Des enfants déboussolés
Que n'ont pas entendu les parents, de la bouche de leurs enfants, en ces temps de confinement et à l'approche du déconfinement ?!
En fonction des foyers et des contraintes de chaque famille, il y a eu de quoi rire et pleurer, de quoi réfléchir dans tous les cas.
Le coronavirus c'est super ! On est tous à la maison !
Trop bien les vacances !
De toutes les façons, je n'aimais pas l'école.
Tu fais mieux l'école que le maître !
Je m'ennuie tout le temps.
Vous m'avez laissé tomber...
Vous êtes occupés et moi je sers à rien.
Pourquoi je ne pourrai plus jouer et toucher ma copine ?
Je ne veux plus aller à l'école. Je veux rester avec Papa et Maman.
J'ai peur d'aller attraper le coronavirus et de vous tuer avec.
Je pourrais garder ma tablette à l'école ?
Vous m'avez laissé tomber...
Perdus, voire perturbés par le flot d'informations qu'ils captent tout au long de la journée et par le changement brutal de leurs habitudes, certains ont trouvé leur compte dans cette situation, d'autres non.
Deux cas de figure, donc :
- Si le confinement s'est bien passé
Si la période de confinement, synonyme de "pause" particulièrement longue, s'est bien passée, les enfants n'auront pas envie de revenir à une "vie ordinaire".
Pour les plus petits, retourner en crèche ou à la maternelle sera équivalent à une rentrée scolaire et le déchirement de la séparation d'avec les parents sera la même qu'en septembre. Les angoisses caractéristiques de ce moment clé, dans la vie d'un enfant, seront réactivées.
Les cycles auront du mal à se remettre en place : sommeil, appétit, tonus, etc.
- Si le confinement s'est mal passé
Ceux qui ont mal vécu le confinement voudront reprendre le cours de leur vie d'avant le 13 mars 2020 (jour où les écoles de France ont été fermées).
Mais l'obligation de respecter les gestes barrière risque d'être mal vécue ; alors qu'ils ne demandent qu'à renouer avec leurs habitudes, ils en seront empêchés.
Dans les deux cas, s'il y a reprise de la scolarité, gare aussi au sentiment d'échec, chez l'enfants qui, après tout ce temps de confinement, aura du mal à se remettre au travail. Il peut ne pas se sentir au niveau et tomber dans la dévalorisation de soi, la culpabilité et le manque de confiance ; des terrains favorables à la dépression. La page ne se tournera pas du jour au lendemain,
Il existe des symptômes parlants : maux de tête ou de ventre ; des symptômes somatiques, qui nécessiteront l'accompagnement d'un professionnel.
(Dr Caroll DEVAUX, chef de service de Pédopsychiatrie EPSM Guadeloupe)
Des parents désemparés
L'équilibre des enfants dépend de celui de leurs parents. Des parents inquiets et anxieux transmettent inévitablement leurs appréhensions à leur progéniture.
D'où le conseil du Docteur Caroll DEVAUX, chef de service de Pédopsychiatrie, au sein de l'établissement public de santé mentale (EPSM) de Guadeloupe :
Le bien être psychologique de vos enfants dépend de vous. Parents, prenez soin de vous.
(Dr Caroll DEVAUX, chef de service de Pédopsychiatrie EPSM Guadeloupe)
Attention aussi aux discours qui méritent d'être nuancés et bien expliqués du type :
Les écoles vont rouvrir, mais tu n'iras pas, car tu n'y seras pas en sécurité.
Ou :
Tu vas retourner à l'école, mais tu ne dois t'approcher de personnes, faire attention à ce que tu touches, garder un masque, te laver les mains après chaque manipulation, ne pas jouer, ne pas prêter tes affaires, etc.
Quant au déconfinement, les craintes ne vont pas s'apaiser avec le temps, tant pour les parents que pour les enfants
Plus on attend et plus l'angoisse augmente. Il y a des gens qui se disent : "Moi, je serai prêt en septembre". Et en septembre ce sera pire !
(Dr Caroll DEVAUX, chef de service de Pédopsychiatrie EPSM Guadeloupe)
L'importance de l'échange
Quelle que soit la manière dont s'est passé le confinement, les enfants ont-ils pu exprimer leur ressenti ?
Alors que le déconfinement progressif est annoncé, a-t-on pensé à leur demander s'ils voulaient retourner à l'école ?
Les espaces d'échange, au sein des familles, est primordial. Cela, même s'il appartient aux parents de prendre les décisions... et de les expliquer.
Il faut permettre à l'enfant d'exprimer ses souhaits, ses craintes, etc. Il faut, donc, qu'il sente qu'il peut se permettre de dire ce qu'il ressent.
Quant aux parents, il leur incombe d'écouter, d'entendre, de comprendre, de répondre, d'expliquer, de rassurer, d'accompagner.
Certes, pour diverses raisons, cela est loin d'être simple à mettre en place.
Le fait est que la vie ne peut se poursuivre, comme si de rien n'était si, par exemple, l'enfant a éprouvé un sentiment d'abandon, un sentiment d'ennui, ou a considéré que l'on a pas répondu à ses besoins et attentes. Souvent, il suffit de relativiser la situation pour désamorcer le mal-être.
L'enfant ne parlera que s'il se sent autorisé à le faire, au sein de sa famille où son mal-être a été ressenti.
Ceux qui garderont leurs sentiments négatifs sous silence risquent de le vivre comme un micro-traumatismes, en gardant en mémoire qu'ils se sont sentis mal, que l'on n'a pas répondu à leurs besoins, ni attentes. Autant de pensées à lever... mais cela prendra plus de temps, faute d'espace d'échange spontané.
(Dr Caroll DEVAUX, chef de service de Pédopsychiatrie EPSM Guadeloupe)
Les services d'accompagnement sont à la disposition des familles.
Les cas extrêmes : quand la violence s'invite
Le confinement laissera des traces de manière autrement plus grave, dans les familles où la violence s'est invitée. Cela a été le cas au sein de familles déjà identifiées et faisant l'objet d'un accompagnement... mais pas seulement.
Le point avec le Docteur Caroll DEVAUX, chef de service de Pédopsychiatrie EPSM Guadeloupe :
L'établissement public de santé mentale (EPSM) de Guadeloupe est joignable au 0590 80 52 52.