Tout au long du mois de juin, nous vous avons proposé une série de témoignages de personnes LGBTQIA +. Une collection que vous pouvez visionner en cliquant ici.
En Guyane, si les choses semblent évoluer, certaines expériences de vie illustrent malgré tout le chemin à parcourir. "Notre champ d’action se limite à créer une communauté de personnes aux expériences semblables, un espace safe des violences que nous pouvons subir dans l’espace social" commente l'association Yanacolorz. "Nous cherchons à rendre visible et humaniser notre communauté auprès du public, afin d’être traité avec le respect que mérite chaque être humain, ne pas être insulté, ne pas être battu, ne pas être chassé".
Le lien entre détresse psychologique, isolement, discrimination et manque de visibilité et de représentations positives des personnes LGBTQIA+ est établi.
Association Yanacolorz
- Guyane La 1ère (La 1ère) : Quel constat faîtes-vous en Guyane ? Y-a-t-il toujours autant de violences et de discriminations à l’égard des personnes concernées ?
Yanacolorz (YZ) : Les études Kap gay de l’hôpital de Cayenne réalisée en 2019 ainsi que le rapport parlementaire n°1090 sur les LGBTphobies en Outre-Mer réalisé en 2018 sont sans appel.
Seulement 18,7 % des hommes et 27,1 % des femmes sondés en Guyane estime que l’homosexualité est une sexualité comme les autres.
Association Yanacolorz
Les jeunes se définissant comme non-hétérosexuels.elles estiment que la peur de la discrimination influence leur bien-être mental pour 87 %. La Guyane reste un environnement particulièrement LGBTphobe.
Un tiers des répondant.es non hétérosexuels.elles à l'étude Kap gay disent avoir subits des actes homophobes. Il est crucial de réaliser que ces discriminations portent atteinte à la vie des personnes qui en sont victimes.
Association Yanacolorz
Ces actes homophobes entraînent dans notre communauté des risques de comportement addictifs et suicidaires accrus. Les LGBT de Guyane sont ostracisés.es, discriminés.es dans leur communauté, rejetés.es par leur famille et sont souvent contraints.es de vivre cachés.es. Aussi, notre communauté est largement invisibilisée et il est encore trop facile de dire que ce qu’on ne voit pas n’existe pas.
- La 1ère : Ces sujets concernant l’orientation sexuelle et/ou l’identité de genre restent-ils encore difficiles à aborder dans certaines communautés ici ?
YZ : Oui, ces thématiques sont tout à fait difficiles à aborder. Notre constat n’évacue pas les raisons culturelles qui pourraient favoriser les discriminations envers les personnes LGBTQIA+. Nous sommes simplement conscients que notre place n’est certainement pas de dire aux communautés de Guyane comment elles doivent vivre leur culture.
Notre combat se fait auprès des représentants.es politiques encore très frileux.ses sur ces sujets.
Association Yanacolorz
Nous souhaitons travailler de pair avec les élus.es de Saint Laurent du Maroni. Sinon, c’est auprès de toutes nos institutions publiques que nous devons nous tourner, car elles ont pour mission de promouvoir et lutter contre les discriminations.
Il s’agit pour les institutions locales de s’engager fermement dans la lutte contre les discriminations.
Association Yanacolorz
Il faudrait qu’elles affichent un soutien clair à notre communauté, qu’elles le publicisent, favorisent la création de lieux d’accueil et d’écoute, connaissent les besoins et y répondent, protègent les personnes LGBTQIA+, nous rendent visibles dans l’espace publique, les manifestations publiques, les événements qui rythment la vie guyanaise. C’est ainsi que nous ferons respecter nos droits par la société.
- La 1ère : En Guyane, vers quelles structures peut-on se tourner pour se faire accompagner ?
YZ : Le tissu associatif luttant contre les LGBTphobies en Guyane reste peu développé et il est même souvent menacé d’extinction. Les associations LGBTQIA+ par et pour les personnes LGBTQIA+ vivant en Guyane se comptent sur les doigts de la main. Il y a l’association Kaz avenir de Cayenne, "KOUROUQUEER" créée cette année à Kourou.
Autrement, nous pouvons compter sur le soutien des différentes structures et associations de santé comme Aides, le Planning Familial, le COREVIH et le réseau KIKIWI. Ces différentes structures proposent des services et un suivi de santé.
Il n’existe plus de lieu d’accueil permanent pour les mineurs LGBTQIA+ qui seraient victimes de discrimination, pas de lieu d’hébergement d’urgence pour les mineurs de notre communauté mis à la rue par leur famille. Aujourd'hui, des personnes en ont pourtant cruellement besoin.
Association Yanacolorz
- La 1ère : Avez-vous un message à faire passer ?
YZ : Nous aimerions pouvoir dire aux personnes non-hétérosexuelles et/ou non cisgenres qu’elles ont le droit d’exister, de disposer de leur corps comme elles l’entendent, d'aimer qui elles aiment et d'apparaître comme elles sont dans la société. Ce sont les droits de chacun et chacune.
Personne n’a le droit de porter atteinte à votre intégrité physique et psychique, vos familles ont le devoir de subvenir à vos besoins matériels et affectifs.
Association Yanacolorz