Dans une atmosphère de tension idéologique entre pro et anti-vaccin inédite en Guadeloupe et en France Hexagonale, la moindre étincelle fait partir un feu général. Et cette étincelle, prend la forme d’une vidéo de 27 secondes dans laquelle Alexandre Rochatte, le préfet de Guadeloupe et Valérie Denux, la directrice de l’ARS, posent les derniers jalons de la communication à adopter dans le cadre de l’annonce d’un troisième confinement sur fond de flambée épidémique. Le préfet veut un ton « grave, catastrophique, mais pas moralisateur. »
La vidéo a fuité quelques heures à peine après la conférence de presse, a été partagée de nombreuses fois sur tous les réseaux sociaux, alimentant la colère des citoyens qui s’opposent à la gestion actuelle de la crise sanitaire. Ils y voient la preuve d’une manipulation de masse devant mener à l’acceptation de la vaccination obligatoire.
Sur Twitter, ceux qui se proclament désormais comme leurs soutiens politiques (essentiellement de l'extrême-droite) se sont empressés de réagir, dénonçant notamment une « politique de la peur » ou encore « communication morbide ».
Incroyable ! Le préfet de Guadeloupe avant la conférence de presse dicte le ton à la directive de l’ARS, ne se sachant pas enregistré : « On adopte un ton grave et catastrophique ! »
— Florian Philippot (@f_philippot) August 3, 2021
La politique de la PEUR ! Indigne ! ⤵️ pic.twitter.com/ZglEsNzApG
#Guadeloupe, le #Préfet règle son show avec la directrice de l'#ARS :
— N. Dupont-Aignan (@dupontaignan) August 3, 2021
« On adopte un ton grave et catastrophique »
La communication morbide des autorités prise en flagrant délit d’indécence.
Cette volonté d’angoisse permanente est la clé de voûte du #populisme étatique ! pic.twitter.com/jjryQDki0n
« J’assume ce que j’ai dit »
Si Alexandre Rochatte précise que cet extrait, enregistré en marge de la conférence de presse, « n’était pas censé être diffusé », il dit tout de même « assumer complètement » ses propos.
« La vérité c’est que la situation est catastrophique et c’est une réalité que nous devons exprimer avec l’ARS. Nous avons atteint trois fois le pic du mois dernier, et si nous continuons sur cette courbe, nous aurons 10 000 cas positifs la semaine prochaine. Je ne sais pas si les gens se rendent compte de l'impact de ces chiffres. »
Loin d’être une hyperbole, l’adjectif « catastrophique » décrierait donc de manière précise la situation sanitaire actuelle du département selon les autorités de santé. Interrogé sur les réactions de ses détracteurs, le préfet se dégage rapidement du débat politique. « Les polémiques politiciennes ne m’intéressent pas. Ce qui m’importe c’est bien la situation sanitaire du département qui est, je le répète, catastrophique. ».
Rupture de communication
Mais cette polémique montre bien à quel point le dialogue entre les autorités et les citoyens est compliqué. À chaque conférence de presse, les décisions et les constats de l'ARS et de la Préfecture sont toujours plus contestés, voire même moqués. Un septicisme que le Préfet a bien entendu remarqué mais auquel il entend répondre par les faits.
« À ceux qui estiment que nous communiquons de faux chiffres, je leur demande d’aller au CHU, ou de se renseigner dans leur entourage. Car sur une île, lorsqu’il y a 3 000 cas par semaine, vous avez forcément parmi vos proches, des personnes positives ou qui ont été cas contact. »
Par ailleurs, il continue de défendre sa méthode qui, selon lui, n’est pas aussi décriée que l’on veut bien le croire.
« Je crois qu’il y a une grande partie de la population qui n’écoute pas les informations erronées que l’on voit passer. Je reçois de nombreux messages de soutien vis-à-vis des mesures que nous prenons pour gérer cette crise sanitaire. De plus, je continue à travailler en concertation avec les élus et le monde économique à chaque étape ».
À son arrivée, Alexandre Rochatte a voulu promouvoir une méthode basée sur la discussion et la concertation. Un cap compliqué à garder alors que toutes les décisions prises par les autorités pour tenter de juguler la flambée épidémique, sont vécues, par une partie de la population, comme autant de punitions injustifiées.