La scolarisation obligatoire dès l'âge de 3 ans, des classes dédoublées dans les quartiers défavorisés, des élèves davantage évalués, un bac réformé, une meilleure formation des enseignants, et surtout, un esprit d'innovation, c'est l'école souhaitée par Jean-Michel Blanquer
Les qualificatifs n'auront pas manqué à l'Assemblée pour qualifier le projet de loi présenté par le ministre de l'Education pour compléter sa volonté de réformer le système scolaire français. S'il y voit un moyen d'instaurer l'esprit d'une école de la confiance, ses adversaires parlent plus volontier d'autoritarisme et notamment sur l'expression livre des enseignants.
Pourtant, le projet ne laisse pas les parlementaires insensibles. Plus d'un milliers d'amendements ont été déposés depuis le début de cet examen par l'Assembléedes 25 articles du texte proposé par Jean-Michel Blanquer. Le vote solennel doit intervenir mardi prochain.
Parmi les points déjà actés, nous avons retenu 10 mesures-phares qui seront mise en oeuvre dans le cadre de cette réforme :
1- Parmi les mesures "pilliers" de cette réforme, la scolarisation des enfants dés l'âge de 3 ans.
De ce fait, l’âge de l’instruction obligatoire passe de 6 à 3 ans pour tous les enfants. En fait, il s'agit d'une uniformisation des pratiques puisque, en France la quasi-totalité des enfants de 3 ans (97,6%) est scolarisée. Elle portera donc sur les 26.000 petits élèves qui ne le sont pas encore. Le ministrère s'apppuie en cela sur des études qui laisse apparaître
qu’il existe une forte corrélation entre la fréquentation d’un établissement pré-élémentaire et la performance des élèves ».
Mais l'application de cette mesure aura un coût, notamment pour les collectivités locales en charge de ce niveau de scolairsation : elles seront désormais tenues de subventionner les écoles maternelles privées.
2- La pratique de l'école à la maison sera plus contrôlé.
La loi permettait aux parents qui choisissent d'assurer l'instruction de leurs enfants à la maison de n'avoir à se soumettre qu'à un seul contrôle par an, par l'éducation nationale. Désormais, la loi prévoit que " le contrôle se déroule en principe au domicile où l’enfant est instruit". Elle permet à l’inspecteur de "mettre en demeure les personnes responsables de l’enfant d’inscrire ce dernier dans un établissement d’enseignement scolaire public ou privé si elles refusent deux contrôles de suite", sans motif légitime. "Le représentant de l’État en matière d’éducation doit pouvoir faire vérifier, au moins une fois par an, que l’enseignement assuré est conforme au droit de l’enfant à l’instruction et que l’instruction dispensée au même domicile l’est pour les enfants d’une seule famille"
3- Homoparentalité dans les formulaires
A l'initiative des députés, un amandement proposé, contre l'avis du gouvernement, par la REM, a été adopté. Il prévoit de remplacer les mentions "père" et "mère" par "parent 1" et "parent 2", afin de prendre en compte les situations des familles "dans leur diversité".
4- Inscription du droit à une scolarité sans harcèlement
En France, un élève sur dix est concerné par le harcèlement scolaire. C’est pourquoi un amendement, déposé par le MoDem, souhaite inscrire dans le droit à l’Éducation le droit à une scolarité sans harcèlement. La proposition a été adoptée mardi avec le soutien général des députés. Les sanctions disciplinaires applicables en cas de harcèlement scolaire seront fixées par décret en Conseil d’État. Parmi elles figure l’obligation pour le harceleur d’accomplir un stage de sensibilisation au harcèlement scolaire.
5- Recrutement des assistants d'éducation
Le recrutement d’enseignants devient critique dans certaines disciplines comme les mathématiques, les lettres, l’anglais et l’allemand. Le gouvernement veut désormais confier des fonctions d’enseignement rémunérées dès la deuxième année de licence, aux assistants d’éducation, qui exercent aujourd’hui des missions de surveillance, à condition qu’ils préparent le concours. L'idée est de développer ces prérecrutements pour améliorer l'attractivité du métier.
6- Réforme des écoles de formation des enseignants
Les Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Espé), créées en 2013 par Vincent Peillon, devraient devenir des Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé). Les directeurs seront nommés par arrêté conjoint des ministres de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, tandis que jusqu’à présent, cette nomination se faisait sur proposition du conseil de l’Espé
7- Le devoir "d’exemplarité" de la part des enseignants
C'est d'ailleur le tout premier article du projet de loi; il rappelle le devoir d’ "exemplarité" dans l’exercice de leurs fonctions du personnel éducatif. Le ministre souligne en ce sens l’engagement nécessaire de la communauté éducative au service d’une "école de la confiance". La mesure a fait réagir très vivement certains syndicats d’enseignants qui y voient une volonté du gouvernement de réduire leur liberté d’expression. Le ministre lui a souligné que "cette loi n’est pas faite" pour museler les enseignants. Il ajoute d'ailleurs qu'en la matière, sur le plan juridique, ils ont déjà à observer un devoir de réserve.
8- Renforcement du statut des personnels accompagnant les élèves en situation de handicap (AESH)
Cette mesure marque la fin du recrutement d’AESH en contrats aidés. A partir de septembre prochain, tous seront embauchés en CDD de 3 ans, renouvelable une fois. A l’issue de ces deux contrats, "il sera possible d’obtenir un CDI", indique Jean-Michel Blanquer. Ce renforcement du statut permettra "d’éviter les ruptures d’accompagnement en milieu d’année scolaire, puisque les contrats aidés s’arrêtaient parfois en avril ou en mai ", ajoute Sophie Cluzel. En outre, lundi après-midi, dans l'hémicycle, le ministre de l'Education nationale a annoncé la création de "80 000 agents publics (...) qui, en toutes circonstances, sur le temps scolaire et périscolaire, accompagnent les enfants."
9- Une plus grande possibilité d'innover
Dans son article 8, le projet de loi prévoit de regrouper les textes relatifs à l'expérimentation dans un seul chapitre. Il autorise également l'organisation d'expérimentations dans les écoles publiques et privées sous contrat et étend les domaines d'expérimentation à l'organisation des "horaires d'enseignement" et "aux procédures d'orientation des élèves". L'étude d'impact précise que cela permettrait «une organisation de l'emploi du temps des élèves échappant partiellement au strict rythme hebdomadaire." Le deuxième nouveau domaine qui pourra faire l'objet d'expérimentation est les "procédures d'orientation", ce qui permettrait, selon l'étude, de "donner le dernier mot à la famille."
10 - Création d'établissements locaux d'enseignement international
Dans l'étude d'impact menée par le ministère de l'Education Nationale pour élaborer ce projet, il est clairement mis en évidence que "l'existence d'une offre éducative internationale est clairement mise en évidence comme l'un des facteurs clefs pour les entreprises tant dans le choix de leur implantation que dans leur capacité de recrutement au niveau international". De ce fait, le projet de loi prévoit la création d'établissements publics locaux d'enseignement international (article 6) qui tend à "généraliser l'expérience" de l'École européenne de Strasbourg. Ces établissements préparent soit à l'option internationale du diplôme national du brevet et à l'option internationale du baccalauréat, soit au baccalauréat européen. Ces établissements pourront recevoir "des dotations versées par l'Union européenne, d'autres organisations internationales et des personnes morales de droit privé", à savoir des entreprises ou des associations.