

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"J'ai vu des gens de 20 à 50 ans environ prendre de la coke". Alors, est-ce que c'est facile de se procurer de la cocaïne sur le territoire ? "Visiblement tout le monde en a, donc c'est que ça doit être facile. Quand il n'y en a pas c'est qu'il y a eu des descentes de flics ou que tout a été consommé", nous a-t-on confié. 

La drogue ça devient une dépense normale.

Personne consommatrice de cocaïne

Pourtant, cette consommation coûte cher, très cher. 150 euros le gramme à Saint-Pierre et Miquelon. "Pour sortir je prévois des clopes, de l'alcool et souvent 1 gramme de coke."

La santé mentale, une préoccupation pour consommateurs et proches

En France, le nombre de 18-24 ans ayant eu des pensées suicidaires a été multiplié par plus de 2 depuis 2014. Un public également touché au niveau local, comme le démontrent ces chiffres de l'étude Santé Publique France de 2020 :

  • 25,6 % ont vécu au moins un épisode dépressif caractérisé 
  • 19,2 % ont eu des pensées suicidaires
  • 11,8 % ont fait au moins une tentative de suicide 

À noter que les personnes interrogées dans cette enquête ne sont pas forcément consommatrices de drogues.

Pour moi le problème arrive quand l’addiction prend le contrôle de sa vie et ça m’inquiète !

Proche d'une personne consommatrice de cannabis

Mais la santé mentale et l'usage de stupéfiants vont souvent de pair, comme le démontre ce témoignage d'un proche d'une personne consommatrice de cannabis : "J’ai conscience que sa consommation n’est pas forcément le vrai problème, ça cache sûrement un mal-être plus profond. Si les effets du cannabis peuvent procurer un certain confort psychologique, peut-être moins nocifs que des antidépresseurs, alors pourquoi pas, la question se pose. Je ne sais jamais dans quel état je vais retrouver cette personne. Normale ? Agressive ? Elle ne contrôle pas ses émotions."

À noter que dans l'archipel 39,9% des adolescents de 14 à 19 ans ont déjà expérimenté au moins une fois le cannabis, selon une enquête du CSAPA de 2021. Cet usage du cannabis s'inscrit majoritairement dans un cadre festif. 

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Pour une personne consommatrice de cocaïne, la santé mentale fait aussi partie de ses inquiétudes. "Mon premier frein pour arrêter c’est ma santé physique et mentale. Des fois j’ai des angoisses… et puis tu ajoutes la clope et l'alcool, je suis parfois dans un état pitoyable."

L'ambiguïté entre arrêter et continuer

Mais ces personnes consommatrices ne souhaitent pas arrêter la drogue. Les addictions l'emportent. Le cannabis est souvent perçu comme le seul remède pour apaiser, pour rassurer. Pour d'autres : "Arrêter la coke c'est aussi difficile que d'arrêter la clope ou l'alcool, mais pour des raisons complètement différentes." 

Je me sens complètement démuni(e) et affecté(e).

Proche d'une personne consommatrice de cannabis

Face à cette addiction, les proches se sentent impuissants : "Je me renseigne pour l'aider mais tant qu'elle n'est pas prête à faire les démarches, rien n'est possible". S'ajoute à cela le manque d'anonymat à Saint-Pierre et Miquelon. "Ça joue sur ses angoisses et cette personne a peur d'être dénoncée aux gendarmes en tant que consommateur".