C’est l’un des événements majeurs de la rentrée littéraire. Maryse Condé publie cette fois un récit de vie, tourbillonnant entre l’Europe et l’Afrique. Fascinant.
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C’est le troisième récit autobiographique de Maryse Condé. Après Le cœur à rire et à pleurer (Laffont, 1999), qui racontait son enfance, après avoir livré l’histoire de sa grand-mère et de sa mère dans Victoire, les saveurs et les mots (Mercure, 2006), voici La vie sans fards (Lattès, 2012), une plongée dans l’univers de la jeune adulte qu’elle a été.
Une nouvelle fois, Maryse Condé réussit la prouesse d’abolir toute distance d’avec le lecteur. Dès le début, celui-ci est plongé dans l’atmosphère intimiste de la narration biographique d’un auteur qui ne cache pourtant pas, dès les premières lignes, son droit à la fiction : « Pourquoi faut-il que toute tentative de se raconter aboutisse à un fatras de demi-vérités ? Pourquoi faut-il que les autobiographies ou les mémoires deviennent trop souvent des édifices de fantaisie d’où l’expression de la simple vérité s’estompe, puis disparaît ? Pourquoi l’être humain est-il réellement désireux de se peindre une existence aussi différente de celle qu’il a vécue ? ».
Cette fois-ci, le titre donne une indication du contenu de l’ouvrage. Avec La vie sans fards, les codes et les convenances sont brisés pour faire place à une nouvelle vérité assénée par l’auteur dans un souci –apparemment neuf-, de se livrer, enfin. Ainsi, par exemple, apprend-on que la rencontre avec Mamadou Condé, l’artiste-comédien, en train de jouer les Nègres de Genet, n’est-elle qu’une fable.
La véritable rencontre, l’homme tel que sa femme le décrit, tout est différent de ce que la critique a généralement dit. Cette fois-ci, tout est dit. Tout ? Bien sûr que non, mais qu’importe ! La romancière nous entraine dans une épopée bien particulière. C’est qu’il s’agit de son épopée, celle de sa propre vie, alors qu’elle devenait tout juste adulte.
Les hommes
Qu’est-ce qui importe pour une jeune fille alors qu’elle devient femme ? L’amour, me direz-vous. Eh bien, Maryse Condé livre tout au long de l’ouvrage ses amours et les chaos qu’elles génèrent, avec une simplicité au goût sincère et surprenant. Tout en finesse, l’auteure, tour à tour, se pose en victime, puis en bourreau, puis de nouveau en victime. Les hommes, pour sûr, ont compté dans la vie de Maryse Condé.
Elle nous dépeint chacun de ceux qu’elle a connu, avec ses yeux de femme aimée, délaissée aimante, amante. Mais elle nous parle aussi d’elle en tant que femme peu aimante. Ses blessures sont connues de toutes les femmes et celles qu’elle inflige parfois, sont également connues des hommes. En cela, l’universalité des situations et des histoires, amène une lecture où le lecteur peut se projeter.
La politique
Cependant, il s’agit bien d’une épopée. Et autour des histoires d’amour, l’on croise de hauts personnages politiques, tel Sékou Touré, en Guinée où l’auteur a vécu. D’une figure plutôt plaisante, Sékou Touré devient le despote sanguinaire que l’on connaît. Après la Guinée, le Ghana où, cette fois, un coup d’état est perpétré. Les événements violents qui jalonnent l’histoire des pays où Maryse Condé a vécu, interviennent en filigrane.
Littérature, bien sûr
Lorsqu’un écrivain se livre à l’exercice du récit de vie, il y livre facilement ses références littéraires. Dans le cas de Maryse Condé, nous savions déjà qu’elle était sous le charme de Franz Fanon, d’Aimé Césaire et des écrivains de la Négritude. Cette fois-ci, elle nous parle avec fougue de son admiration pour René Maran, écrivain guyanais qui, au début du 20ème siècle, avait écrit sur l’Afrique noire.
On y découvre tout aussi bien le plaisir qu’elle a eu à lire Paul Hazoumé et son roman Doguicimi, sur le Dahomey ; on y voit Wole Soyinka dont la dramaturgie lui est familière. Le tour d’horizon littéraire proposé par Condé se construit en parallèle avec sa propre vie.
Le renouveau
Dans cet ouvrage, la jeune Maryse Boucolon devient tout simplement Maryse Condé, l’écrivain, qui s’est nourrie de Guinée, du Dahomey, du Sénégal, du Ghana, de Londres et aussi de Paris. Les voyages et les rencontres sont présentés comme véritables, même si l’on sait bien que toute autobiographie, même basée sur des faits réels, n’est que fiction. Pour autant, la réalité existe bien dans ce livre, la présence des quatre enfants de l’auteur en atteste.
Et la suite ?
Le lecteur regrettera cependant que La vie sans fards s’arrête au moment où Maryse Condé rencontre celui qui deviendra son mari, l’anglais Richard Philcox. A partir de là, silence radio ! Maryse Condé a été très diserte sur sa vie amoureuse qui a précédé sa rencontre avec celui qui est aussi devenu son traducteur. Mais sur sa vie avec Richard Philcox, rien. Nada. Gageons que ce tournant de sa vie fera l’objet à lui seul, d’un second volume de La vie sans fards.
