Auguste Gène, Abel Damas et Louis Villeroy : tels sont les noms des Martyrs dont la ville de Port-Louis tient à entretenir la mémoire depuis 81 ans. Ces hommes ont été tués, en pleine révolte ouvrière, pour la liberté. C’était le 30 avril 1943, sous le régime Pétainiste.
Trois morts et 15 blessés, dans une révolte
Alors que la guerre sévissait en Europe, la Guadeloupe vivait des temps contraints de crise économique et sociale, mais aussi de montée d’un sentiment d’injustice propice à la révolte au sein de la population. Sous l’administration du maréchal Pétain, alors que la France s’engage dans une collaboration avec le Reich hitlérien, les méthodes autoritaristes du gouverneur Constant Sorin étaient de plus en plus dénoncées.
À Port-Louis, des militants projetaient de se rebeller. Ces derniers ont su que des armes étaient stockées dans les locaux de la gendarmerie. Leur assaut pour s’en emparer a tourné au bain de sang.
Le 30 avril 1943, alors que plusieurs dizaines de personnes ont fait irruption à la gendarmerie, un des militaires présents a usé d’une grenade pour les repousser. Auguste Gène, qui a eu la jambe arrachée, a succombé à ses blessures, quelques minutes après.
Abel Damas (ou Abel Nicoly, selon les écrits) a, lui, été tué par un policier, selon le récit fait par l’auteur port-louisien Eugène Plumasseau.
La répression a été brutale : les renforts des forces de l’ordre ont pourchassé et molesté les militants, mais pas seulement.
Un couvre-feu a été imposé, durant lequel les patrouilles ont été autorisées à faire feu sans sommation. C’est dans ce contexte qu’un certain Louis Villeroy a été abattu par un gendarme, non loin de chez lui.
Une quinzaine de personnes ont été blessées.
Plusieurs autres ont été arrêtées, incriminées pour leur participation présumée à la révolte, notamment pour avoir fabriqué des bombes.
Un pas vers la liberté
On raconte que ces évènements ont marqué le début d’une vague de soulèvements populaires, dans plusieurs communes de l’archipel, contre la puissance coloniale et ses injustices.
L’une des figures de cette lutte, le résistant Rousseau Nadir, a finalement été élue maire de Port-Louis, en 1945.
Cette tragédie a fait l’objet d’une pièce de théâtre et d’un livre à l’initiative de Luc Saint-Eloy, nommés "Blessures secrètes - Port-Louis, 1943".