Amédée Fengarol était à l’honneur à Pointe- à- Pitre. Le Pointois, à l’initiative entre autre de la section du Parti Communiste français en Guadeloupe, est élu maire en 1951 le même jour que son décès dans des circonstances qui demeurent troublantes. C’était un 11 janvier.
Il n'aura été maire que quelques heures. Amédée Fengarol s'écroulait en pleine rue, le 11 janvier 1951, le jour de son élection, à la mairie de Pointe-à-Pitre. A l'âge de 45 ans. Chaque année, à la date anniversaire de son décès, un hommage lui est rendu. Cette année, c'est à l'école élémentaire qui porte son nom que des animations ont eu lieu.
Un Guadeloupéen engagé
Amédée Fengarol naît le 30 mars 1905 à Capesterre Belle-Eau. Après une enfance et une scolarité à Pointe-à-Pitre, au lycée Carnot, notamment, où il obtient son baccalauréat, il entre dans l'enseignement en 1926 et exerce plusieurs îles de l'archipel. Très vite, il intègre le syndicat national des instituteurs, dont il deviendra le secrétaire général, à l'échelle locale. Un engagement au sein de l'Education qu'il poursuit en politique. Lors de la Seconde Guerre mondiale, opposant au régime de Vichy, il rejoint la Résistance.
Il se rapproche peu à peu de la pensée marxiste et fonde avec Hégésippe Ibéné, Rosan Girard et Raphaël Félix-Henri, la fédération communiste de Guadeloupe, en 1944.
Après la guerre, proche d'Aimé Césaire, Gerty Archimède et Henri Bangou, il participe comme conseiller général à la transformation de la mutualité en Sécurité sociale.
Amédée Fengarol, est un homme engagé et ambitionne alors de se présenter aux élections de la deuxième Assemblée consitutante de juin 1946. Election durant laquelle il accusa son opposant socialiste, Paul Valentino de fraude. Adversaire qu'il retrouve l'année suivante aux élections municipales de décembre 1947,à Pointe-à-Pitre.
A peine 4 ans plus tars, nouvelle campagne pour les élections municipales partielles de janvier 1951. Les affrontement opposants socialites et communistes sont vifs. Amédée Fengarol l'emporte avec 18 voix contre 15 pour Valentino.
Sans même nommer ses adjoints, le maire élu prend la décision d'ajourner la séance, en raison des tensions. Alors qu'il se dirige vers le siège du journal L'Etincelle, il s'effondre et meurt.
La thèse de l'assasinat encore présente
70 ans après son décès, la rumeur d'un assassinat plane toujours. Déjà en 1951, ses amis et partisans ne crurent pas à une mort naturelle. Beaucoup parlèrent d'empoisonnement, au curare, substance toxique qui entraîne la mort par asphyxie. Les résultats de l'autopsie pratiquée ne furent jamais communiqués.
Son petit-fils, aujourd'hui maire de Pointe-à-Pitre, Harry Durimel, s'est fait un devoir d'éclaircir le décès de son aïeul.
Un homme attachée à sa famille
Son petit-fils et toute sa famille entretiennent sa mémoire et son souvenir.
Avant d'être militant, Amédée Fengarol était aussi un homme épris de justice, un père remarquable, avec un amour inconditionnel de la Famille.
Autant l’expression "poto mitan" est souvent associée à l’image des mères antillaises avec l’idée de traduire un rôle incontournable dans la robustesse d’une cellule familiale. Autant "poto mitan" colle à la peau d’Amédée Fengarol tant il était central dans la forme et dans le fond. L’observer sous le spectre de la famille permet de le comprendre. Cet homme politiquement engagé, militant, influant, a eu 4 enfants.
Le premier d’un autre lit, et si la discrétion imposée à cette idylle cachée aura fait souffrir les adultes, les enfants eux, vivront le même amour. Amédée Fengarol ne fera pas de distinction avec les trois suivants. Tous grandiront dans un seul et même terreau. Celui d’une fraternité, entière et sincère.
De Pierre, l’aîné, il dira "sé premié timoun ki soti an rein an mwen". Celui des quatre qui lui ressemblait le plus physiquement. Mais avec Georges, Guy et Jocelyne une autre chose est sûre, tous seront pétris des mêmes valeurs qui animaient leur père, et qui placent la famille comme un objet sacré, plus qu’une simple question d’état-civil.
Son petit- fils Harry est aujourd’hui maire de Pointe à Pitre, 70 ans après… Et d’autres dans la filiation, comme l’universitaire et artiste Steve "Fola" Gadet, font à leur manière résonner les mots qui dénoncent les injustices, incitent à la réflexion, et pansent les blessures de nos sociétés.
Amédée Fengarol, n’était pas seulement une figure du patrimoine socio-politique de Guadeloupe. C’était aussi un homme, un père, dont les valeurs auront traversé les générations.
Une image malgré tout contestée par certains historiens aujourd'hui
L'hommage rendu par la mairie de Pointe-à-Pître aura en tout cas suscité de nouvelles discussions autour de sa personnalité. Face à l'image communément admise, certaines voix font entendre une autre version du personnage selon des éléments recueillis par les témoins de cette histoire.
Ainsi, l'historien René Bélénus a publié un commentaire sur ce personnage historique en en donnant une toute autre vision des faits.
Un élément versé à un débat qui se poursuit 70 ans plus tard.