En ce mois de mai, mois de la Mémoire de la traite des Africains réduits en esclavage, plusieurs organisations anticolonialistes et patriotiques guadeloupéennes ont organisé une manifestation au pied d’un arbre symbolique, hier après-midi (samedi 25 mai 2024) : le Fromager des Martyrs de la Liberté de 1802.
Cette année-là, Napoléon a décidé de rétablir l’esclavage, après une première abolition qui remontait à 1794. Dès lors, des révoltes ont éclaté en Guadeloupe ; elles ont été réprimées dans un bain de sang. Devant le fameux Fromager, une potence avait été installée par l’armée française, pour pendre de nombreux prisonniers. D’où le fait que le lieu soit érigé en lieu de souvenir.
"Combien de nos ancêtres ont été sacrifiés, pendus à cet arbre ? " demandent les militants. "Nul ne sait ! ".
Un symbole, un lieu de mémoire
Les participants s’étaient donné rendez-vous devant la stèle de Louis Delgrès, au Matouba, à Saint-Claude, où ils ont déposé des fleurs et se sont recueillis.
Ils ont ensuite pris le départ, en direction du Fromager des Martyrs, également situé au Matouba, sur un terrain privé mis à disposition par son propriétaire. Des haltes ont été consacrées à des explications historiques, ou encore des témoignages.
Préalablement, les militants avaient nettoyé le site, lors d’un "koudmen".
Une stèle y a été érigée et inaugurée ce 25 mai.
Sur place, des rituels commémoratifs, des interventions, des déclamations poétiques et une ambiance musicale au son du tambour et de la flûte ont été prévus.
Ils ont dit...
Lors de ce que l’on a appelé la « Guerre de Guadeloupe », en 1802, après que Delgrès s’est fait sauter dans les hauteurs de Matouba, il y a de très nombreux Guadeloupéens qui ont été pendus à cet arbre. Nous nous sommes dit qu’un tel arbre, on ne peut pas le laisser mourir, bien qu’il soit là depuis des années. Il faut qu’on le mette à la disposition des Guadeloupéens (...).
Eric Desfontaines, ancien secrétaire général de l’UPLG [Traduction du créole]
C’est intéressant, même s’il n’y avait pas de commémoration, que les gens connaissent cette histoire ! (...)
Francelise Corvo-Hatchi, militante de plusieurs organisations syndicales et patriotiques [Traduction du créole]
Ce n’est pas pour rester enfermé dans cette histoire. Il faut connaître ses racines, pour les mettre en terre. Comme ça, quels que soient les intempéries et le sens du vent, on reste debout.
Frédéric de Vieux-Habitants [Traduction du créole]
NOTA BENE/
*Les organisations à l’origine de cet évènement sont l’Alyans Nasyonal Gwadloup (ANG), le Comité d'initiative pour un projet alternatif (CIPPA), le Comité international du peuple noir (CIPN), Fos Pou Konstwui Gwadloup (FKNG), le Kolèktif pou Sové Gwadloup (KSG), le Mouvement international pour les réparations (MIR), le Parti communiste guadeloupéen (PCG) et L'Union populaire pour la libération de la Guadeloupe (UPLG).