15 ans après sa disparition, les proches et les compagnons de route de Jacques Bino toujours en quête de la vérité

Cérémonie hommage à Jacques Bino, Petit-Canal, 17 février 2024
Dans la nuit du 17 au 18 février 2009, Jacques Bino, syndicaliste, était tué d'une balle en pleine poitrine, alors qu'il venait de quitter un meeting du LKP. À cette époque, la Guadeloupe est paralysée contre une grève générale contre la vie chère. Son meurtrier n'a jamais été arrêté, malgré un procès retentissant. Ce samedi matin, la CGTG rendait hommage à Jacques Bino.

La mémoire de Jacques Bino reste vivante... Quinze après son décès, une cérémonie était organisée, à Petit-Canal, sa commune, par la Confédération générale du travail de la Guadeloupe. 

La famille, les amis, les anciens collègues et camarades militants, tous réunis pour rendre hommage à l’agent fiscal de 50 ans, représentant syndical impliqué au sein du LKP, décédé le 18 février 2009, après avoir reçu une balle, à Pointe-à-Pitre.

Un terrible soir pour Cédric, son fils unique, âgé de 8 ans aux moments des faits. Âgé aujourd'hui de 23 ans, le jeune homme se souvient encore de cette nuit qui a bouleversé sa vie. L'annonce faite par sa mère en pleurs, l'emballement médiatique, le défilé des politiques à leur domicile...

©Guadeloupe

Pour lui, comme pour les membres de sa famille, rester dans l'inconnu est une épreuve supplémentaire. Le meurtrier de Jacques Bino court toujours et de nombreuses questions demeurent sans réponses. 

Pour Jean-Marie Nomertin, secrétaire général de la CGTG, la mort du syndicaliste fait écho à d'autres événements tragiques de Guadeloupe : 1967 et la grève de février 1974 qui verra la mort de deux militants. Cette cérémonie en hommage à Jacques Bino était également l'occasion de réclamer justice et vérité. 

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Le rappel des faits

Son décès figure parmi les faits marquants de la grève générale de 2009.
Dans la nuit du mardi 17 au mercredi 18 février 2009…
C’est après un rassemblement de militants du "Lyannaj Kont Pwofitasyon" – dont le mouvement était de plus en plus émaillé de violences urbaines – alors que tous se séparaient que des coups de feu ont retenti, peu après minuit, dans une artère de la ville de Pointe-à-Pitre.
Jacques Bino et son passager, son ami Peter O'Brien, étaient à bord de la voiture du syndicaliste. Il est au volant et amorce un demi-tour devant un barrage tenu par des hommes cagoulés dans un quartier populaire lorsque son véhicule est touché par trois balles. L’une d'elles traverse son pare-brise…
L’agent fiscal la reçoit en pleine poitrine. Il décède rapidement de cette blessure. 

Était-il visé ? L’a-t-on confondu avec une autre cible ? Étaient-ce des balles perdues ?
L'enquête et la justice n’ont pas permis de le savoir.

Côté LKP, Jacques Bino est alors érigé en martyr…
Les Guadeloupéens se rendent massivement à ses obsèques, le 22 février 2009…  Evènement solennel… Évènement aussi surmédiatisé célébré en présence de l’ancienne candidate à la présidentielle française, Ségolène Royal qui en a profité pour critiquer la politique de Nicolas Sarkozy.

La mort du militant précipite alors les négociations. Un premier accord est signé le 26 février 2009, suivi d'un deuxième le 4 mars mettant fin à 44 jours de grève générale qui ont paralysé l'île. Des accords qui portent le nom de Jacques Bino, en son hommage.

Un meurtre toujours sans coupable

Parallèlement, les autorités ont très vite pointé du doigt des bandes de jeunes, armés, ayant pris possession des rues et élevé des barricades.

Le seul homme inquiété, dans cette affaire : Ruddy Alexis, soupçonné d’être l’auteur du coup de feu mortel. Il n’a jamais reconnu le crime. Père de famille, âgé de 35 ans au moment des faits, s’il a commis des erreurs dans sa jeunesse, n’a plus eu le moindre démêlé avec la justice depuis des années.

Ruddy Alexis est acquitté en première instance, au tribunal de Basse-Terre, en 2012. Puis, en appel, en avril 2014, alors que le Parquet avait demandé la délocalisation du procès, à Paris, "pour la sérénité des débats". Ce qui avait provoqué un tollé en Guadeloupe.

Depuis, la principale question demeure : qui a tué Jacques Bino ?