La Nouvelle-Calédonie a connu une nouvelle nuit de heurts, entre mardi 25 et mercredi 26 juin 2024. Les exactions ont repris de plus belle, dans le territoire du Pacifique, depuis le transfert dans l’Hexagone de huit militants de la cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), mouvement issu de l'Union Calédonienne. Ces Indépendantistes ont été placés en détention provisoire à 17.000 kilomètres de Nouméa, soupçonnés d’avoir orchestré les émeutes des dernières semaines, en marge des discussions sur le dégel du corps électoral, à Paris.
Retour des tensions
La suspension par Emmanuel Macron du projet de loi constitutionnelle avait quelque peu ramené le calme, sur place.
Mais la mesure d’éloignement exceptionnelle imposée aux mis en cause, dans le cadre de l’enquête judiciaire, a remis le feu aux poudres.
La Ligue des Droits de l’Homme dénonce leur incarcération dans différentes prisons hexagonales (Mulhouse, Dijon, Villefranche sur Saône, Riom, Blois, Bourges). La présidente de la Ligue des Droits de l’Homme, également avocate calédonienne, Nathalie Tehio parle d’une « politique de dispersion des prisonniers, qui va à l'encontre de leurs droits fondamentaux ».
Deux autres militants Kanaks ont été écroués hier (mardi 25 juin 2024), à Nouméa ; ceux-là n’ont pas été transférés, à ce jour. L’un d’eux est Joël Tjibaou, l’un des fils du leader Indépendantiste Jean-Marie Tjibaou qui, il y a 36 ans, le 26 juin 1988, scellait les accords de Matignon par une poignée de main avec le Loyaliste Jacques Lafleur.
Des Antillo-Guyanais solidaires du Peuple Kanak
L’actualité de la Nouvelle-Calédonie est très suivie depuis les Antilles et la Guyane.
Une cinquantaine d’organisations syndicales, nationalistes et/ou indépendantistes de Guadeloupe, de Guyane et de Martinique expriment leur solidarité indéfectible envers les "courageux combattants Kanaks de la dignité", dans une lettre ouverte diffusée le 24 juin dernier.
Leurs propos envers la France sont très virulents et durs.
Elles appellent à la mobilisation tous leurs membres, pour exiger la "libération immédiate et sans conditions de tous les militant(e)s et prisonnier(e)s politiques Kanaks".
Les signataires "soutiennent la lutte du peuple Kanak pour son droit inaliénable à la pleine souveraineté et à l’indépendance".
Ce qui se passe en Nouvelle-Calédonie est tout simplement incroyable. L’État colonial français entre dans un pays, s’installe et, après, il impose les conditions de sa sortie : « il faut faire un référendum, il faut voter, il faut ci et ça, etc. ». C’est vraiment inadmissible, à la limite de la barbarie, parce qu’on ne peut pas imposer autant de souffrances à un peuple, depuis aussi longtemps et faire comme si c’était normal.
Nita Brochant, secrétaire générale du FKNG (Fos pou konstwui Gwadloup) [Traduction du créole]
Ces organisations qualifient les récents évènements de "déportation des militants" vers l’Hexagone. Des personnes qui, pour elles, "étaient en légitime défense" et "manifestaient pacifiquement contre le dégel du corps électoral".
La France qui se prévaut régulièrement d’être le pays des Droits de l’Homme est, manifestement, le pays des Droits de l’Homme blanc. Chaque fois que c’est dans une colonie, il n’y a plus de droits, plus de justice (...) On sait bien ce que veut la France : c’est de rendre les Kanaks minoritaires chez eux !
Nita Brochant, secrétaire générale du FKNG (Fos pou konstwui Gwadloup) [Traduction du créole]
Les Antillo-Guyanais à l’origine de cette lettre ouverte estiment ne pas pouvoir rester silencieux, face au combat mené par les Kanaks, au regard de l’histoire de leurs territoires respectifs. Ils appellent à un rassemblement des "peuples colonisés".