Ce couple de quarantenaire, en jeans, tee-shirt et basket, se tient débout à la barre du tribunal et s’exprime en mandarin par le truchement d’une interprète chinoise.
La Grande Muraille a fait l’objet de trois contrôles par les services de l’Etat entre les mois de janvier 2020 et février 2021. Contrôles qui ont, à chaque fois, révélés des infractions identiques qui n’ont jamais fait l’objet de la moindre régularisation.
Comme l’emploi en cuisine de plusieurs ressortissants chinois en situation irrégulière, peu ou pas payés ou alors en contrepartie du gîte et du couvert dans des locaux insalubres situés sous les combles du restaurant.
« C’était des amis qui me donnaient un coup de main. Des amis de mon associé chinois »
soutient Mr Zhou.
(Voir : L'Etat à l'assaut du travail clandestin dans l'archipel. Septembre 2020)
Autre grief, l’emploi en salle de ressortissants haïtiens, non déclarés, là encore. L’une d’elles présente ce matin à l’audience, explique avoir été licenciée sans autre forme de procès après avoir informé son employeur qu’elle était enceinte. D’autres évoquent des conditions de travail proches de l’esclavage. Des éléments requalifiés par la Justice sous la forme de conditions incompatibles avec la dignité humaine.
Le couple est également poursuivi pour avoir escroqué l’Etat après avoir bénéficié d’aides liées au COVID19 et de mesures de chômage partiel alors que l’établissement était fermé.
« Je ne connais pas la loi française. Tout cela, c’est la faute de mon comptable »
renchérit Mr Zhou.
Le comptable, bien évidement, n’est pas dans la salle. Dommage, il aurait peut-être pu expliquer à la Cour comment avaient été blanchis 201 000 euros en coupures de 50 et de 100 euros.
Le parquet a requis 10 mois de prison avec sursis pour l'époux Mengdong Zhou et 8 mois avec sursis pour l'épouse, Chunli Zhou et pour le couple, à titre complémentaire : interdiction d'exercer dans la restauration pour une durée de 3 ans.
Poursuivi également au titre de personne morale, le restaurant La Grande Muraille a fait l'objet d'une liquidation judiciaire, ce qui entraîne de facto l'extinction de l'action judiciaire.
L'avocat des époux Zhou, le vice-bâtonnier Josselin Troupé, regrette l'absence de la comptable qui aurait pu s'expliquer sur son "rôle évident" dans le fonctionnement de la société. L'avocat rappelle que son client a entièrement reconnu les faits. Il a demandé la clémence du tribunal pour l'époux et la relaxe totale pour l'épouse.
Délibéré le 28 septembre 2021