Ils dénoncent une incompréhensible expulsion groupée
La Préfecture de Basse-Terre et la sous-préfecture de Pointe-à-Pitre sont sur le point d'expulser, de la Guadeloupe, une trentaine de ressortissants Haïtiens. Cela dès lundi 7 décembre 2020.Une expulsion collective, organisée par vol charter (vol spécifiquement affrété), alors que les lignes aériennes commerciales, entre l'archipel guadeloupéen et le pays d'Hispaniola, sont fermées depuis le début de la pandémie de Covid-19, soit depuis mars 2020.
Les services locaux de l'Etat mobilisent donc de grands moyens, pour expédier des êtres humains, hors du territoire français, dans un contexte sanitaire mondial toujours fragile et vers un pays où une crise politique et sécuritaire continue de sévir.
Plusieurs associations dénoncent cette initiative préfectorale. Au sein d'Amnesty international Guadeloupe, de la Fédération de la ligue des droits de l’Homme Guadeloupe, ou encore de la Cimade, les sentiments de stupéfaction, d'indignation, de colère et de tristesse s'entremêlent.
Cette expulsion interviendrait en totale contradiction avec les recommandations du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, qui déconseille fortement de se rendre en Haïti. En effet, le pays connaît, depuis plusieurs mois, un contexte de violences généralisées, du fait de l’implantation de gangs armés, dans plusieurs zones du pays. Le risque d’enlèvement et d’agressions y est très important et la prise en charge médicale, contre la pandémie de Covid-19, n’est que relative. Nos associations dénoncent une politique d’enfermement et d’expulsion acharnée et qui expose la sécurité et la santé des personnes étrangères.
Un appel à rassemblement a été lancé. Rendez-vous est donné ce samedi 5 décembre, à 10h00, sur la place de la Victoire de Pointe-à-Pitre. Parmi les manifestants, demain, il y aura les membres de l'association Coordination Haïtienne "Tèt Kolé", dont Johnny Désir est le président. Il a évoqué, au micro d'Alexandre Houda et Christian Danquin, son incompréhension. Il cri à l'injustice, car il estime que les Haïtiens sont trop souvent concernés par des mesures exceptionnelles défavorables :
Point de vue partagé par Mathias Haurat, président du groupe local de la CIMADE Guadeloupe, lui aussi interrogé par Alexandre Houda et Christian Danquin :
"Ce ne sont pas des criminels !"
Les personnes détenues au centre de rétention administrative (CRA) ne sont pas des criminels. Leurs profils nous sont présentés par Mathias Haurat, président du groupe local de la CIMADE Guadeloupe :
Les militants attendent que le préfet revienne sur sa décision, estimant que, dans le contexte actuel, il n'y a pas d'urgence à expulser ces personnes.
Des expulsions réglementaires, selon la préfecture
Mais le représentant local de l'Etat ne semble pas disposé à revenir sur sa décision. Dans un communiqué daté de ce vendredi 4 décembre 2020, la préfecture de la Guadeloupe justifie l'opération de reconduite à la frontière des ressortissants Haïtiens, dans le cadre de la lutte contre l'immigration irrégulière.Il y est précisé que l'éloignement envisagé, vers Haïti, ne concerne que des hommes isolés, en situation irrégulière.
Par ailleurs, selon l'argumentation de la préfecture :Cette opération se déroule dans le respect des règles de droits et procédures fixés en matière de lutte contre l’immigration irrégulière :
- examen individuel de situation, notamment au regard de la vie privée et familiale, du droit d’asile ;
- sur demande, assistance d’un avocat et d’un interprète ;
- possibilité de communiquer avec le consulat général d’Haïti ou tout autre personne.
Cette opération se déroule sous le contrôle du juge administratif et du juge des libertés et de la détention. Pour ceux qui le souhaitent, la possibilité de solliciter une aide au retour, auprès de l'Office Français de l’immigration et de l’intégration (OFII), est proposée. Enfin, cette opération se réalise avec l’accord des autorités haïtiennes qui ont apporté toutes les garanties sanitaires.