ESCLAVAGE. "On oublie qu’on est libre aujourd’hui" : un collectif prône l’auto-réparation

Esclavage : Alex Lollia propose l'auto-réparation ©Marie-Lyne Plaisir et Olivier Duflo - Guadeloupe La 1ère
Une conférence sur le thème esclavage, crime contre l’humanité, s’est tenue samedi sur le site de Fouillole de l’Université des Antilles. En cette veille de la commémoration de l’abolition de l’esclavage, en Guadeloupe, les passionnés d’histoire ont une nouvelle fois ouvert le débat sur deux questions : la réparation et l’indemnisation, en faveur des peuples qui ont été opprimés durant la traite négrière. Le sujet est hautement polémique et prête à questionnements.

Hier matin (samedi 25 mai 2024), le collectif Guadeloupe éthique et démocratie a organisé, en collaboration avec le Centre d'analyse géopolitique et internationale (CAGI), une conférence, à Fouillole, sur le thème "L’esclavage : crime contre l’humanité, sens et non-sens de l’idée de réparation" et prononcée par Alex Lollia, ancien syndicaliste et professeur de philosophie à la retraite. Pour lui, la réparation s’impose comme un "impératif moral, juridique et politique". Mais cela commence, de son point de vue, par ce qu’il appelle une auto-réparation.

Durant plusieurs siècles, des millions d’Africains ont été traînés de forces dans les Amériques et les Caraïbes pour y subir une vie de servitude.
Aujourd’hui, 176 ans après l’abolition, nul ne peut nier que ce lourd passé pèse encore sur bon nombre de descendants de ces personnes réduites à l’esclavage.
Mais comment un tel héritage peut-il être réparé, par qui, et au bénéfice de qui ?

Cette période de notre histoire nous a pratiquement déshumanisés, a cassé quelque chose en nous, si bien que nous avons du mal, aujourd’hui, a constitué une communauté humaine revendiquant sa souveraineté. Si nous voulons une réparation, il faut commencer par s’auto-réparer. S’auto-réparer, c’est proclamé : « Je suis un homme libre ! Et, en tant qu’homme libre, je participe à ma communauté ». Il s’agit, non pas de continuer à alimenter des jérémiades, à contempler les plaies du passé, mais à se projeter dans le futur, pour que nous puissions avoir un pays et construire une économie, une société viable, où l’Homme pourra s’épanouir.

Alex Lollia, professeur de philosophie

Les participants à cette conférence s’accordent à dire que "nous n’y étions pas", nous descendants d’Africains réduits en esclavage, "ce sont nos ancêtres qui ont dû traverser ça".
En revanche, dire la vérité et faire largement connaître l’Histoire peut avoir valeur de réparation, notamment.

REPORTAGE/
Rédactrice : Marie-Lyne Plaisir
Reporteur d’images : Olivier Duflo
Monteur : Mohan Vaïtilingon
Mixeur : Cannelle Aimé

À PROPOS/
Le collectif « Guadeloupe, éthique et démocratie » est un regroupement strictement apolitique de citoyens ayant des intérêts matériels, affectifs et moraux en Guadeloupe, et qui souhaite agir dans un cadre collectif afin de contribuer à un avenir commun pacifié, et où les différences d'origines, de genre et d'opinions apparaissant comme une richesse plutôt que comme le terreau des divisions mortifères et dangereuses.
Le CAGI constitue un pôle de recherche en Science politique, en droit et en histoire du droit. Habilité par le ministère, il est une équipe d'accueil de l'Université des Antilles (UA). Spécialisé en Droit et Relations Internationales et notamment interaméricaines, il se consacre également à l'étude des évolutions politiques et administratives des Pays de la Caraïbe.