La Vie sans fards, de Maryse Condé est à lire sans modération, illico !
Une nouvelle fois, Maryse Condé réussit la prouesse d’abolir toute distance d’avec le lecteur. Dès le début, celui-ci est plongé dans l’atmosphère intimiste de la narration biographique d’un auteur qui ne cache pourtant pas, dès les premières lignes, son droit à la fiction : « Pourquoi faut-il que toute tentative de se raconter aboutisse à un fatras de demi-vérités ? Pourquoi faut-il que les autobiographies ou les mémoires deviennent trop souvent des édifices de fantaisie d’où l’expression de la simple vérité s’estompe, puis disparaît ? Pourquoi l’être humain est-il réellement désireux de se peindre une existence aussi différente de celle qu’il a vécue ? ».
Cette fois-ci, le titre donne une indication du contenu de l’ouvrage. Avec La vie sans fards, les codes et les convenances sont brisés pour faire place à une nouvelle vérité assénée par l’auteur dans un souci –apparemment neuf-, de se livrer, enfin. Ainsi, par exemple, apprend-on que la rencontre avec Mamadou Condé, l’artiste-comédien, en train de jouer les Nègres de Genet, n’est-elle qu’une fable.
La véritable rencontre, l’homme tel que sa femme le décrit, tout est différent de ce que la critique a généralement dit. Cette fois-ci, tout est dit. Tout ? Bien sûr que non, mais qu’importe ! La romancière nous entraine dans une épopée bien particulière. C’est qu’il s’agit de son épopée, celle de sa propre vie, alors qu’elle devenait tout juste adulte.
Les hommes
Qu’est-ce qui importe pour une jeune fille alors qu’elle devient femme ? L’amour, me direz-vous. Eh bien, Maryse Condé livre tout au long de l’ouvrage ses amours et les chaos qu’elles génèrent, avec une simplicité au goût sincère et surprenant. Tout en finesse, l’auteure, tour à tour, se pose en victime, puis en bourreau, puis de nouveau en victime. Les hommes, pour sûr, ont compté dans la vie de Maryse Condé.
Elle nous dépeint chacun de ceux qu’elle a connu, avec ses yeux de femme aimée, délaissée aimante, amante. Mais elle nous parle aussi d’elle en tant que femme peu aimante. Ses blessures sont connues de toutes les femmes et celles qu’elle inflige parfois, sont également connues des hommes. En cela, l’universalité des situations et des histoires, amène une lecture où le lecteur peut se projeter.
La politique
Cependant, il s’agit bien d’une épopée. Et autour des histoires d’amour, l’on croise de hauts personnages politiques, tel Sékou Touré, en Guinée où l’auteur a vécu. D’une figure plutôt plaisante, Sékou Touré devient le despote sanguinaire que l’on connaît. Après la Guinée, le Ghana où, cette fois, un coup d’état est perpétré. Les événements violents qui jalonnent l’histoire des pays où Maryse Condé a vécu, interviennent en filigrane.
Littérature, bien sûr
Lorsqu’un écrivain se livre à l’exercice du récit de vie, il y livre facilement ses références littéraires. Dans le cas de Maryse Condé, nous savions déjà qu’elle était sous le charme de Franz Fanon, d’Aimé Césaire et des écrivains de la Négritude. Cette fois-ci, elle nous parle avec fougue de son admiration pour René Maran, écrivain guyanais qui, au début du 20ème siècle, avait écrit sur l’Afrique noire.
On y découvre tout aussi bien le plaisir qu’elle a eu à lire Paul Hazoumé et son roman Doguicimi, sur le Dahomey ; on y voit Wole Soyinka dont la dramaturgie lui est familière. Le tour d’horizon littéraire proposé par Condé se construit en parallèle avec sa propre vie.
Le renouveau
Dans cet ouvrage, la jeune Maryse Boucolon devient tout simplement Maryse Condé, l’écrivain, qui s’est nourrie de Guinée, du Dahomey, du Sénégal, du Ghana, de Londres et aussi de Paris. Les voyages et les rencontres sont présentés comme véritables, même si l’on sait bien que toute autobiographie, même basée sur des faits réels, n’est que fiction. Pour autant, la réalité existe bien dans ce livre, la présence des quatre enfants de l’auteur en atteste.
Et la suite ?
Le lecteur regrettera cependant que La vie sans fards s’arrête au moment où Maryse Condé rencontre celui qui deviendra son mari, l’anglais Richard Philcox. A partir de là, silence radio ! Maryse Condé a été très diserte sur sa vie amoureuse qui a précédé sa rencontre avec celui qui est aussi devenu son traducteur. Mais sur sa vie avec Richard Philcox, rien. Nada. Gageons que ce tournant de sa vie fera l’objet à lui seul, d’un second volume de La vie sans fards.
La Vie sans fards, de Maryse Condé est à lire sans modération, illico !