Eric Dupond-Moretti a profité de sa visite en Guyane pour se rendre au Suriname. Le but de ce déplacement est de coordonner la lutte contre des menaces communes aux deux pays.
« Ce territoire est spécifique avec une frontière particulière et un nombre de trafiquants extrêmement important, en raison de la géographie, il faut traiter cela », a-t-il indiqué sur le plateau du JT de ce jeudi 29 septembre.
Accompagné d'une délégation, le ministre a rencontré ce vendredi 30 septembre le président Santokhi, le ministre de la justice et de la police Kenneth Amoksi ainsi que le ministre des Affaires Étrangères Albert Ramdin. La réunion s’est tenue au ministère des Affaires Étrangères.
Les deux parties ont salué la conclusion des négociations sur l’avenant à l’accord de coopération judiciaire signé en 2021. Elles sont convenues de finaliser rapidement l’entrée en vigueur de cet accord qui devrait être ratifié très bientôt dans les deux pays, de même que l’accord de coopération policière.
Trafic de drogue
Il a été entendu qu’un groupe de travail bilatéral sera créé pour pouvoir échanger des informations et « mettre en œuvre des méthodes de coopération judiciaires efficaces en matière pénale ».
Ce groupe de travail devra se réunir au moins une fois par mois et aborder la gestion du phénomène de bout en bout, de l’évaluation de la situation à la répression, et ce à travers la mise en place d’actions concrètes sur le plan terrestre, aérien ou maritime.
Le financement de ces opérations reste à déterminer.
Lutte contre l’orpaillage illégal
Les deux parties se sont accordées sur le fait qu'il faille renforcer la mobilisation en faveur de la protection de l'environnement amazonien et de la santé publique. Un travail particulier sera fait en matière de répression d'un côté et de l'autre du fleuve. Le même groupe de travail bilatéral devra s'attacher à organiser des opérations en ce sens.
Par ailleurs, les parties ont accepté de poursuivre les échanges sur la mise en œuvre de la convention Minamata sur le mercure.
Coopération en matière pénitentiaire et lutte contre la corruption dans l’administration publique
Les échanges d'expériences et de formation seront soutenus car dans le domaine pénitentiaire, la réinsertion des délinquants pour éviter la récidive est nécessaire.
Sur cet aspect justement, une convention bilatérale pourrait être signée 2023 concernant le transfèrement des personnes condamnées, « en tenant compte de la capacité pénitentiaire du Suriname ainsi que de ses capacités financières ».
« Les ministres français et surinamais se félicitent de l’adoption de l’accord de réadmission en 2004, de l’accord de coopération policière de 2006 et de l’accord de délimitation des frontières de 2021. Ce cadre juridique ambitieux démontre la volonté mutuelle d’améliorer la gestion commune et la sécurité d’une frontière vulnérable à l’immigration irrégulière et aux trafics divers ».
« Soucieux d’assurer la pleine mise en place de ces législations, ils s’accordent sur la nécessité de leur entrée en vigueur rapide qui seule permettra de développer les échanges opérationnels et d’envisager de nouvelles actions de coopération techniques innovantes diversifiées ».
Ambassade de France au Suriname et au Guyana
Plus de moyens pour la Guyane
Il s'agit du premier déplacement en Guyane d'Eric Dupond-Moretti en tant que Garde des Sceaux. Arrivé sur le territoire ce jeudi 29 septembre, après un premier échange avec les professionnels de la justice, il n’a pas tardé à faire des annonces pour répondre entre autres au manque de moyens humains.
Affirmant prendre la mesure de l’urgence et des contraintes auxquelles font face les professionnels, il a indiqué que le renfort se ferait en trois étapes.
Dans un premier temps, 5 contractuels vont venir chez nous dans les jours prochains afin de « soulager les magistrats dans leurs tâches ».
Ensuite, le tribunal judiciaire sera doté dès le mois de janvier 2023 d’un dispositif spécifique à la Guyane : une brigade de soutien de 7 magistrats et de 3 greffiers expérimentés. Celle-ci, composée de volontaires, viendrait en appui des professionnels locaux pour une période de 6 mois. Une mesure qui satisfait à moitié la première présidente de la Cour d’Appel de Cayenne, Marie-Laure Piazza.
« Nous allons avoir des magistrats qui auront un intérêt pour le territoire puisqu’ils seront volontaires pour venir. Peut-être qu’une fois de retour dans leur juridiction d’origine, ils parleront autour d’eux de la véritable opportunité que cela représente de travailler en Guyane. Je pense donc que c’est de nature à améliorer l’attractivité mais j’ai malgré tout dit au ministre qu’au moins au niveau des fonctionnaires, il faut que l’on développe le recrutement local».
Si le ministre de la justice s’est dit ouvert à cette proposition, les professionnels présents ont également abordé la question de l’accès à la justice dans l’intérieur du pays. Sur ce point, Eric Dupond-Moretti, pragmatique a appelé à la co-construction et au dialogue pour aboutir à des solutions viables et originales.
Enfin, troisième étape, en septembre 2023, 7 magistrats du siège vont arriver sur le territoire ainsi qu’un magistrat du Parquet.
Par ailleurs, un pôle criminalité organisée, composé d’un magistrat du siège et d’un magistrat du Parquet sera créé en Guyane.
Au sujet des violences, le ministre a demandé dans la circulaire de politique territorialisée qu’il vient d’émettre, l’intensification des contrôles notamment d’identité et des véhicules. Objectif : plus de saisies d’armes destinées à la commission d’actes violents. Les déferrements seront également revus à la hausse.