Canne : l’Etat et des collectivités annoncent une augmentation de la prime bagasse de 1,90€ par tonne

La proposition de l'Etat et des collectivités est loin de satisfaire Roméo Meynard, président de l'UDCAG, solidaire du Kolèktif des Agriculteurs, à l'orinigie de la mobilisation dans le secteur cannier.
Limités par leur marge de manœuvre, l’Etat, la Région et le Département de la Guadeloupe font un retour aux planteurs, à l’issue des nombreuses réunions organisées durant la semaine, avec les acteurs du secteur cannier. La prime bagasse sera augmentée de 1,90€ par tonne. Pour le reste, ils n’ont pas la main, mais assurent que les usiniers se sont engagés à partager le bénéfice réalisé, non plus exclusivement sur le sucre en vrac, mais aussi sur la mélasse, la bagasse et les sucres spéciaux.

Après moult échanges, entre planteurs, entre les différents acteurs de la filière canne-sucre, notamment avec les services de l’Etat, les collectivités régionale et départementale et les usiniers de la Guadeloupe dite "continentale", le week-end est décisif. Les producteurs mécontents, du fait de leurs faibles revenus, se satisferont-ils des propositions faites à l’issue des échanges, ou iront-ils au bout de leur menace : bloquer l’archipel et empêcher l’ouverture de la campagne sucrière 2024 ?

L’ensemble des planteurs sont invités à une grande réunion, demain (dimanche 25 février 2024), à 9h00, à la maison des agriculteurs de Petit-Canal. Pour le Kolèktif des Agriculteurs (KDA), à l’origine du mouvement de mécontentement, mais qui représente une minorité de professionnels, "seule une mobilisation de masse permettra d’augmenter le prix de la tonne de canne".

En attendant, l’Etat, la Région et le Département ont rendu une copie commune. Leur communiqué de presse vient d’être expédié aux rédactions, après une réunion organisée vendredi.

Des "efforts déjà entrepris"

En préambule, le préfet Xavier Lefort, le président de la Région Guadeloupe Ary Chalus et son homologue au département Guy Losbar "reconnaissent que cette filière constitue un pilier de l’économie agricole et joue un rôle essentiel dans l’aménagement du territoire guadeloupéen" ; d’où leur volonté de soutenir le secteur et de "lui redonner des perspectives".

Lors de la signature de la Convention canne 2023-2028, le 1er avril 2023, la rémunération de la tonne de canne revenant au planteur a subi une "augmentation sans précédent de 30%", portée au maximum à 109€ en Grande-Terre et en Basse-Terre et à 99,59€ à Marie-Galante, rappellent les exécutifs. Un tarif qui dépend de la richesse saccharine de la canne livrée.

Les planteurs prétendent à un minimum de 160€/tonne, un prix fixe revendiqué, en attendant la révision de la Convention canne 2023-2028, qui n'est pas figée.
Mais, de l'avis de Bruno Wachter, président de l'interprofession guadeloupéenne pour la canne-à-sucre (Iguacanne), accéder à cette demande reviendrait à mettre l'ensemble de la filière en faillite, dans la mesure où il faudrait alors rassembler 25 millions d'euros, soit la totalité du chiffre d'affaire de l'usine de Gardel, qui doit faire face à bien d'autres charges.
Pour cet acteur majeur de la canne en Guadeloupe, le problème est ailleurs : seuls les gros planteurs peuvent tirer leur épingle du jeu et être autonomes financièrement, en l'état actuel des choses.

Un effort qui "va être poursuivi" en 2024

D’autres évolutions, au bénéfice des planteurs sont annoncées ; de quoi augmenter encore leurs gains.

"La quasi-totalité de la prime bagasse va être reversée aux planteurs (12/13ème) soit 1,90€ supplémentaire par tonne", est-il promis. Le treizième restant comblera les frais de gestion et de contribution au Centre technique de la canne et du sucre (CTCS).
À ce jour, cette prime versée par l’Etat s’élève à 10/13ème des 14,50€ par tonne de canne livrée.

En réponse à la demande prioritaire des producteurs, à l’attention de l’usine de Gardel, à savoir le partage équitable des richesses issues de la canne, Etat, Région et Département se font moins précis :

Les industriels se sont engagés dans une démarche de partage de la valeur et du bénéfice réalisés sur les différents coproduits issus de la canne. Un protocole spécifique sera établi en ce sens, avant la fin de la campagne 2024 et devra être mis en œuvre dès cette année, en fonction du résultat économique des entreprises.

Communiqué de l’Etat, de la Région et du Département

Les militants mobilisés dénoncent aussi le mode d’évaluation de la richesse saccharimétrique de leur production, exclusivement géré par l’usinier. Sa révision est d'ailleur d'ores et déjà prévue dans le cadre de la convention canne 2023-2028.

Le travail de contrôle et d’expertise devra se poursuivre, en associant les experts rédacteurs de l’étude financée par la Région et d’autres experts pouvant apporter des compétences complémentaires. Ce travail devra être conduit à la fois sur la méthode et le protocole de mesure, ainsi que sur la formule de calcul de la richesse saccharimétrique.

Communiqué de l’Etat, de la Région et du Département

État et collectivités, qui mettront en place un comité de suivi des chantiers précités, plaident pour l’ouverture effective de la campagne sucrière. Les dates arrêtées (le 1er mars en Guadeloupe dite "continentale" et le 14 à Marie-Galante) correspondent à la période de pic de richesse saccharine des cannes.

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Roméo Meynard, président de l’UDCAG, solidaire du mouvement de grogne du Kolèktif des Agriculteurs, était l'invité de Jérôme Boécasse, dans le journal "Guadeloupe Soir" du samedi 24 février 2024. Pour lui, le compte n'y est pas et il doute que la campagne puisse débuter dans les conditions actuelles. Les professionnels mécontents décideront demain, ensemble, des suites à donner à leur mobilisation.

Roméo Meynard, président de l’UDCAG, solidaire du Kolèktif des Agriculteurs ©Interview de Jérôme Boecasse - Guadeloupe La 1ère