Certains planteurs de canne s’impatientent et ne cachent pas leur inquiétude : la campagne sucrière n’est pas près d’être lancée ; or, avec le manque d’eau, les cannes, qui elles sont prêtes à être coupées, ont commencé à se dessécher sur pied. La récolte, dans l’idéal, aurait dû démarrer mi-février pour la Guadeloupe dite continentale, et mi-mars pour Marie-Galante.
Mais si aucune date n’a encore été décidée c'est parce que les négociations dans le cadre de la "convention canne" 2023-2028 n'ont toujours pas abouti. Les discussions bloquent sur la part industrielle. Les sucreries ont proposé, la semaine dernière, une augmentation d’1 euro par tonne.
C'est la première proposition chiffrée annoncée par les usiniers depuis le début des négociations au sein de l'interprofession Iguacanne : elle ferait passer le prix industriel à 35,84€ pour Gardel et 34,84€ pour Grande-Anse.
"Une hausse dérisoire voire indécente" estiment les représentants des planteurs ; certains syndicats agricoles ont d'ailleurs quitté la salle des discussions lors de cette dernière réunion du 8 mars dernier. Tous réclament, pour les six prochaines campagnes, une réévaluation du prix global de la tonne de canne qui tienne compte de la forte hausse des coûts de production, mais qui permette aussi de redonner de l'attractivité à ce secteur, afin de faire remonter un tas de canne descendu à moins de 500 000 tonnes ces dernières années.
En additionnant le prix usine et les aides publiques (qui représentent près de 60% des recettes du planteur), la tonne de canne vendue en sucrerie est payée actuellement environ 82€ ; les planteurs réclament autour de 120€.
Du côté de l'Etat, plusieurs points sont déjà actés
- une hausse de 3€ sur l'aide à la garantie de prix (AGP)
- une hausse de 1,50€ sur la prime bagasse
- le versement d'une nouvelle aide de 447€ par hectare, sois 6,38€ par tonne.
La Région pourrait y ajouter 2€ par tonne, soit une subvention de plus d'1 million d'euros par an, qui reste à valider.
En incluant la hausse de 1€ annoncée par les usines, cela nous amène à un total de 96€ par tonne. Les syndicats de planteurs demandent aux industriels un effort supplémentaire en prenant en compte, notamment, la valeur ajoutée sur la mélasse et sur les sucres de bouche, dits "sucres spéciaux".
Et puis cette question concernant les planteurs de Marie-Galante, privés des 11€ de prime bagasse, faute de centrale thermique : la Région avait compensé ce manque à gagner pour les campagnes 2021 et 2022; qui va prendre le relais à partir de 2023 ?
La Direction de l’Agriculture a convoqué une réunion avec l’Iguacanne ce vendredi. Mais la nouvelle « convention canne » (sur les aides de l’Etat à la filière) ne peut être validée tant que n’est pas signé l’accord interprofessionnel (entre usiniers et planteurs) sur le prix industriel de la tonne de canne… Et puis en dehors des syndicats agricoles, qui préparent actuellement une stratégie d’action commune, un Collectif de planteurs (créé l’an dernier) entend lui aussi se faire entendre sur ce prix de la tonne de canne…