C’est à compter de ce lundi 15 mai 2023 que les procédures de réintégration des personnels non-vaccinés contre la Covid-19 des secteurs de la santé et du médico-social doivent être mises en œuvre. Une instruction ministérielle fixe les modalités de ce retour au travail.
La carrière des travailleurs concernés est restée bloquée au niveau où elle était, au moment de leur suspension ; aucune indemnisation n’est prévue, pour cette période d’absence d’activité qui, pour certains, a duré 20 mois.
Face à cette réalité intolérable pour les organisations syndicales, celles-ci ont fait parvenir aux élus, à l’Agence régionale de santé (ARS) et aux directions d’établissements de santé, le projet d’accord de méthode qu’elles souhaitent dans les négociations sur la réintégration des soignants et assimilés.
Les conditions de réintégration prévues par le gouvernement
Le décret relatif à la suspension de l’obligation vaccinale contre le Covid-19 des professionnels et étudiants est paru le samedi 13 mai 2023.
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Le document, signé par la première ministre Elisabeth Borne, était accompagné d’une instruction interministérielle, à destination des préfets et des directeurs des agences de santé. Celle-ci prévoit les conditions du retour au travail des personnels qui ne se sont pas conformés à la loi du 5 août 2021 et fait le point sur la situation des agents.
Ces derniers n’ont généré de droits ni aux congés, ni à l’avancement, ni à la retraite ou à pension. Aucun rattrapage de salaire, de primes ou encore d’avantage n’est non plus prévu, pour le laps de temps où ils ont été éloignés de leurs postes de travail. En clair, la situation administrative des soignants suspendus est restée bloquée au niveau où elle était au moment de leur suspension.
L’instruction ministérielle applique ainsi à la lettre les textes de loi.
Avec la parution de ce décret, les personnels concernés doivent être réintégrés dès ce lundi et, si possible, dans les deux semaines à venir au maximum, le temps pour les chefs d’établissements de contacter chaque professionnel, de lui indiquer son poste d’affectation et la date de reprise du travail. Cette procédure peut s’effectuer par courrier ou après un entretien, si le soignant le désire et le fait savoir, dans les délais impartis.
Le poste proposé peut être le même, s’il est resté vacant, ou être équivalent ; il doit obligatoirement sur le même site géographique que le précédent occupé. Si le personnel refuse l’affection proposée par l’employeur, il peut alors être licencié pour abandon de poste, ou se voir proposer une rupture conventionnelle.
Enfin, les employeurs sont tenus de rémunérer les agents dès aujourd’hui, même s’ils n’ont pas encore effectivement repris le travail.
Le projet d’accord de méthode voulu par les syndicats
Malgré la publication du décret sur la réintégration des soignants, le bras de fer n’est pas terminé. Les non-vaccinés promettent désormais de se battre pour obtenir réparation, quant aux préjudices subis durant la période où ils étaient suspendus.
Parmi les arguments des syndicats, ceux-ci avancent que les procédures de suspensions n’étaient pas légales :
A partir du moment où vous ne respectez pas vos propres règles, vous ne respectez pas la loi, vous ne pouvez pas nous demander de respecter la moindre obligation non plus !
Gaby Clavier, secrétaire de section UTS-UGTG au CHU (au micro de Julien Babel)
Les "Organisations en lutte contre l’obligation vaccinale" ont par ailleurs élaboré un projet d’accord de méthode, qui organise les négociations relatives à la réintégration des personnels suspendus, en Guadeloupe. Ce document a été adressé à l’ensemble des acteurs : Etat, ARS, Région, Département, parlementaires (sénateurs et députés), fédération d’associations gestionnaires du secteur médico-social, Centre interprofessionnel de santé au travail (CIST), établissements de santé publics et privés et organisations syndicales représentatives dans les secteurs concernés.
Le projet, qui tient sur 7 pages, revient en préambule sur la trame de l’arrivée du Covid-19 en Guadeloupe, sur la gestion de cette crise sanitaire et l’application de loi du 5 août 2021.
Il prévoit l’ouverture des négociations sur les conditions de cette réintégration, autour des thématiques suivantes :
- Rémunération : indemnisations relatives aux différents préjudices subis, paiement des heures relatives aux mandats syndicaux et de représentants du personnel, etc.
- Conditions de réintégration : entretien collectif ou individuel en préalable de la reprise du travail, assemblée générale convoquée par l’employeur, droits aux congés, à la formation, visite médicale au CIST, reconstitution des carrières, ancienneté, cotisations sociales, etc.
- Libertés individuelles et collectives : exercice du droit syndical, fonctionnement des instances représentatives du personnel et protection des salariés concernés par la reprise, etc.
Les syndicats prévoient la mise en place d’une commission technique de suivi et d’évaluation, chargée de consigner les décisions arrêtées ; elle comprendrait, en son sein, des représentants de chaque signataire.
L’organisation et le calendrier des séances de négociation, la distinction à faire entre les secteurs de la santé, du social, du médico-social et du libéral... de nombreux point sont prévus, en vue d’une négociation effective.
Mais, en l’état actuel des choses, compte tenu de la position tranchée et inflexible de l’Etat, rien n’indique que les parties se rencontreront, pour de telles discussions.
Ils ont dit...
On doit retenir que c’est une belle victoire, quand même, pour les personnels qui ont refusé la vaccination obligatoire pour travailler, exercer leur métier et soigner les patient. Donc, la première chose à retenir c’est notre capacité à résister, de dénoncer et de nous engager dans un combat pour la liberté (...).
Gaby Clavier, secrétaire de section UTS-UGTG au CHU (au micro de Julien Babel)
Quel regard portent sur cette réintégration les principaux intéressés, à savoir les personnels suspendus ? Corinne est infirmière de bloc opératoire, Jérôme est libéral ; tous deux ont été suspendus. Sylvie, quant à elle, est désormais retraitée, mais son avis, sur presque deux ans de suspension, est éclairé par 43 années de bons et loyaux services.
Entre appréhension, sérénité et méfiance, ils s’apprêtent à faire des efforts pour recréer une symbiose au sein de leurs services respectifs et travailler en bonne entente avec leurs collègues, dont ceux qui se sont faits vacciner. Ils comptent simplement revenir avec leurs compétences et demandent à être respectés dans leur choix.
Pour ma part, je verrai quand je serai à l’entretien (...)
Corinne, infirmière de bloc opératoire (au micro de Julien Babel)
Je me souviens les quelques mois d’arrêt qu’on a pour une grossesse... reprendre c’est déjà compliqué. Donc, forcément, deux ans d’arrêt, c’est très compliqué de reprendre (...).
Sylvie, retraité du secteur de la santé (au micro de Julien Babel)
Là où on n’est pas tranquille, c’est de voir que l’Etat met une zizanie ; il va y avoir des non-vaccinés et des vaccinés qui travaillent (...).
Jérôme, soignant libéral (au micro de Julien Babel)
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Laetitia Broulhet et Mickaël Bastide sont allés à la rencontre des futurs réintégrés, dont certains ont déjà été convoqués par leur employeur. Voici leur reportage :