Depuis l'enfance, Christian Kichenapanaïdou est fasciné par les objets. Les témoins tangibles d'une histoire que le temps et les évolutions technologiques ont tendance à gommer. Pour combattre l'obsolescence de la culture réunionnaise, le collectionneur sillone les routes de l'île depuis 20 ans.
Il n'était pas très grand, ni très vieux lorsque tout a commencé. "Je devais avoir une dizaine d'années, ma grand-mère avait une vieille malle toute usée et sale dont elle souhaitait se débarasser. J'ai pris sur moi de la nettoyer et de la garder jusqu'à aujourd'hui... " le souvenir est intact dans la mémoire du collectionneur.
"Je suis passé d'une cinquantaine d'objets au départ à plus de 1500 à 2000 aujourd'hui. Et je ne les compte plus vraiment... " explique Christian Kichenapanaïdou car au-delà du nombre, c'est l'usage qu'il était fait de ces objets qui captive l'attention du Réunionnais.
A quoi ça sert, comment ça marche ?
"Lorsque je montre un téléphone à cadran ou à touches à des jeunes, ils me demandent à quoi ça sert et comment ça marche ?" s'étonne Christian Kichenapanaïdou. "Cela ne fait pourtant pas si longtemps que nous avions besoin de faire appel à une opératrice pour communiquer avec un interlocuteur, c'est dire comment cela va très vite et pourquoi c'est si important pour nous d'avoir des objets pour expliquer notre histoire aux nouvelles générations".
Pour ce gardien de la mémoire, la transmission est essentielle. Elle a un double rôle. Permettre aux plus jeunes de découvrir ou de redécouvrir leurs racines. Mais aussi, donner la possiblité aux plus anciens de se remémorer des moments forts de leur histoire.
"Pendant 11 ans j'ai travaillé avec des personnes tocuhées par la maladie d'alzheimer. Le fait de leur montrer des objets qu'ils ont connus me permettait de créer du lien, d'entrer en communication. Les objets leur parlent et du coup ils parlent de ces objets. Pour moi, j'assimile ça à une thérapie... " confie Christian Kichenpanaïdou, heureux d'avoir pu apporter des sourires et partager des instants de bonheur à des patients souvent prostrés ou perdus dans leurs pensées chaotiques.
Pendant 20 ans, j'ai réalisé mon musée ambulant
Le plus déterminant pour lui c'est d'avoir pris son courage, son temps et son enthousiasme pour réaliser ce qu'il considère comme sa mission de vie. "Pendant 20 ans, j'ai mis mes objets dans le coffre de mon fourgon et j'ai silloné l'île. N'ayant pas de salle d'exposition, j'ai réalisé mon musée ambulant et je suis allé à la rencontre des gens pour leur parler de notre patrimoine" raconte l'un des acteurs culturels majeurs de notre île.
Des conférences pour 20 ans d'action militante
Sa passion aidant, il a valorisé les outils oubliés, redonné vie à des photos et expliqué les usages et les mots d'un autre temps. Un temps qu'il est heureux de célébrer cette année avec une série de conférence sur le patrimoine réunionnais. Le coup d'envoi sera réalisé au four à chaux Méralikan, à l'entrée de St-Leu, ce samedi 12 juin.
Un lieu chargé d'histoire avec un objet grandeur "nature", classé monument historique. C'est en 1995 que le dernier four à chaux de La Réunion a cessé son activité. Il y a 26 ans. "Il n'y a pas si lontemps mais beaucoup de Réunionnais ignorent comment fonctionnaitent ces fours à chaux, à quoi ils servaient et leur importance dans l'économie de l'île" confie encore Christian Kichenapanaïdou, qui a choisi le lieu avec soins pour dire toute l'importance de rester attentif à notre patrimoine, à notre culture. Autrement dit, à l'âme de La Réunion.