Succession des terres Beauperthuy : la collectivité de Saint-Martin opposée à la vente aux enchères de trois parcelles

Conférence de presse autour de la vente de trois parcelles du Domaine Beauperthuy - 11/04/2024.
A Saint-Martin, les terres de Beauperthuy sont à nouveau au cœur d’une discorde. Trois parcelles doivent être vendues aux enchères le 13 mai prochain. Sauf que la collectivité territoriale avait annoncé sa ferme intention de faire l’acquisition de la totalité du domaine, un patrimoine inestimable tant au regard de sa superficie que de sa valeur. Il n'en fallait pas plus pour provoquer la colère du président Mussington, qui appelle la population à manifester avec lui le 20 avril prochain.

Les terres de la succession Beauperthuy sont à nouveau au cœur d’un bras de fer, à Saint-Martin. Cette fois, c’est la collectivité territoriale qui conteste la mise aux enchères de parcelles de cet héritage colossal.

La ferme intention de la collectivité d'acquérir toutes les terres Beauperthuy

Une acquisition de la totalité des terres Beauperthuy par la collectivité est présentée comme "bénéfique pour le territoire", par la majorité en place. Celle-ci parle "défendre ce patrimoine séculaire saint-martinois".
Ainsi, "dans l’optique de préserver ce patrimoine foncier et d’éviter toute spéculation immobilière", elle compte bien acheter progressivement les terrains correspondants, comme en septembre 2023, où elle est devenue propriétaire d’un lot situé au lieu-dit Griselle, lors d’une vente aux enchères.

Mais, contre toute attente, alors que cette démarche est lancée, la presse locale ainsi que le quotidien américain New York Times se sont fait écho, la semaine dernière, de la vente aux enchères de dix hectares bien situés ; ce sera le 13 mai prochain.

Le président de la Collectivité, qui poursuivait des négociations pour un rachat avec l’administrateur judiciaire depuis l’an dernier, ne comprend pas. Il a organisé une conférence de presse, hier (jeudi 11 avril 2024).

S’il y a obstacle, cela ne vient pas de la collectivité de Saint-Martin. Notre volonté est toujours affichée, donc on est toujours prêts à reprendre le dialogue, d’autant plus qu’aujourd’hui, nous avons le soutien de l’EPF [NDLR : Etablissement public foncier] qui pourra porter financièrement le projet.

Louis Mussington, président de la collectivité de Saint-Martin

Louis Mussington, président de la collectivité de Saint-Martin

Face à l'annonce de la vente aux enchères, la stratégie de la collectivité se décline en trois temps : la négociation, le déploiement d’un arsenal juridique (de façon à récupérer les parcelles au prix de départ de deux millions et demi d’euros, même après leur adjudication), puis un bon coup de pression sur l’administrateur judiciaire. 

Moi, je prends cette responsabilité (on me dit non, je vais trop loin, je suis 1er magistrat en tant qu’élu...). Mais, écoutez, j’assume ! Samedi 20 avril, à 10h du matin, nous allons appeler au rassemblement (...). En omettant délibérément de nous informer de la vente aux enchères, les élus et la volonté exprimée de l'institution ont été ignorés. Néanmoins, notre attention reste à l'aménagement du territoire digne et à la préservation de ces 100 hectares pour la postérité. C'est l'essence même de notre combat.

Louis Mussington, président de la collectivité de Saint-Martin

 

Il faut absolument que le message soit clair : nous n’allons pas, les saint-Martinois ne vont pas accepter cette spéculation, cette vente !

Alain Richardson, vice-président de la collectivité de Saint-Martin

Léonie Flanders, directrice des services juridiques et Alain Richardson, vice-président de la collectivité de Saint-Martin.

Un conseil territorial se penchera sur ce dossier, avec un vote concernant l’arsenal juridique à déployer.

La "marche pacifique" voulue par la collectivité territoriale, le 20 avril prochain, sera l’occasion de savoir ce qu’en pense la population locale, y compris les héritiers légitimes des terrains tant convoités.

Certains descendants Beauperthuy se disent favorables à l’initiative de la collectivité territoriale, refusant que des promoteurs fassent main basse sur la maison familiale (dite "The Old House"), le musée de l’association Les Fruits de mer (voir photo) et le site actuel du Ranch du Galion, tous sur les terres dont la vente est imminente.

D’autres voix s’élèvent pour exprimer des craintes quant à la revente des parcelles à des investisseurs, à prix d’or, plutôt que leur maintien comme patrimoine de l’île.

Un héritage colossal objet de discorde

Le domaine de la famille Beauperthuy couvre au total plusieurs centaines d’hectares acquis dès le XIXème siècle ; un trésor sur un territoire insulaire prisé tel que la "Friendly Island". Mais la succession n’a pas été réglée plus de 160 ans après la disparition de l’acheteur initial, en 1861.
Les très nombreux héritiers à travers le monde et les divers occupants se déchirent. 

Certains affirment détenir un acte de propriété. C’est notamment le cas de la famille Webster qui, en janvier 2022 a manifesté sa colère, alors que les trois hectares où elle était installée ont été vendus aux enchères à une société immobilière. 

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