La lutte contre VIH fortement bouleversée par l'émergence du COVID19

En Guadeloupe, c'est le service des maladies infectieuses et tropicales qui organise la lutte et la prise en charge des malades du VIH. Mais c'est aussi ce service qui a été en première ligne dès l'apparition des premiers cas de COVID19 en mars dernier. Les équipes ont été mises à rude épreuve.
En avril dernier, de nombreux médecins sont montés au créneau pour rappeler que la COVID19 n'était pas la seule maladie grave à traiter. Ils ont aussi alerté rapidement sur les effets néfastes de la déprogrammation massive du traitement des autres pathologies. Sur ce discours, la Guadeloupe n'est pas en reste. D'autant plus que les spécialistes du service des maladies infectieuses et tropicales ont été les premiers à être réquisitionnés dès l'émergence des premiers cas sur le territoire. Or, ils étaient déjà engagés sur le front d'une autre pandémie, plus ancienne celle-là, le VIH. 
 

Réorganisation des soins

Le docteur Isabelle Lamaury, présidente du COREVIH, et toutes ses équipes, ont dû concevoir rapidement un nouveau fléchage des malades. "Nous décidé de recevoir en consultation les personnes que nous pouvions encore recevoir. Celles que nous ne pouvions consulter ont été déprogrammées et décâlées." Les patients en bonne santé, ont, eux été reçus en téléconsultation. Même dispositif pour le service de Saint-Martin qui a pris de plein fouet la première vague. "C'était très compliqué pour eux. Il y a deux médecins au centre hospitalier et si on se souvient bien, c'est à Saint-Martin que l'un des tous premiers cas est apparu. Aujourd'hui encore les spécialistes restent sous tension." En dehors des structures médicales, c'est tout le réseau de veille et d'encadrement qui a tenté de maintenir des permanences et ce, malgré le confinement.
 

Reprendre la lutte

Elle a beau avoir plus de 30 ans, l'épidémie de VIH n'est pas terminée. En revanche, des progrès sensibles ont été faits par la recherche ces dernières années. Le traitement rétroantiviral (TAR) administré aux personnes vivant avec le VIH (PVVIH), empêche la transmission. En ce qui concerne la prévention, la prophylaxie pré-exposition (PrEP) déployée vers les personnes séronégatives les plus exposées présente d'excellents résultats avec une protection évaluée à plus de 95%. "Si toutes les PPVIH et les personnes exposées au risque VIH avaient accès à ces avancées thérapeutiques et outils innovants, nous pourrions mettre fin à l'épidémie VIH/Sida en tant que problème majeur de santé publique au plan mondial, d'ici 2030" table le COREVIH.

En 2020 déjà, les objectifs de l'ONUSIDA tablaient sur 90% de diagnostics et 90% d'administration du TAR. L'ennui, c'est que la pandémie de Covid19 a retardé le volet le plus important de la lutte anti-sida. "Nous ne pouvons pas encore estimer l'impact de la COVID19 sur la prévention, mais il est clair que l'on a pris du retard. Les centres ont été fermés avec le confinement. On ne pouvait pas recevoir convenablement avec les mesures barrière, certains personnels étaient absents ou malades. Ce qui est sûr, c'est que le dépistage est la clé de voûte du progrès." regrette Isabelle Lamaury. Certains chiffres nationaux permettent déjà de mesurer l'impact du COVID sur la lutte anti-VIH. En moyenne, 5 millions de dépistages sont réalisés en un an. Pour 2020, le chiffre est tombé à 650 000.
 

Lutter à distance

Du coup, cette année, il va bien falloir retourner sur le pied de guerre. Mais sans rassemblement, conformément aux restrictions. Au local, le COREVIH misera donc sur les réseaux sociaux pour booster ses messages de sensibilisation. Pour atteindre les publics non-connectés, notamment, les seniors, la structure a choisi de s'afficher sur des bus en région pointoise et dans les îles du Nord, où les messages seront traduits en anglais et espagnol.