Wallis : l'inquiétante érosion du littoral et la grande marée

En 1990, une vaste plage de sable s'étendait à Utupoa. Il ne reste plus que la marne et des troncs morts
Wallis perd petit à petit son sable. Une cause naturelle -la montée des eaux- et une autre beaucoup moins naturelle, les prélèvements de l'homme. Le phénomène n'est pas nouveau mais inquiète de plus en plus. Et est très visible au moment d'une grande marée comme cette semaine.
"A cette époque-là, on vendait le sable pour des raisons économiques. Tout ce qui a été fait en ces temps-là, ce n'est qu'aujourd'hui qu'on en voit les conséquences néfastes" explique Fapiano Falelavaki, un habitant de Tekena, à Halalo, dans le sud de Wallis.
D'un geste ample il montre le banc de sable d'une étendue d'un kilomètre carré il y a cinquante ans et ennoyé progressivement par l'océan. Lucide et serein "Je  ne condamne personne. Je dis que c'est la faute à une époque où pour construire il fallait absolument prendre du sable".

Comprendre pour bien aménager

Le cri d'alarme a été poussé depuis de années par les responsables politiques relayés par les scientifiques : le littoral est chaque année un peu plus rongé par l'érosion.
En 1999 un programme de Géosciences de l'Université de Nouvelle Calédonie concernant Wallis et Futuna a été mené. Une démarche scientifique qui était sous-tendue par une volonté politique. Les responsables souhaitaient une base de données.
Indispensable pour prendre des décisions d'aménagement... ou de déménagement. Avec un objectif : proposer un shéma d'aménagement et de développement des deux îles.

Le constat est sans appel : la "déstabilisation des plages d'Uvea" est forte. En cause, le réchauffement climatique.
Les eaux du Pacifique -inexorablement-  montent. L'île de Kiribati a déjà ses "réfugiés climatiques". Les spécialistes s'accordent pour une montée des eaux d'au moins cinquante centimètres à l'horizon 2100.

Du "fale" en bois aux bâtiments en dur

L'autre cause de l'érosion est humaine. Elle a commencé bien avant la venue des missionnaires et de la civilisation européenne. Mais tout s'est accéléré avec les constructions en dur. Les "fale" et les "paito"(coins cuisines couverts) avec bien ancrés dans le sol par des poteaux de bois, les charpentes en bois également demandaient peu de sable. Depuis quelques dizaines d'années, tout s'est accéléré.
Les maisons en dur ont partout remplacé les "fale". Les bâtiments religieux, administratifs, scolaires ont pioché dans cette réserve de sable... Avec la montée des eaux, la situation devient sur certains points du littoral catastrophique.
"Moi, j'ai constaté l'érosion, tous les deux ans. Depuis 2012, j'ai au moins trois mètres qui ont été pris par la mer" constate Kimi Falelavaki, le fils de Fapiano.


Pas de "barrage contre le Pacifique"!

Aidé par son père ils tente d'enrayer le phénomène d'érosion. Ils ont installé des pneux qui récupèrent le sable au moment où les eaux l'entrainent vers le lagon. Un système"D" peu efficace... mais c'est mieux que rien pour tenter de sauver leur plage. Il poursuit :"On fait ce qu'on peut avec les moyens du bord, même si c'est pas très écologique! La question se pose pour stopper l'érosion..." Fataliste, il donne sa réponse, bien loin d'un barrage contre le Pacifique!"Moi je dirai... peut-être laisser faire la nature. Sinon, c'est monstrueux les travaux qu'il faudrait faire!"
En attendant, Fapiano et Kimi veillent sur leur banc de sable pour que personne ne vienne se servir. Sauf l'océan. Surtout à l'occasion des grandes marées.