Elles peuvent dévaster un récif en quelques jours ou quelques semaines, avant de partir en ravager un autre. Les acanthasters sont naturellement présentes dans le Pacifique, mais lorsqu'elles prolifèrent, elles compromettent la vie des récifs. Or l'augmentation des températures de l'eau favorise la présence de cette étoile de mer. "Il y a un lien avec le changement climatique, confirme Pascal Dumas, chargé de recherche à l'IRD. Avant, on considérait qu'un cycle allait de 50 à 80 ans. Ces dernières années, on est plutôt sur des cycles qui tournent entre 10 et 15 ans. Cela signifie que les récifs auront d'autant moins de temps pour se régénérer entre deux infestations.»
"Si on demande aux vieux dans la région combien de fois ils ont observé des explosions du nombre d'acanthaster, en général, c'était une fois ou deux dans leur vie."
Pascal Dumas, IRD
Plateforme participative
Il ne faut surtout pas tenter de détruire un acanthaster, d'abord parce que ces étoiles de mer sont venimeuses, mais aussi parce qu'elles peuvent se régénérer et, pire, pondre en grande quantité si elles sont stressées.
Le bon réflexe est donc de les signaler sur Oreanet, le réseau de surveillance de l'IRD.
"Dès qu'une personne fait une observation d'acanthasters dans le lagon, elle peut enregistrer son observation sur le site web dédié, explique Angélique Pagenaud, chargée de communication du projet Oreanet. Il y a un formulaire qui demande des informations basiques telles que le nom, le prénom, l'adresse électronique de la personne. Elle trouve ensuite une carte où elle peut mettre précisément son point GPS et le nombre d'acanthasters qu'elle a observé."
Manque de données
Les données collectées permettent notamment d'alerter les autorités en cas de prolifération anormale. Un besoin important tant ces informations manquent ces dernières années. "On a eu des périodes où on savait qu'il y en avait beaucoup. La dernière grande période de prolifération, c'était 2019 à peu près, détaille Pascal Dumas, de l’IRD. Et ensuite, notamment avec le Covid, on a tout d'un coup enregistré une baisse très forte des signalements des citoyens. Donc il est probable qu'on soit entre deux cycles, mais comme on manque d'observations, et c'est aussi pour ça qu'on leur lance le programme, on n'en est pas sûr."
En Nouvelle-Calédonie, les acanthasters ne sont pas considérées comme des espèces invasives et font partie de l'écosystème du lagon. "Elle a un rôle de jardinier de la mer et entretien la diversité, explique Pascal Dumas. Mais quand elles sont trop nombreuses et qu'elles se multiplient, cela pose des problèmes parce qu’elles consomment le corail plus vite qu'il ne peut se régénérer. Donc dans ces cas-là et uniquement dans ces cas-là, quand on a une infestation, une multiplication, on peut avoir des soucis pour le corail."
La question de la destruction
Mais se pose la question ensuite de leur destruction. "C'est une question polémique en Nouvelle-Calédonie, concède Pascal Dumas. Nos voisins australiens, vanuatais ou fidjiens ne se la posent pas. Quand ils ont une infestation, ils ont des systèmes de gestion pour limiter la quantité des acanthasters et tout simplement les ramener à un niveau naturel. Sur ce point, ils ont de l'avance sur nous."
En Nouvelle-Calédonie se pose la question de la compétence d'une telle opération. Elle ne fait pas partie du champ d'action d'un organisme de recherche selon l'IRD.
"Et pour le moment, l'acanthaster n'a aucun statut d'espèce potentiellement nuisible dans nos réglementations, contrairement à nos voisins, ajoute Pascal Dumas. Donc on ne peut rien faire et on doit passer par des arrêtés spécifiques si jamais on veut intervenir. Et ça, c'est la compétence des provinces", conclut-il.
Plongez dans le lagon avec les chercheurs de l'IRD. Un reportage de Marion Thellier et de David Sigal.