Gardel peut continuer à exploiter les terres de la SIAGAT

La justice s’est prononcée à deux reprises en faveur de la SA Gardel, dans le litige qui l’oppose depuis 2018 à la SIAGAT, propriétaire des 981 hectares loués et cultivés en canne par la sucrerie du Moule. Gardel peut continuer à exploiter ce foncier agricole.

D’un côté, la SA Gardel, qui exploite depuis quarante ans l’ancien faire-valoir direct de l’usine : 981 hectares, répartis sur les communes de Saint-François, Le Moule et Sainte-Anne. De l’autre, le propriétaire de ce foncier agricole : la SIAGAT (Société immobilière et agricole de la Grande-Terre). Depuis près de quatre ans, les deux entités sont en contentieux devant la justice.

Deux décisions en faveur de Gardel

En 1983, la SIAGAT avait signé avec la SA Gardel (qui était encore la SOSUGAT : Société industrielle et agricole de la Grande-Terre) un bail rural, renouvelé à plusieurs reprises. Mais en juillet 2018, la société présidée par Amédée Huygues-Despointes (fils) signifie à la sucrerie du Moule sa volonté de mettre fin au contrat, à l’échéance du bail, soit le 31 juillet 2020, afin de reprendre l’exploitation de ses terres.

La SA Gardel a alors saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Pointe-à-Pitre, pour faire annuler cette décision. Et c’est ce qu’elle a obtenu lors du jugement prononcé le 29 mars 2021. La SIAGAT a fait appel. L’audience s’est tenue le 14 février 2022, et l’arrêt, rendu le 4 avril, confirme le jugement du tribunal. Sur la forme, la justice a estimé que le président du conseil d’administration de la SIAGAT ne disposait pas, en juillet 2018, d’une habilitation régulière pour délivrer le congé (préavis) à Gardel.

Un bail rural contesté par la SIAGAT

La SIAGAT avait aussi demandé à la cour de prononcer la nullité du dernier bail, conclu en 1994, en raison d’un prétendu manquement de la société Gardel aux règles de contrôle des structures. Demande jugée irrecevable. Enfin le propriétaire du foncier réclamait la résiliation du bail en cours, mettant en avant un présumé abus de jouissance par l’usinier, de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds. Elle se basait sur un rapport d’expertise qui fait état d’une gestion aléatoire des mauvaises herbes, entraînant une baisse de rendement à l’hectare. Les juges n’y ont pas vu une faute caractérisée du locataire, qui porterait gravement atteinte au bien et aux intérêts du bailleur.

La cour a donc débouté la SIAGAT et elle l’a en outre condamnée à payer à Gardel la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, contre 5 000 € en première instance.

La plus grosse exploitation cannière de Guadeloupe

La société Gardel peut donc continuer d’exploiter ce faire-valoir indirect, au moins jusqu’au prochain terme du bail, le 31 juillet 2029. La direction de Gardel accueille avec soulagement cet arrêt de la cour d’appel.

Nicolas Philippot, directeur général délégué de la S.A. Gardel

« Il semblait évident que Gardel, mieux que quiconque, pouvait et devait continuer d’exploiter ces presque mille hectares de canne, parce que c’est le cœur de son métier ».

Nicolas Philippot, directeur général délégué de la S.A. Gardel

 

Avec près de mille hectares, l’exploitation de Gardel représente la plus grande surface cannière de Guadeloupe. Une exploitation indissociable de l’usine, estime la direction de la sucrerie. Car la canne livrée par ce faire-valoir sert de tampon pour assurer un approvisionnement constant de l’outil industriel. Mais l’exploitation joue également un rôle agronomique et expérimental. 80 hectares y servent de pépinières, pour la production de plants ; 16 hectares sont prêtés au CTCS (Centre technique de la canne à sucre) pour des essais variétaux et des pré-pépinières ; et 30 hectares sont actuellement en conversion biologique, dans le cadre du projet de sucre bio de la filière. La décision judiciaire s’inscrit donc, selon Gardel, dans l’intérêt général de la filière.

Nicolas Philippot 

La SIAGAT a la possibilité de se pourvoir en cassation jusqu’au 4 juillet.