Haïti : le Conseil présidentiel de transition officiellement créé

La Police nationale patrouille à une intersection, au milieu de la violence des gangs, à Port-au-Prince (Haïti) - 08/04/2024.
Le fraîchement créé Conseil présidentiel de transition en Haïti a fort à faire, pour mettre fin à des dizaines d’années d’instabilité politique et ramener l’ordre public. Cet organe, auquel le pouvoir est confié jusqu’au 7 février 2026 au plus tard, doit procéder par étapes. Sa première mission : nommer un premier ministre et mettre en place un gouvernement. En attendant, la population, aux abois car confrontée à la violence des gangs, fuit massivement la capitale et sa périphérie.

Le très attendu conseil présidentiel de transition haïtien a officiellement été créé hier (vendredi 12 avril 2024), un mois après l'annonce de la démission du premier ministre contesté Ariel Henry.
Ce dernier a officialisé la formation de cet organe, qui devra tenter de rétablir ordre public et stabilité dans le pays en proie à la violence des gangs, en signant un décret d’officialisation paru au journal officiel Le Moniteur.
"Le mandat du conseil présidentiel de transition prend fin, au plus tard, le 7 février 2026", selon le texte. Ses membres devront nommer "rapidement" un premier ministre, ainsi qu'un gouvernement "inclusif".
Le conseil n'est pas encore formellement aux manettes du pays et Ariel Henry "présentera la démission de son gouvernement suite à la nomination d'un nouveau Premier ministre", précise le document.

Longue instabilité politique et champ libre laissé aux gangs

Haïti, pays pauvre de la Caraïbe, pâtit depuis des dizaines d'années d'une instabilité politique chronique, d’une pauvreté sans cesse grandissante, des catastrophes naturelles et de la violence des gangs.
L’escalade de l’insécurité a atteint son paroxysme fin février, lorsque les bandes armées, dont la violence ravageait déjà des pans entiers du territoire, ont lancé des attaques coordonnées contre des sites stratégiques, disant vouloir renverser le premier ministre Ariel Henry.
Celui-ci, nommé quelques jours avant l'assassinat en juillet 2021 du président Jovenel Moïse, était fortement contesté. Il n'a pas pu regagner son pays après un déplacement au Kenya.
Le 11 mars, le même jour qu'une réunion entre Haïtiens et plusieurs organisations et pays comme les Etats-Unis, il a annoncé qu'il allait démissionner pour laisser la place à un conseil présidentiel de transition. Cet organe a pu voir le jour après des semaines de négociations difficiles.

Dans la foulée de l’annonce de la création du Conseil présidentiel de transition, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) s’est félicitée de cette possibilité d’un "nouveau départ pour Haïti".

Les pays de la Caricom se félicitent de la publication du décret établissant le Conseil présidentiel de transition en Haïti. La mise en place de ce conseil de neuf membres, largement représentatif et politiquement inclusif, laisse entrevoir la possibilité d'un nouveau départ pour Haïti.

Communiqué de la Caricom, basée à Georgetown (Guyana).

Fuite massive de la population

Alors que la population haïtienne souffre d’insécurité, de pauvreté et de famine, près de 100.000 personnes ont fui la zone métropolitaine de Port-au-Prince en un mois, pour se mettre à l'abri de l'escalade des attaques de gangs, a annoncé l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) vendredi.

Grâce à la mise en place d'une collecte de données aux stations de bus les plus utilisées, cet organisme a observé, entre le 8 mars et le 9 avril, le départ de 94.821 personnes de la capitale, pour rejoindre principalement les départements du Grand Sud. Ces derniers accueillaient déjà 116.000 déplacés ayant fui les mois passés.

Des passagers sont transportés dans un minibus à Port-au-Prince (Haïti) - 10/04/2024.

Le précédent chiffre de l'OIM faisait état de 53.000 personnes ayant fui, en l’espace de trois semaines, entre le 8 et le 27 mars.
L'agence onusienne note que ces chiffres ne reflètent pas nécessairement la totalité des flux, certains déplacés ne passant pas par les points de collecte des données, ou y passant quand les données ne peuvent pas être collectées.

Les provinces de destination "n'ont pas suffisamment d'infrastructures et les communautés hôtes n'ont pas de ressources suffisantes qui peuvent leur permettre de faire face à ces flux de déplacements massifs venant de la capitale", a commenté l'OIM.

La grande majorité (78%) des personnes interrogées par l'OIM a indiqué quitter la capitale à cause des violences et 66% ont assuré qu'elles resteront en dehors "aussi longtemps que nécessaire".